Après le départ de Hulot, l’exécutif affaibli, l’opposition en embuscade
Affaibli par la démission fracassante de Nicolas Hulot, dont le remplacement s'annonce épineux, et plus qu'hésitant sur la mise en place de l...
Par Stéphanie LEROUGE
Temps de lecture :
4 min
Publié le
Mis à jour le
Affaibli par la démission fracassante de Nicolas Hulot, dont le remplacement s'annonce épineux, et plus qu'hésitant sur la mise en place de l'impôt à la source, l'exécutif doit affronter une opposition revigorée, qui entend bien profiter de ces atermoiements.
Interrogé samedi sur France Inter, le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin a admis que "l'arrêt" du prélèvement à la source n'était pas exclu, évoquant les potentiels effets "psychologiques" de la réforme censée entrer en vigueur début 2019.
M. Macron, au plus bas dans les sondages, a jeté le doute cette semaine, déclarant avoir "besoin d'une série de réponses très précises" avant sa mise en place, une attitude peu habituelle pour un exécutif décidé à avancer au pas de charge.
Dans ce contexte déjà alourdi durant l'été par l'affaire Benalla, le remplacement de M. Hulot, qui doit intervenir avant mardi soir, s'annonce délicat et les pronostics vont bon train. L'ampleur du remaniement reste inconnu au moment où la ministre de la Culture François Nyssen est citée dans une affaire de travaux controversés chez Actes Sud lorsqu'elle dirigeait la maison d'édition avant d'être nommée ministre en mai 2017.
Parmi les successeurs potentiels, Daniel Cohn-Bendit, dont le nom revient le plus souvent. Samedi, il a répété sur Europe1 comme à d'autres médias, avoir été approché par le patron de La République en marche Christophe Castaner et par le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux.
"Dans la discussion avec eux, je leur ai dit que ce n'était pas ma tasse de thé d'être ministre et en même temps j'ai dit: +si Emmanuel Macron veut discuter de cela évidemment j'irai discuter+. Et donc théoriquement ce week-end je dois le voir pour voir ce qu'il pense lui, parce que pour l'instant lui il n'a rien proposé", a-t-il affirmé.
Mais selon un député LREM, "le fait que ce soit dans la presse décrédibilise l'option" Cohn-Bendit au gouvernement, même si ce député pense que ce serait "un bon choix".
- "Big Bang" -
Aucun des écologistes pressentis "n'ira dans ce gouvernement s'il n'y a pas (un) big-bang" dans l'organisation des pouvoirs publics, a assuré un autre candidat potentiel, Pascal Canfin, directeur général de l'ONG WWF.
Daniel Cohn-Bendit en mai 2018 à Cannes lors de la présentation de La Traversée, documentaire coréalisé avec Romain Goupil
AFP/Archives
Un proche de François de Rugy a lui souligné samedi auprès de l'AFP la légitimité d'une nomination du président de l'Assemblée, "quatrième personnage de l’État", "engagé pour l'écologie depuis 25 ans".
D'autres noms circulent comme celui de la députée de la majorité Barbara Pompili ou du secrétaire d’État à la Transition écologique Sébastien Lecornu.
- "Cache-misère" -
En attendant, l'animateur Stéphane Bern y est allé lui aussi de son coup de canif dans l'édifice Macron : il a menacé vendredi de quitter la mission sur le patrimoine que lui a confiée M. Macron s'il estimait finalement n'être qu'un "cache-misère" ou un "pantin", mettant directement en cause le ministre de la Cohésion des territoires Jacques Mézard.
"Je crois qu'il y a une incompréhension car nous poursuivons le même objectif", lui a répondu samedi sur BFM M. Mézard.
François Hollande le 13 août 2018 au stade Vélodrome à Marseille
AFP/Archives
Ces vents mauvais font bien entendu les affaires de l'opposition. "Hulot qui l’abandonne, Bern qui menace de le faire, Hollande qui le fustige, les sondages qui confirment la dégringolade de sa popularité. Macron songerait à faire appel à Cohn-Bendit. Désespoir? inconscience? incompétence? Le temps de Jupiter est bien révolu mais pas son humour!", a ironisé sur Twitter la députée LR Valérie Boyer.
En déplacement vendredi à Cherbourg au côté de son ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve, François Hollande a multiplié sans le nommer les piques à l'encontre d'Emmanuel Macron, ironisant sur ceux touchés par "le narcissisme, une terrible maladie".
Il a aussi pointé l'indécision du chef de l’État sur le prélèvement à la source. A un moment, "il faut sauter le pas, il faut le faire", a dit l'ancien président.
La France insoumise a de son côté réaffirmé cette semaine son vœu de faire des élections européennes un "référendum anti-Macron". Selon elle, "la décomposition du régime Macron est commencée".
La réunion à l’Elysée n’a pas abouti sur un accord. Mais avec des lignes rouges qui peuvent paraître très éloignées, la sortie de crise semble encore lointaine. Un début de rapprochement émerge cependant sur la méthode, autour du non-recours au 49.3.
Depuis la chute de Bachar Al-Assad, certaines déclarations de responsables politiques conciliant avec le régime dictatorial refont surface. En octobre 2015 par exemple dans l’émission « Preuves par 3 » sur Public Sénat, Jean-Luc Mélenchon estimait que les bombardements russes et syriens faisaient partie d’une guerre nécessaire contre les rebelles.
Reçus par Emmanuel Macron ce mardi, avec d’autres formations politiques à l’exception de LFI et du RN, socialistes et écologistes se sont engagés, s’ils accèdent au pouvoir, à ne pas utiliser le 49.3 à condition que les oppositions renoncent à la motion de censure. « Ça a été repris par Horizons, par le MoDem », a assuré Olivier Faure, le Premier secrétaire du PS.
À la sortie d’une réunion avec les partis, hors LFI ou RN, le patron des députés de la Droite républicaine insiste à nouveau sur la nécessité d’aboutir à un accord de non-censure pour qu’un gouvernement survive. Il maintient sa ligne rouge : la droite ne veut ni ministres issus de la France insoumise, ni application du programme du Nouveau Front populaire.