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Après le scrutin sur la motion de censure, quel avenir pour le Nouveau Front Populaire ?

Jeudi, à l’Assemblée nationale, le Parti socialiste s’est démarqué du reste des formations politiques qui composent le Nouveau Front Populaire en choisissant de ne pas voter la censure du gouvernement Bayrou, provoquant l’ire des Insoumis qui semblent les exclure de fait du NFP.
Simon Barbarit

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Emmanuel Macron en rêvait lorsqu’il a dissous l’Assemblée nationale l’été dernier, François Bayrou serait-il en passe de fracturer l’ancienne Nupes, renommée NFP (Nouveau Front Populaire) après les législatives ?

S’il est un peu tôt pour répondre à cette question, le Premier ministre est néanmoins parvenu à décoller les socialistes du reste de la gauche lors du vote de la première motion de censure à l’encontre de son gouvernement. Certes, le chef du gouvernement n’a pas eu à sauver sa peau puis qu’il n’avait aucune chance d’être renversé, le RN ayant annoncé qu’il ne voterait pas la censure, il a néanmoins enfoncé un coin dans l’union de la gauche.

« Les Insoumis sont dans une logique de menace »

« Le PS fracture le NFP. Mais il capitule seul. Les trois autres groupes votent la censure. Nous continuons le combat », a tancé Jean-Luc Mélenchon sur X quelques minutes après le rejet de la motion déposée par LFI. Seuls 131 élus de gauche dont 8 socialistes l’ont voté. 288 étaient nécessaires pour qu’elle soit adoptée.

« Les Insoumis sont dans une logique de menace. Ils veulent nous tenir en laisse. Ça doit nous faire ni chaud ni froid. On peut imaginer Jean-Luc Mélenchon dire : le NFP, c’est moi ! Est-ce qu’on doit céder à ce type de chantage ? la réponse est non », avait répondu Patrick Kanner jeudi, assurant que le Nouveau Front Populaire « n’était pas fracturé » par ce vote.

Jean-Luc Mélenchon avait alors estimé sur le même réseau social que les députés qui ne voteraient pas la censure sortaient « de l’accord du NFP ». « Donc on met des options sur leur circonscription », avait-il fait savoir.

Le virage réformiste du Premier secrétaire PS, Olivier Faure n’a toutefois pas été pris sans quelques difficultés en interne. La décision finale a été tranchée, au dernier moment, au sein d’un Bureau national animé, où en sont sortis 53 votes contre la censure, 10 votes pour, et 2 abstentions. « Les dirigeants du Parti socialiste gardent en tête que le macronisme va disparaître à terme, laissant un potentiel d’électeurs socio-démocrates qui ne veulent pas de LFI », analyse Luc Rouban, directeur de recherches au CNRS.

« Continuer de négocier avec le gouvernement pour obtenir des gains »

« Notre vocation n’est pas toujours de nous limiter à prendre date en attendant la prochaine élection, elle est d’arracher, jour après jour, toutes les victoires possibles », a défendu, jeudi, à la tribune, le Premier secrétaire du PS, Olivier Faure. « Des victoires » rappelées noir sur blanc par François Bayrou lui-même dans un courrier adressé aux deux présidents des groupes PS de l’Assemblée nationale et du Sénat. Dans ce courrier adressé à Boris Vallaud et Patrick Kanner, le Premier ministre avait confirmé que la réforme des retraites ferait l’objet de trois mois de concertation avec les syndicats. « Si les partenaires sociaux ne parviennent pas à un accord global, nous présenterons néanmoins, les avancées issues des travaux des partenaires sociaux, sous réserve d’un accord politique et d’un équilibre financier global maintenu, nous présenterons sur cette base un nouveau projet de loi. Ainsi, l’impératif de réforme pourra être satisfait dans une démarche de justice », promet-il

« Il est vrai que si nous étions au pouvoir, le budget ne serrait pas celui-ci et la réforme des retraites serait déjà abrogée. La position du PS, de Place Publique, des radicaux de gauche, des écologistes et des communistes, c’est qu’il faut continuer de négocier avec le gouvernement pour obtenir des gains. C’est une différence stratégique avec les Insoumis qui ne veulent négocier sur rien, préférant miser sur l’accession au pouvoir de Jean-Luc Mélenchon », estime le sénateur socialiste, Rachid Temal.

Il est vrai que la cheffe de fil des Ecologistes, Marine Tondelier, et Fabien Roussel ont  indiqué vouloir continuer les discussions avec le gouvernement afin « d’arracher des victoires sociales, écologiques et démocratiques », selon les termes de Fabien Roussel.

A ce stade, le débat au sein de la gauche se situe autour les avancées que les socialistes se félicitent d’avoir arrachées. « Il y a une divergence sur le terme d’avancées. On pourrait parler de moindre recul. Et encore, attendons de voir ce qu’il va sortir du budget », tempère le président du groupe écologiste du Sénat, Guillaume Gontard. L’élu de l’Isère ne digère pas les derniers coups de rabots de la partie dépenses du budget, actuellement en examen à la chambre haute, notamment sur la mission des sports ou sur l’aide publique au développement. « On continue sur un budget d’austérité comme si rien ne s’était passé. Sauf que le gouvernement est encore plus à droite, avec l’arrivée de Gérald Darmanin à la Justice, par exemple », poursuit-il.

« Il y aurait une fracture si le PS décidait de s’asseoir sur le programme commun »

Sur X, Manuel Bompard a qualifié de « piège grossier », l’engagement du Premier ministre sur la réforme des retraites. « Le Medef dispose d’un droit de veto qui empêchera que le retour à 62 ans soit présenté aux parlementaires. Et si les parlementaires souhaitent amender un texte en ce sens, « leurs amendements seront irrecevables car ils créeront une charge financière (article 40) », expose le coordinateur national de LFI. « Lorsque nous avions été reçus par François Bayrou, il nous avait dit qu’il était contre l’abrogation », appuie Guillaume Gontard.

« LFI part du principe que les syndicats ne vont pas s’entendre. A la différence d’eux, nous, nous croyons à la démocratie sociale. Et s’il n’y a pas d’accord entre les partenaires sociaux. Nous aurons l’occasion de débattre d’un texte au Parlement », veut croire Rachid Temal.

Le chef de file des sénateurs écolos ne considère pas que le NFP est en train de se fracturer. « Il y aurait une fracture si le PS décidait de s’asseoir sur le programme commun, de renoncer à revenir sur la réforme des retraites. Si demain nous avions de nouvelles élections. Je ne me fais pas de soucis. On se mettra tous d’accord en responsabilité, puisqu’on partage l’essentiel et que les Français le demandent. Cet été, après la dissolution, on a prouvé qu’on pouvait rapidement s’unir ».

Jean-Luc Mélenchon répondra à cette question dimanche à midi sur RTL dans le « Grand Jury », une émission en partenariat avec Public Sénat et le Figaro.

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