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Assassinat du frère d’Amine Kessaci : le militant écologiste engagé contre le narcotrafic était « sous protection policière et exfiltré de Marseille depuis un mois »
Par Simon Barbarit
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« J’ai eu Amine au téléphone ce matin, il est complètement détruit. C’est son second frère qui est victime du narcotrafic et il a l’impression d’en être responsable ». Le sénateur écologiste de Marseille, Guy Benarroche est un proche d’Amine Kessaci. Après la mort de son frère aîné, Brahim, en 2020, le jeune garçon avait fait de la lutte contre le narcotrafic, le cœur de son engagement. Avec son association « « Conscience » », il est l’un des porte-voix des familles endeuillées de cette ville régulièrement secouée par des narchomicides. Amine Kessaci a aussi porté son combat sur le terrain politique et était candidat aux dernières élections européennes et législatives sous la bannière écologiste.
Jeudi 13 novembre 2025, c’est le petit frère d’Amine Kessaci, Mehdi, qui a été tué par balles. Le procureur Nicolas Bessone n’exclut pas l’hypothèse d’un assassinat d’avertissement visant à atteindre Amine Kessaci.
« Si tel devait être le cas, on aurait franchi une étape supplémentaire. Ça rappelle un certain nombre de périodes terribles connues dans notre pays, où vous allez assassiner des gens, simplement parce qu’ils sont membres d’une famille avec laquelle vous avez des problèmes », a-t-il estimé sur franceinfo.
« Il avait reçu des menaces depuis la sortie de son livre »
« Amine était sous protection policière et avait été exfiltré de Marseille depuis un mois. Il avait reçu des menaces depuis la sortie de son livre « Marseille, essuie tes larmes » (Ed. Le Bruit du Monde 2 octobre 2025). Cette protection s’inscrit aussi dans le contexte du procès des assassins de son frère aîné qui se déroulera dans les prochains mois. Amine et sa mère, qui est présidente de l’association Conscience, avaient prévu de rappeler que la justice ne devait pas uniquement sanctionner les petites mains, mais aussi le haut du spectre. C’est d’ailleurs ce que nous avons dit au cours des travaux de notre commission d’enquête sur le narcotrafic. Nous nous étions d’ailleurs déplacés à Marseille notamment pour rencontrer des membres de l’association « Conscience » », explique Guy Benarroche.
« On est en train de connaître un changement de nature du crime »
Etienne Blanc, sénateur LR qui était rapporteur de la commission d’enquête, ne cache pas son inquiétude sur les implications de cet assassinat qui s’est déroulé en plein jour, alors que Mehdi venait de déposer en voiture sa mère à la pharmacie « Soit c’est une erreur sur la personne et les assassins ont confondu la victime avec son frère. Soit, ils s’en sont pris à un membre de la famille d’une personne qui gêne le narcotrafic pour le terroriser. Et à ma connaissance, c’est inédit en France. C’est ce qui se passe dans les narco-Etats. C’est très révélateur d’un fonctionnement des réseaux mafieux, c’est d’une gravité extrême. On est en train de connaître un changement de nature du crime et ça prend des proportions non maîtrisées. On remplit de plus en plus les critères d’un narco Etat, soit un Etat dans lequel les trafiquants font régner la terreur ».
« Je ne dirais pas que la France est devenue un narco-Etat, mais qu’on a passé une étape, car jusqu’à présent, les victimes sont toujours liées de près ou de loin au trafic », complète Guy Benarroche.
Ce crime intervient moins d’un an après l’adoption de la proposition de loi transpartisane du Sénat sur la lutte contre le narcotrafic. « Je pense qu’aujourd’hui les moyens sont mis. Il y a aussi la volonté du garde des Sceaux de regrouper les plus gros narcotrafiquants dans des prisons de haute sécurité. Mais nous avons affaire à une hydre », constate Etienne Blanc.
Le combat d’Amine Kessaci contre le narcotrafic est le sujet du documentaire « Marseille, des larmes au combat », Anaïs Merad, à revoir sur Public Sénat. voir ci-dessous.