Paris: Aurelien Rousseau, Directeur de Cabinet Elisabeth Borne

Aurélien Rousseau au ministère de la Santé : un profil de haut fonctionnaire qui laisse sceptique au Sénat

L’information est tombée ce 20 juillet dans l’après-midi, après plusieurs jours d’attente : Aurélien Rousseau, ancien directeur de cabinet d’Elisabeth Borne à Matignon, remplace François Braun au ministère de la Santé. Haut-fonctionnaire, ancien de la gauche sociale-démocrate, son profil de technocrate n’enchante pas les sénateurs.
Mathilde Nutarelli

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Cela fait deux jours que les annonces du remaniement sont attendues. Elles ont commencé à tomber dans l’après-midi du 20 juillet. Et l’un des premiers noms évoqués n’était pas le plus évident : annoncé par BFMTV puis confirmé par Le Monde, Aurélien Rousseau est nommé ministre de la Santé.

« Beaucoup d’acteurs attendent beaucoup »

Cet énarque, issu de la gauche, avait démissionné de son poste de directeur de cabinet d’Elisabeth Borne au début du mois de juillet. Selon les rumeurs, il était pressenti pour devenir directeur général de la Caisse des dépôts, mais n’avait jamais confirmé l’information.

Il succède donc à François Braun, à la tête d’un ministère où les dossiers brûlants sont nombreux. « Beaucoup d’acteurs attendent beaucoup », résume Bernard Jomier, sénateur socialiste de Paris. En effet, ces dernières années, les dossiers du ministre de la Santé semblent s’empiler : grandes difficultés de l’hôpital public, lutte contre les déserts médicaux, pénuries de médicaments, … « Il y a tellement de problèmes et la tâche est immense », abonde Catherine Deroche, présidente LR de la commission des affaires sociales, « il faut remettre un peu d’humanité et de lien entre les soignants et les soignés ».

Une mission impossible ? Le bilan de  ministre sortant est mitigé. « On a eu un ministre pendant un an avec qui j’adhérais sur beaucoup de discours, mais ça n’enclenchait pas et ne débouchait pas sur des solutions très concrètes », regrette le Bernard Jomier, « ce qui a pu lui être fatal, c’est une absence de résultats concrets, de continuer à dire que cela ne va pas si mal ». La présidente de commission, elle, juge moins sévèrement l’ancien locataire de la rue de Grenelle : « François Braun était discret, j’ai vraiment apprécié travailler avec lui, c’est humainement quelqu’un de très bien. Il connaissait bien ses sujets et était assez modéré, mais on a sûrement jugé qu’il fallait quelqu’un qui imprime plus ».

« Le poids de la haute administration est tellement fort, qu’il est difficile pour un ministre de ‘secouer le cocotier’ »

Aurélien Rousseau est énarque. Membre du Conseil d’Etat, il devient directeur général de l’Agence régionale de santé d’Île-de-France en 2018, fonction qu’il quitte en 2021, après avoir géré la pandémie de covid-19 et l’incendie de Notre-Dame de Paris. C’est un poste où le haut-fonctionnaire avait laissé une bonne impression.  « Il a eu une gestion partenariale du covid », se souvient Bernard Jomier, sénateur socialiste de Paris, « il associait les différents acteurs ». « C’est plutôt de bon augure, parce que la gestion de la santé menée jusque-là par l’Etat, qui la traite comme un sujet uniquement régalien, est un vrai problème, parce qu’il n’en a ni les moyens ni les capacités », analyse-t-il.

S’il n’y a pas de levée de bouclier contre sa nomination, son profil de haut fonctionnaire ne séduit pas les élus du Palais du Luxembourg. Pour Catherine Deroche, « ce n’est pas le profil que j’attendais, c’est un administrateur, un profil très technocratique, ce que n’était pas François Braun. Je me méfie du poids de l’administration dans le secteur de la santé : le poids de la haute administration est tellement fort, il y a tellement de lourdeur, de pesanteur, qu’il est difficile pour un ministre de ‘secouer le cocotier’. Cela risque de l’être encore plus ». La sénatrice du Maine-et-Loire est d’autant plus inquiète que la femme du nouveau ministre est la numéro deux de la Caisse nationale d’Assurance Maladie.

Du côté gauche de l’hémicycle, le profil d’énarque d’Aurélien Rousseau est un peu mieux accueilli, mais sans grand enthousiasme. Bernard Jomier explique : « Le ministère de la Santé peut être dirigé par quelqu’un qui n’est pas médecin, tant qu’il a la capacité à transformer le système de santé. Là, on est sur un profil de haut fonctionnaire. C’est une marque du macronisme et c’est problématique ».

Aurélien Rousseau est issu de la gauche sociale-démocrate

« Sur le plan humain, il est éminemment respectable, je le félicite pour sa nomination et lui souhaite du succès ! » confie à publicsenat.fr Bernard Jomier, qui a connu Aurélien Rousseau lorsqu’il était directeur de cabinet adjoint de Bertand Delanoë à la mairie de Paris. En effet, le nouveau ministre de la Santé est issu de la gauche sociale-démocrate : il a été directeur adjoint de cabinet de Bertrand Delanoë, alors maire de Paris, directeur adjoint de cabinet de Manuel Valls, alors Premier ministre, puis de Bernard Cazeneuve.

Faut-il y voir un geste d’Emmanuel Macron vers sa gauche ? « François Braun n’était pas connu pour être de droite ! » ironise Bernard Jomier. Pour le sénateur, « il ne faut pas y voir de signal politique autre qu’il a la confiance du Président et de la Première ministre ». Pour Catherine Deroche, c’est Elisabeth Borne qui est derrière cette nomination. « Il faut bien qu’elle gagne quelques arbitrages ! » ironise-t-elle.

« Ce n’est pas parce qu’Aurélien Rousseau est nommé à la Santé que cela va changer l’orientation générale du gouvernement »

Pour autant, même si le profil du nouveau locataire de la rue de Grenelle varie un peu de l’ancien, les espoirs d’un changement radical sont minces au Palais du Luxembourg : « Je suis sceptique, mais j’ai l’optimisme de la raison », analyse Bernard Jomier, « parce que le cadre budgétaire sera extrêmement restrictif, et que ce n’est pas parce qu’Aurélien Rousseau est nommé à la Santé que cela va changer l’orientation générale du gouvernement qui mène des politiques de droite ». Catherine Deroche nuance : « On ne peut pas juger les gens a priori, il a d’autres connaissances du milieu de la santé, du milieu hospitalier et de la médecine de ville ». L’épreuve du feu du nouveau ministre arrivera à l’automne, avec le vote du budget de la sécurité sociale pour 2024.

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