Annonces d’Emmanuel Macron : un plan de communication « qui vole en éclat »

Annonces d’Emmanuel Macron : un plan de communication « qui vole en éclat »

De l’incendie de la cathédrale de Notre-Dame de Paris à une prise de parole imprévue hier soir, le plan de communication d’Emmanuel Macron pour sortir du Grand débat a complètement été balayé par l’actualité.
Public Sénat

Par Yann Quercia

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C’était l’allocution la plus courte d’Emmanuel Macron depuis son arrivée à l’Elysée. 5 minutes et 46 secondes, en direct, pour tenter une nouvelle fois de rassembler la nation autour de l’incendie de Notre-Dame de Paris, qui a ému la France et le monde entier. Dans le décor très lumineux, cette fois, du bureau doré de l’Elysée, le chef de l’Etat a, comme à son habitude, soigné les détails : le coq français sur la gauche de son bureau et les œuvres romanesques complètes de Stendhal, les Mémoires de Charles de Gaulle et un volume d'André Gide sur la droite.

Emmanuel Macron devait reprendre la main après son allocution reportée et faire de cette occasion une opportunité. « L’incendie de Notre-Dame nous rappelle que notre histoire ne s’arrête jamais et que nous aurons toujours des épreuves à surmonter » a déclaré le Président de la République qui a souhaité que la cathédrale soit rebâtie « plus belle encore » d'ici « cinq années ».

Florian Silnicki, fondateur de l'agence de communication "LaFrenchCom" estime qu’Emmanuel Macron a voulu resacraliser sa fonction avec cette prise de parole : « Cette intervention, qui misait sur l’histoire, sur les mémoires, sur l’enracinement de son propre discours politique dans l’Histoire, est un moyen de se resacraliser et de tenter de reconstruire le personnage politique qu’il a installé sur l’échiquier politique. »  Pour Gaspard Gantzer, ancien conseiller en communication de François Hollande, « il était utile d’intervenir car, dans les moments dramatiques, il vaut mieux prendre la parole régulièrement ». Il estime toutefois que « ce message aurait pu tenir en 1 ou 2 minutes. »

 « Le Président et son entourage ont manqué de chance »

Son entourage le dit et le répète depuis le début du quinquennat : Emmanuel Macron est le maître des horloges. Pourtant, depuis lundi, c’est tout l’agenda et le plan de communication de Président qui ont été balayés. Le chef de l’Etat devait prononcer le discours le plus important de son quinquennat : réponses au Grand débat, sortie de crise avec les Gilets jaunes. « Je vous réponds lundi soir » avait-il promis dans un teaser hollywoodien diffusé dimanche sur les réseaux sociaux.

A l’émotion suscitée par l’incendie de la cathédrale de l’Ile-de la-Cité est venu s’ajouter la fuite des annonces, hier en milieu d’après-midi, du discours prévu lundi. Le discours intégral circule entre les rédactions et les articles se multiplient dans les médias pour commenter les propositions que le Président n’a pas prononcées. La trêve politique est rompue dans les médias. « Je reviendrai vers vous dans les jours prochains pour que nous puissions agir collectivement dans le cadre de notre Grand débat. Mais le moment n’est pas encore venu » réagit Emmanuel Macron.

 « Je crois qu’ils ont manqué de chance. Ils avaient construit une séquence de communication bien huilée. Tout cela a volé en éclat avec le drame et maintenant ils doivent courir après les évènements » analyse Gaspard Gantzer. L’effet « Whaou » promis par l’entourage du Président n’aura pas lieu et il faut désormais préparer une allocution qui, quoiqu’il arrive, risque de décevoir. « Je lui recommanderais de ne pas trop tarder à s’exprimer car s’il laisse s’installer ce flou, ce sentiment de cacophonie, ce sera bon ni pour lui ni pour personne », ajoute-t-il.

Fuites incontrôlables ou ballons d’essai ?

On le sait, les relations entre la presse et la Présidence de la République sont compliquées depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron. Selon l’entourage du chef de l’Etat, les fuites de ses annonces dans les médias l’auraient mis en colère. Pourtant, un grand nombre de rédactions avaient reçu le texte du Président, sous embargo comme il est d’usage, avant son allocution. « Tout au long de son quinquennat, Emmanuel Macron a régulièrement été tenté de laisser fuiter des documents pour mesurer l’impact des réformes qu’il envisageait sur l’opinion » confie Florian Silinicki. Il ajoute : « C’est une manière maladroite de lancer des ballons d’essai. »

Gaspard Gantzer ne croit pas à cette théorie et estime que les équipes du Président ont été « dépassées » par les événements. Emmanuel Macron a d’ailleurs invité à ne pas « se laisser prendre au piège de la hâte » : « Après le temps de l’épreuve viendra celui de la réflexion puis celui de l’action, mais ne les mélangeons pas. Ne nous laissons pas prendre au piège de la hâte. Je sais l’espèce de fausse impatience selon laquelle il faut réagir à chaque instant. Comme si être à la tête d’un pays n’était qu’administrer des choses. »

Les journalistes ont donc brisé l’embargo d’un texte qui n’a pas été prononcé. Gaspard Gantzer ne voit pas de problème avec ces fuites et insiste sur l’importance de la liberté de la presse : « Les journalistes ne sont pas là pour être au service du pouvoir, Je trouve très bien qu’ils aient pu faire leur travail au cours des derniers jours. On a besoin d’une presse libre et indépendante. »

La Président souhaite prolonger la trêve politique mais devrait rapidement revenir s’exprimer devant les Français pour tenter de sortir d’une séquence qui a commencé en novembre avec les Gilets jaunes.

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