Assurance chômage : « Tous les syndicats vont faire un recours devant le Conseil d’Etat », annonce Philippe Martinez
Invité de la matinale de Public Sénat, Philippe Martinez a bien fait comprendre que les syndicats ne s’avouaient pas vaincus sur la réforme de l’assurance chômage et a assuré que des recours seraient déposés au Conseil d’Etat. Il est aussi revenu plus généralement sur la situation économique et sociale du pays, notamment concernant les prix de l’énergie.
« Il était temps », lâche Philippe Martinez en réponse au « bouclier tarifaire » détaillé par Jean Castex hier soir. Le Premier ministre a en effet annoncé que les prix du gaz seraient bloqués de novembre à avril… après leur énième augmentation de 12,6 % au 1er octobre. « L’énergie va continuer à augmenter avec l’électricité. Il y a d’autres mesures à prendre, l’Etat a gagné beaucoup d’argent avec la TVA, il faut la réduire sur les produits de première nécessité. »
Coup de pouce du SMIC : « Ce n’est plus un coup de pouce qu’il faut mais un coup de pied ! »
Insuffisant, donc, pour le secrétaire général de la CGT, qui pointe un problème plus structurel dans la production d’énergie française : « Engie a réalisé 3 milliards de bénéfices sur les 6 premiers mois de l’année. Quand reviendra-t-on à un pôle public de l’énergie pour qu’Engie redevienne à 100 % la propriété de l’Etat et pouvoir réguler les prix de l’énergie ? » Pour Philippe Martinez, le problème est bien plus général : « Sur deux ans la hausse doit avoisiner 70 %, il y a une vraie réflexion à avoir sur ces questions avec une entreprise unique. Avec de nombreux opérateurs tout le monde devait être gagnant, vous voyez le résultat. »
Le secrétaire général de la CGT l’affirme, il ne faut pas réduire le problème au pouvoir d’achat : « Il ne faut pas parler uniquement de pouvoir d’achat, il faut parler de salaires. La seule mesure pérenne, ce sont les salaires. La notion de pouvoir d’achat produit des mesures qui suppriment des cotisations sociales, donc on vous pique d’une main ce que l’on vous donne de l’autre. » Par conséquent, « la seule revalorisation » qu’attend la CGT, ce n’est pas celle du chèque énergie, mais bien celle du SMIC : « Il augmente mécaniquement aujourd’hui, mais c’est insuffisant, il ne faut plus un coup de pouce, mais un coup de pied et aller progressivement vers 2000 euros par mois. »
Réformes sociales : « J’ai l’impression qu’ils n’habitent pas dans le même pays que moi »
De même, pour ne pas oublier les inactifs et notamment les retraités, Philippe Martinez demande qu’aucune pension de retraite ne soit inférieure au SMIC. Pour lui, la proposition d’Édouard Philippe « d’allonger la durée de vie active en repoussant l’âge de départ à la retraite à 65,66 ou 67 ans » est « scandaleuse » : « Que les hommes et les femmes politiques veuillent travailler jusqu’à 80 ans, ça les regarde. Les salariés des Ehpad vont-ils finir par être aussi âgés que les résidents ? J’ai l’impression qu’il n’habite pas dans le même pays que moi. » Le secrétaire général de la CGT rappelle qu’il existe un autre levier pour renflouer les caisses de retraite : « Il faut revoir le système d’exonération de cotisation et rouvrir le robinet. Les salaires sont bloqués vers le bas en France parce que les entreprises ne payent aucune cotisation jusqu’à 1,6 SMIC. »
Si la réforme des retraites ne semble plus véritablement à l’ordre du jour, en tout cas dans ce quinquennat, le gouvernement reste ferme sur celle de l’assurance chômage, qui rentre en vigueur aujourd’hui. Mais les syndicats continuent de présenter un front uni contre ce projet « injuste et scandaleux » : « Le gouvernement se dit ouvert à la discussion, mais quand toutes les organisations syndicales de ce pays sont contre une réforme – c’est assez rare pour être souligné – il ne l’abandonne pas. » Ainsi les syndicats n’entendent pas s’avouer vaincus : « Tous les syndicats vont faire un recours devant le Conseil d’Etat. Le décret a été publié hier et nous avons commencé à travailler. Nous avons 8 jours pour le déposer. »
Rappelons qu’en juin dernier, la plus haute juridiction administrative du pays avait suspendu l’entrée en vigueur des nouvelles règles de calcul des allocations, en raison des « incertitudes » liées à la fragilité de la reprise économique. Depuis, la reprise semble confirmée, le Conseil d’Etat validera-t-il donc cette fois la réforme du gouvernement ? Les recours seront en tout cas nombreux.
Petite révolution au Palais de Marie de Médicis, la majorité sénatoriale LR, jusqu’ici dans l’opposition, se retrouve dans la majorité de Michel Barnier. « Le poids politique des sénateurs est évidemment renforcé », souligne le constitutionnaliste Benjamin Morel. Mais il ne faut pas oublier que « c’est toujours l’Assemblée qui a le dernier mot », rappelle le politologue Olivier Rouquan. De quoi tempérer l’idée d’un Sénat qui gagne en influence.
Après 12 ans dans l’opposition, Les Républicains se retrouvent de manière inattendue au pouvoir au sein de ce qui devrait ressembler à une coalition. Aux journées parlementaires du parti à Annecy, les sénateurs ont prôné un travail législatif « constructif » avec leurs nouveaux alliés macronistes et philippistes. « On était en mort clinique. Et on se réveille du coma », se réjouit un sénateur.
Ce vendredi, l’essayiste et enseignant à Sciences Po David Djaïz était l’invité de la matinale de Public Sénat. Il est revenu sur la nomination de Michel Barnier à Matignon, le rôle du Parti socialiste dans la séquence actuelle, ainsi que sur les solutions qu’il voit pour sortir de la crise politique.
Les sénateurs et députés LR, rassemblés à Annecy pour leurs journées parlementaires ont reçu la visite d’un des leurs. Le Premier ministre, Michel Barnier est venu s’entretenir « chaleureusement » avec les élus de sa famille politique leur assurant que leur pacte législatif serait sa base de travail.