Depuis mardi les sénateurs ont entamé l’examen du texte asile et immigration, au moment même où Emmanuel Macron et Angela Merkel à Berlin, plaidaient pour une réponse européenne coordonnée à la crise migratoire. Les sénateurs LR ont proposé un contre projet au texte de Gérard Collomb, adoptant une ligne plus dure.
« Déjà c’était une très mauvaise loi, et là elle est encore plus mauvaise, parce que c’est un durcissement qui se rapproche des thèses de Laurent Wauquiez et de l’extrême droite » argue Marie-Noëlle Lienemann, vice-présidente du Sénat, et sénatrice PS de Paris.
« Je trouve ça aussi très dangereux. Dangereux, et même parfois pas très humain, quand je pense à la manière dont sont traités les mineurs dans ce texte » explique-t-elle, faisant référence à la possibilité de procéder à la rétention de mineurs isolés et accompagnés, qui est autorisée dans le projet de loi.
« La réalité, c‘est qu’on habitue les gens, au motif qu’il y aurait trop d’immigrations et de réfugiés qui viendraient nous submerger, à l’inhumain » déplore-t-elle.
61 % des Français estiment que la politique française est trop laxiste en matière de politique migratoire. « Mais on ne cesse de leur dire ça, on ne cesse de faire une loi pour dire qu’elle n’est pas encore assez forte. On ferait mieux de s’occuper d’avoir des lois qui fonctionnent et de donner les moyens » réplique la sénatrice.
« Un flottement chez une partie des sénateurs de droite »
Marie-Noëlle Lienemann a présidé la séance de la nuit de jeudi à vendredi sur le texte asile et immigration au Sénat. Les incidents de séance se sont multipliés, provoqués par l‘absence d’un grand nombre de sénateurs de droite, pourtant majoritaires. « C’est vrai qu’on a une grande absence de nos collègues républicains. Moi je pense que ce n’était pas simplement une espèce de mauvaise organisation de ce groupe, qui, quand même, est bien huilé dans les traditions parlementaires » explique la sénatrice, qui possède son propre avis : « Je crois qu’il y a un flottement chez une partie des sénateurs de droite, qui, même sous Nicolas Sarkozy, avaient refusé des décisions, qui aujourd’hui, sont votées par leur camp ; qui ne sont pas très à l’aise et qui voient ce qu’il se passe, qu’on est pris par cette espèce de dérive, au lieu d’être solides sur nos bases » commente-t-elle, avant d’ajouter : « Il y a aussi le fait que ce texte est d’abord le texte du gouvernement et de Gérard Collomb ».
Ce dernier était présent lors de la dernière séance. « Quand vous entendez le ministre de l’Intérieur vous dire : il y a des enfants asociaux, eh bien on sait bien qu’un enfant qui a traversé l’Europe, il est pris dans un traumatisme (…) Un enfant n’est pas associable par nature » s’indigne la socialiste qui estime qu’une réponse de « respect de l’enfant » doit lui être apporté.
« Tout ça, fait qu’une partie des sénateurs, même du camp républicain, n’est pas très à l’aise » analyse-t-elle.