Béatrice Huret, ex-sympathisante FN, devenue passeuse présumée par amour
Ex-sympathisante du Front national et veuve d'un mari policier, Béatrice Huret attend son procès pour "aide au séjour irrégulier...

Béatrice Huret, ex-sympathisante FN, devenue passeuse présumée par amour

Ex-sympathisante du Front national et veuve d'un mari policier, Béatrice Huret attend son procès pour "aide au séjour irrégulier...
Public Sénat

Par Zoé LEROY

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Ex-sympathisante du Front national et veuve d'un mari policier, Béatrice Huret attend son procès pour "aide au séjour irrégulier d'un étranger en France". Elle n'a "aucun regret" et qu'une explication: elle a aidé Mokhtar, un migrant de la "Jungle" de Calais, à passer en Angleterre, "par amour".

11 juin 2016, 04H00. Sur la plage de Dannes, dans le Pas-de-Calais, Béatrice Huret serre dans ses bras Mokhtar : après huit mois passés dans la +Jungle+, il s'apprête à embarquer avec deux autres réfugiés sur un petit bateau de plaisance pour rejoindre l'Angleterre.

Elle les a aidés à dénicher cette "coquille de noix" achetée 1.000 euros sur Leboncoin et à organiser le départ. "Si je ne l'avais pas fait, ils auraient trouvé quelqu'un d'autre pour le faire ! C'était leur but et je ne pouvais rien faire pour les en dissuader", assure-t-elle, attablée dans le salon de sa maison de campagne située à l'orée d'un bois à Wierre-Effroy (Pas-de-Calais).

Son histoire d'amour, qu'elle raconte dans un livre, "Calais mon amour", sorti en mai aux éditions Kero, commence en février 2015. L'ancienne aide-soignante, devenue formatrice pour adulte, découvre la "Jungle" de Calais, "par hasard", en prenant en stop un jeune réfugié soudanais qu'elle dépose à l'entrée du camp. "Cela a été le choc de voir tous ces gens patauger dans la gadoue...", se souvient cette femme originaire du département, longs cheveux noirs et yeux verts entourés de khôl.

Elle devient alors bénévole et c'est un an plus tard qu'elle croise le regard de Mokhtar pour la première fois. Il faisait partie des migrants iraniens qui s'étaient cousus la bouche pour protester contre le démantèlement de la partie sud de la "Jungle". "Mon anglais c'était juste +hello, thank you, goodbye+ alors je ne lui ai pas parlé tout de suite. Lui, s'est levé pour aller me chercher le thé, on ressentait quelqu'un de très doux, très calme et puis son regard... Ca a été le coup de foudre", raconte-t-elle, enchaînant les cigarettes.

- 'Jusqu'à 10 ans de prison' -

Deux mois passent, puis, un bénévole demande à Béatrice Huret d'héberger Mokhtar deux jours, en attendant "un plan" pour rejoindre l'Angleterre en camion. Elle accepte, le plan échoue et Mokhtar reste finalement un mois chez cette femme de 44 ans qui vit avec sa mère, 76 ans, et son fils Florian, 19 ans. "Notre histoire d'amour a commencé là, avec l'aide de +Google traduction+...".

Sa rencontre avec Mokhtar n'avait "rien d'une évidence" pour cette ancienne électrice du Front national qui a partagé la vie d'un policier de la PAF (Police aux frontières) pendant 20 ans.

Elle était alors aide-soignante dans une maison de retraite, travaillait de nuit, s'occupait "du petit", dormait un peu, se livrait aux tâches domestiques... "J'avais une vie basique et je votais FN, comme mon mari, sans vraiment me poser de questions", admet-elle.

Son nouveau compagnon, Mokhtar, 37 ans, ex-professeur de persan en Iran, vit maintenant à Sheffield en Angleterre où il a obtenu un permis de travailler. Un week-end sur deux, elle prend le ferry, puis roule jusqu'à chez lui. Son anglais, s'est amélioré: "Je comprends tout, mais j'ai toujours un peu de mal à le parler", sourit-elle.

Mais deux mois après le passage de Mokhtar en Angleterre, Béatrice Huret a été placée en garde à vue dans le commissariat de Coquelles, celui-là même où avait travaillé son défunt mari. "J'ai dit toute la vérité parce que pour moi, je n'avais rien fait d'illégal", affirme-t-elle.

Jugée le 27 juin au tribunal correctionnel de Boulogne-sur-Mer, pour "aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irrégulier d'un étranger en France en bande organisée", elle risque jusqu'à 10 ans de prison.

Partager cet article

Dans la même thématique

Elections legislatives, premier tour dans le gard.
4min

Politique

Municipales 2026 : la parité bouscule les petites communes

La parité s’impose désormais dans les communes de moins de 1 000 habitants. À partir des élections municipales de 2026, les listes devront respecter une stricte alternance femmes-hommes, et le panachage sera interdit. Une réforme qui, entre volonté d’égalité et réalités locales, divise fortement les élus.

Le

6min

Politique

Déploiement d’un service militaire volontaire ? « Le gouvernement s’engage dans cette voie-là », selon Hélène Conway-Mouret

Les propos du chef d’Etat-major des Armées, face au congrès des maires de France, ont fait réagir la classe politique, alors qu’il a appelé les édiles à « préparer leurs populations », à un possible conflit dans quelques années. Son discours a aussi réactivé l’idée d’un déploiement d’un nouveau service volontaire par Emmanuel Macron.

Le

Béatrice Huret, ex-sympathisante FN, devenue passeuse présumée par amour
6min

Politique

Budget de la Sécu : le Sénat supprime la hausse de la CSG sur le capital, fruit du compromis avec les députés PS

Comme annoncé, la majorité sénatoriale LR et centriste a supprimé la hausse de la CSG sur le capital votée par les députés, censée rapporter 2,66 milliards d’euros. « Vous défendez le capital, le profit, de manière entêtée », a dénoncé le sénateur PS, Yan Chantrel. La rapporteure, la centriste Elisabeth Doineau, a voulu en rester aux « mesures que la majorité sénatoriale avait défendues en juillet auprès de François Bayrou ».

Le