Plusieurs députés LREM ont indiqué lundi qu'ils allaient s'abstenir mardi à propos de la proposition de loi LR "anticasseurs" qui va être soumise au vote solennel de l'Assemblée en première lecture.
"La nouvelle interdiction administrative de manifester me pose problème sur la liberté fondamentale de manifester, au cas où elle viendrait à être mal utilisée par un futur régime mal intentionné, par exemple d'extrême droite", a expliqué Matthieu Orphelin dans un communiqué.
Malgré d'autres mesures du texte que l'élu du Maine-et-Loire juge "efficaces" (nouveau délit de dissimulation volontaire du visage, possibilité de fouilles), il s'abstiendra en "espérant" lors de la prochaine lecture de nouvelles évolutions sur ces interdictions préalables de manifester décidées par les préfets.
Aurélien Taché (Val-d'Oise) avait aussi indiqué dans le Journal du Dimanche qu'il s'abstiendrait "en l'état". "On ne peut pas mettre la restriction de liberté comme un principe", faute de quoi "on met le doigt dans quelque chose qui pourrait conduire à des dérives", a-t-il de nouveau insisté lundi sur LCP.
A-t-il été réprimandé? "Personne ne m'a passé un savon", a-t-il assuré. Il n'y aura "en aucun cas" sanction "s'ils s'abstiennent", a indiqué le patron des députés "marcheurs" Gilles Le Gendre, lors de l'émission "Audition publique" LCP-Public-Sénat-AFP, en évaluant à "une vingtaine" leur nombre.
"Je ne suis pas là pour pratiquer la police de la pensée" et "je mise sur l'esprit de responsabilité de mes collègues", a-t-il ajouté.
Martine Wonner (Bas-Rhin) ne votera pas non plus la proposition de loi LR: elle s'abstiendra voire votera contre, a-t-elle précisé à l'AFP.
Sonia Krimi (Manche), qui avait revêtu "symboliquement" en novembre un gilet jaune donné par des manifestants à sa permanence, a un moment voulu voter contre ce texte qui "n'aide pas à la cohésion sociale", avant de se rallier aux abstentionnistes, a-t-elle déclaré à l'AFP.
Elle juge également l'article sur les interdictions administratives de manifester "liberticide", "contraire à la déclaration des droits de l'Homme" et "inutile".
Cet article 2 doit permettre aux préfets de prononcer des interdictions de manifester à l'encontre d'individus représentant "une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public", sous peine de six mois d'emprisonnement et 7.500 euros d'amende en cas d'infraction.
Interrogé sur ces votes contestataires, le ministre des Relations avec le Parlement Marc Fesneau (MoDem) a jugé sur le site de L'Opinion que "c'est un peu dommage" car "il y a eu un travail intéressant entre le gouvernement et le Parlement, en particulier avec la majorité", afin que "le texte soit d'une part le plus opérationnel et d'autre part tienne compte de l'exigence que nous avons tous de tenir les libertés individuelles".
Chaque parlementaire est libre de son vote, admet-il aussi: "On n'est pas là pour être des gardes-chiourmes, chacun est en situation de responsabilité".
Le délégué général de LREM Stanislas Guerini, qui "n'est pas en position de censeur", a assuré qu'il n'y aurait pas d'exclusions car "on peut assumer des désaccords".
"Je ne suis pas là pour exclure les uns ou les autres, en fonction de leur position sur des textes", a-t-il déclaré sur franceinfo, tout en disant souhaiter que les députés LREM soient "tous rassemblés" pour la deuxième lecture à l'Assemblée.