Depuis l’aube, 154 mouvements de mobilisation ont été identifiés, dont une quinzaine de blocages ou blocages filtrants, dans le sillage de l’appel à « tout bloquer » né sur les réseaux sociaux depuis la fin de l’été.
A 9h30, la gendarmerie nationale a recensé quelque 4 000 manifestants, quand deux heures plus tôt, elle en dénombrait un millier. Bruno Retailleau rappelait, hier midi, les estimations des services de renseignement portant à 100 000 le nombre de personnes attendues. Ce matin, depuis Rungis, le ministre de l’Intérieur a confirmé le dispositif des forces de l’ordre considérable annoncé, comprenant 80 000 gendarmes et policiers, ainsi qu’une trentaine d’hélicoptères et des drones.
Des tentatives de blocages à Paris et dans l’Ouest de la France
C’est dans l’Ouest qu’ont été observées les premières mobilisations au petit matin. Le viaduc de Calix, au nord de Caen, a été bloqué par des objets en flamme, dans une tentative de paralyser le périphérique. La circulation y a été interdite par le préfet du Calvados. A Nantes, un barrage est en cours à l’aéroport, et également au niveau du viaduc de Cheviré. Dans la ville de Bordeaux, des tentatives de blocage sur des dépôts du réseau de tramways ont été stoppées par les forces de police et de gendarmerie. Aux environs de Poitiers, l’A10 a été coupée dans les deux sens, tandis que des manifestants ont entravé la circulation une petite heure aux abords d’un rond-point dans le quartier de Jolimont. Dans la zone industrielle du Havre, près du port, barrières et banderoles ont été dressées boulevard Churchill pour entraver l’axe. A Rennes aussi, plusieurs manifestations à proximité des accès routiers ont pu être observées, la rocade est interrompue depuis 7h30.
Dans la capitale, 6 000 forces de l’ordre quadrillent le terrain où plusieurs actions ont été constatées. Dans le 18e arrondissement, un dépôt de bus a été bloqué par une centaine de jeunes militants vers 6h15, avant que ceux-ci soient dispersés à coups de gaz lacrymogène. Une quinzaine de minutes plus tard, des manifestants ont été interpellés aux alentours de la porte de Bagnolet, où les pompiers de Paris ont dû intervenir pour éteindre des feux de barricade, même chose dans le secteur de porte de Montreuil. Autour de 7h, c’est le périphérique parisien à hauteur de la porte de Clignancourt qui a été bloqué pendant un temps, par une barricade érigée à l’aide de blocs de béton, avant que les manifestants ne se séparent avant l’arrivée des forces de sécurité intérieure.
Les lycées parisiens sont aussi le théâtre de manifestations. Des établissements du 5e arrondissement, Henri-IV et Lavoisier, et le lycée Voltaire dans le 11e, ont subi des blocages ou tentatives de blocages. Dans le 20e, le lycée Hélène Boucher a vu se dresser des barricades, et des élèves et des forces de l’ordre s’affronter, avec des jets de projectiles, et des poubelles et vélos calcinés. D’autres lycées et aussi des universités sont mobilisés, notamment à Rennes, Montpellier, Grenoble, Mulhouse et Nice.
Les métropoles de Lille, de Marseille et de Lyon n’échappent pas aux mobilisations. Les forces de l’ordre interviennent notamment au niveau du périphérique lyonnais et dans la ville, où se mobilisent plusieurs groupes importants de manifestants. Dans la cité phocéenne, l’A50 a été bloquée.
Des lignes de transports perturbés, circulation interrompue à Toulouse
Conformément à ce qui avait été anticipé, les transports en commun rencontrent des perturbations. Si les métros et bus parisiens circulent presque sans difficulté, les lignes des Transilien, des RER et des Intercités sont parmi les plus touchées. A Toulouse, un incendie de câble vers 6h a conduit à l’interruption de la circulation entre Auch et la ville rose, qui ne devrait reprendre que demain matin.
Rien à signaler, pour l’heure, du côté des aéroports parisiens, mais ceux du Sud-Est pourraient connaître des blocages dans la suite de la journée, selon des informations de l’aviation civile.
Cellule interministérielle de crise : « Nous ne céderons rien »
A l’initiative du ministre de l’Intérieur, une cellule interministérielle de crise s’est tenue place Beauvau ce matin, réunissant les différentes forces de sécurité intérieure, des renseignements généraux et une douzaine de ministres.
Si la nuit a été plutôt calme, « la journée a commencé tôt » a entamé Bruno Retailleau, faisant état de près de 200 interpellations et d’une cinquantaine d’actions de déblocage menées par les forces de l’ordre. Le ministre a fustigé une nouvelle fois le détournement d’une mobilisation à l’initiative citoyenne, « par la mouvance de la gauche, de l’extrême gauche et des insoumis », dont « on peut reconnaitre la marque, l’ADN », en évoquant des « modes opératoires » spécifiques : des « sabotages », des « tirs de mortiers sur les forces de l’ordre et une ambulance », des « tirs de pavés en pierre ». Et de condamner des élus qui « portent malheureusement l’écharpe tricolore » et ont, « sur les réseaux, des mots d’ordre qui sont des appels l’insurrection, à la violence ».
En commençant par rappeler le droit de manifester « à condition de respecter la loi » et de ne pas « entraver » la « France des honnêtes gens », Bruno Retailleau a insisté sur la fermeté des consignes transmises aux 80 000 gendarmes et policiers mobilisés qui ne toléreront « aucun blocage » ni « aucun boycott ». « Nous ne céderons rien, nous ne reculerons pas » a-t-il martelé, avant de rendre « hommage » à la « France du courage en bleu, face à la France du sabotage en noir ».
C’est une longue journée qui s’annonce, avec la « bascule » dans quelques heures « dans une seconde phase » : le début des manifestations « avec un risque particulier » d’infiltration de « groupuscules violents » qu’il sera « plus compliqué d’exfiltrer » des grands mouvements de mobilisation en ville.