Aux origines de l’élection du Président par les Français, un « coup de poker » anticonstitutionnel ?
Et si les Français n’avaient jamais eu à élire leur Président ? Certains s’en souviennent, l’élection au suffrage universel ne date pas de 1958, mais de 1962, après une modification de la Constitution votée par référendum. Mais cette procédure était-elle constitutionnelle ? Des archives jusqu’ici inédites prouvent que non, dans de Gaulle, « le monarque et le Parlement », un documentaire de Pierre Bonte-Joseph, pour Public Sénat en partenariat avec les Archives nationales.
Par Hugo Ruaud
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A l’automne 1962, une crise institutionnelle couve en France. Alors que le Général de Gaulle souhaite modifier, par référendum, le mode d’élection du Président de la République, il fait face à une opposition féroce des deux assemblées. Or, pour la première fois, un document conservé aux Archives nationales révèle que le Conseil constitutionnel avait averti le Président de la République que la procédure retenue « ne saurait être regardée comme constitutionnelle ». Retour sur un des épisodes les plus troubles de l’histoire de la Ve République.
David Bellamy et Sébastien Studer devant le premier volume des manuscrits des discours du général de Gaulle aux Archives nationales
L’attentat du Petit Clamart, un tournant décisif ?
22 août 1962, Charles de Gaulle échappe de peu à un attentat au Petit Clamart. Un tournant dans l’histoire de la Ve République, pour l’historien Jean-Noël Jeanneney : « Si de Gaulle avait été tué au Petit Clamart, il y aurait probablement eu un recul progressif de l’autorité du Président de la République, et toute la suite de l’histoire aurait été changée ». Au lendemain de l’attentat, de Gaulle propose aux Français que désormais, le Président de la République soit élu au suffrage universel direct, jusqu’ici il est élu de manière indirecte, sur le modèle des élections sénatoriales. Pour changer les règles, de Gaulle veut passer par la voie référendaire, alors que la constitution l’oblige à passer par le vote des assemblées. Pour ses opposants il viole la Constitution, pour de Gaulle il s’agit de demander au peuple souverain ce qu’il souhaite faire.
Louis Mermaz, ancien président (PS) de l'Assemblée nationale
« Il a violé la constitution » Louis Mermaz
Tout est alors entre les mains du Conseil constitutionnel. Officiellement, il n’a pas rendu d’avis. Mais en réalité, les archives nous prouvent le contraire, dans un avis officieux adressé au Président de la République : « Il constate que la procédure envisagée dans le cas présent n’est pas conforme aux dispositions dudit article. Dès lors, il considère que la procédure dont il s’agit ne saurait être regardée comme constitutionnelle et la consultation qui en est l’objet comme un référendum au sens de la constitution ».
« Les mots utilisés sont d’une clarté absolue » commente l’historien David Bellamy, « et il y a en plus une menace qui est exprimée : il considère que la procédure dont il s’agit pourrait ne pas permettre de valider les résultats du référendum » ajoute-t-il.
La volte-face du Conseil constitutionnel
Une preuve que le Général de Gaulle « a violé la constitution » pour l’ancien président de l’Assemblée nationale Louis Mermaz. Un acte grave donc, mais sans conséquence, puisque le 28 octobre 1962, les Français approuvent la proposition du Président de la République, à plus de 62 %. Gaston Monnerville tentera bien de saisir le Conseil constitutionnel, mais celui-ci se déclarera cette fois incompétent…
Emmanuel Macron a réuni mardi les responsables de plusieurs partis politiques à l’Élysée pour les consulter avant la nomination d’un nouveau Premier ministre pour remplacer Michel Barnier. Pour le député RN Thomas Ménagé, invité de la matinale de Public Sénat ce mercredi, cet échange marque « le retour de l’UMPS » sous la forme d’un « parti unique qui va du PS jusqu’à Laurent Wauquiez ».
La réunion à l’Elysée n’a pas abouti sur un accord. Mais avec des lignes rouges qui peuvent paraître très éloignées, la sortie de crise semble encore lointaine. Un début de rapprochement émerge cependant sur la méthode, autour du non-recours au 49.3.
Depuis la chute de Bachar Al-Assad, certaines déclarations de responsables politiques conciliant avec le régime dictatorial refont surface. En octobre 2015 par exemple dans l’émission « Preuves par 3 » sur Public Sénat, Jean-Luc Mélenchon estimait que les bombardements russes et syriens faisaient partie d’une guerre nécessaire contre les rebelles.
Reçus par Emmanuel Macron ce mardi, avec d’autres formations politiques à l’exception de LFI et du RN, socialistes et écologistes se sont engagés, s’ils accèdent au pouvoir, à ne pas utiliser le 49.3 à condition que les oppositions renoncent à la motion de censure. « Ça a été repris par Horizons, par le MoDem », a assuré Olivier Faure, le Premier secrétaire du PS.