Après les députés, les sénateurs se saisissent du projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel ». Il porte sur la formation professionnelle, l’apprentissage ou encore l’assurance chômage. La Haute assemblée a examiné le texte en commission ce mercredi, non sans l’avoir modifié. Il passera en séance à partir du 11 juillet.
« Pour nous, défendre les régions, c’est défendre les territoires »
« En l’état actuel, le Sénat ne peut pas voter le texte. On demande au gouvernement de faire un pas vers nous », affirme le sénateur LR Michel Forissier, l’un des quatre co-rapporteurs du texte. Le sénateur du Rhône apprécie cependant que le gouvernement ait « repris de nombreuses propositions d’un texte que nous avions déposé en 2016 » sur la formation professionnelle.
Demande numéro 1 des sénateurs : une meilleure place pour les régions dans le dispositif d’apprentissage. « Elles doivent être associées à tous les stades, opérationnel et décisionnel. Et on veut vraiment qu’elles aient une place sur l’orientation » demande Michel Forissier. « C’est la première fois qu’on voit le retrait d’une compétence à une collectivité » insiste-t-il. Une attitude en parfaite adéquation avec la démarche traditionnelle du Sénat, chambre représentant les collectivités territoriales : « Pour nous, défendre les régions, c’est défendre les territoires, les CFA qui font vivre des petits coins reculés » souligne le rapporteur.
Quadripartisme
Autre point mis en avant : la majorité sénatoriale souhaite « une cohérence entre les acteurs, en augmentant de 15 à 25 le nombre de membres du conseil d’administration de France compétence, afin de permettre d’avoir une présence équilibrée entre partenaires. C’est le quadripartisme : Etat, syndicats, patronat et régions » explique Michel Forissier. France compétence est l’agence nationale créée par le projet de loi. Résultant de la fusion de trois entités, elle se chargera de contrôler le prix et la qualité des formations.
Les sénateurs de la commission des affaires sociales veulent aussi un « éclaircissement » sur les décisions qui seront prises par la suite par décret. « Selon le projet de loi, beaucoup de dispositions seront prises par décret, par simple décision de l’Etat. Il y a beaucoup de nébuleuse » met en garde Michel Forissier.
Droit au chômage pour les démissionnaires : « Pas de lisibilité sur le coût »
Le rapporteur a aussi « beaucoup d’inquiétude face au délai, fixé au 31 octobre, pour le regroupement des branches professionnelles. C’est trop court » selon le rapporteur. « On demande au gouvernement d’avoir un peu de souplesse, sur la période de transition, pour les CFA et les organismes de formation ».
Sur l’ouverture des droits au chômage pour les indépendants, le rapporteur souligne qu’« ils ne sont pas demandeurs eux-mêmes ». Ce nouveau droit sera « financé par l’impôt, et non la contribution des indépendants. On passe d’un système assurantiel à un système plus social » regrette Michel Forissier. Quant au droit au chômage pour les démissionnaires, il met là aussi en garde : « Combien de personnes en bénéficieront ? Il n’y a pas de lisibilité sur le coût de la mesure ».
Ce texte est en effet l’occasion de mettre en œuvre cette promesse d’Emmanuel Macron. Devant le coût de la réforme, on sait déjà depuis quelques mois que ce droit est encadré. Il faut démissionner avec un projet de reconversion, de création ou de reprise d'entreprise. Il faudra en principe avoir travaillé cinq ans.
En parallèle, le contrôle des chômeurs est renforcé. L'offre raisonnable d'emploi, qu'un chômeur ne peut refuser qu'une fois, sera définie en concertation entre le demandeur d'emploi et son conseiller. Un dispositif anti-contrats court est prévu également. Si les branches n’arrivent pas à négocier ce mécanisme, le gouvernement se donne la possibilité d'instaurer par décret un bonus-malus sur les cotisations patronales.
Deuxième volet de la réforme du travail
Pour le gouvernement, ce projet de loi constitue le deuxième volet de la réforme du travail, après les ordonnances. Le texte, tel que voté par les députés, prévoit notamment d’alimenter le Compte personnel de formation (CPF) non plus en heures mais en euros. Le gouvernement a annoncé 500 euros par an (800 pour les salariés non qualifiés), dans la limite de 5.000 euros (8.000 pour les non qualifiés). La sénatrice du groupe centriste, Catherine Fournier, également rapporteure du texte, a dit, lors de l’audition de la ministre Muriel Pénicaud, « craindre que la monétisation se traduise par une perte de droits ».
Côté apprentissage, la limite d’âge est portée de 25 ans à « 29 ans révolus ». Pour les apprentis mineurs, le temps de travail maximum est porté de 35 à 40 heures par semaine pour certaines activités. Et dans certaines branches, la durée de travail quotidienne peut être de 10 heures, au lieu de 8 heures. Pour plus de détails sur le projet de loi, lire notre article sur le sujet.