Invitée de la matinale de Public Sénat, la ministre du logement, Valérie Létard est revenue sur les ambitions du gouvernement en la matière. L’ancienne sénatrice veut faire de son portefeuille un sujet de consensus, au risque d’avancer de manière incertaine.
Bonnets d’âne et bons points: les classements de députés en question
Par Charlotte HILL
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Bonnets d'âne pour les "cancres" et bons points pour les autres: les classements de députés, régulièrement publiés par certains médias, sont critiqués comme ne reflétant pas la réalité du travail parlementaire... même si les élus les mieux placés en font volontiers écho.
La nouvelle Assemblée n'y a pas échappé, avec un premier pointage des moins assidus dès juillet par L'Express, puis Capital recensant en décembre ceux "qui glandent" ou "qui bossent".
Comme souvent, ces palmarès s'appuyaient sur les données recueillies depuis 2009 par le collectif Regards citoyens sur "nosdeputes.fr": présence en commission, prises de parole en séance, amendements... Le site, qui ne fait pas lui-même de classements, a fait des émules, comme "L'observatoire de la démocratie", de militants LFI.
Pour Olivier Costa, chercheur au CNRS (Sciences Po Bordeaux), si "les sites comme nosdeputes.fr font du très bon boulot", les classements "strictement quantitatifs" ne sont "pas sains", portant toujours un peu d'antiparlementarisme derrière.
S'il juge qu'il y a "de vrais cancres" à l'Assemblée, il trouve l'impact de ces palmarès, souvent déclinés localement, "parfois très injuste", plaidant pour un travail "plus qualitatif".
Pour montrer leur "côté imparfait et déformant", le chef de file communiste André Chassaigne évoque la rédaction de rapports, "activité longue et très importante" ou les déplacements "non seulement pas pris en compte mais pénalisants".
Cet élu chevronné reconnaît néanmoins que "les députés sont toujours très attentifs à leur rang" car les électeurs y voient "l'appréciation de leur activité". Il admet avoir relayé un classement où il était premier.
L'association Regards citoyens est elle-même "assez critique" concernant ces palmarès, explique à l'AFP l'un de ses administrateurs, Tangui Morlier.
"Une partie des données nous semblant importantes ne sont pas disponibles", dit-il. "Le problème des classements est qu'ils homogénéisent les pratiques" et reviennent à appliquer "un point de vue éditorial ou militant à des activités très diverses".
Que les députés en tête les relaient est "de bonne guerre", mais, dit-il, "on a vu aussi des parlementaires bien classés qui relativisent ce travail".
Après l'article de Capital, Matthieu Orphelin (LREM), a ainsi dit vouloir profiter de sa "bonne position" (40e) pour souligner le côté potentiellement "trompeur", avec des rapporteurs avantagés par exemple car ils prennent plus la parole.
- "Baromètres à la noix" -
Tout en observant un palmarès "très flatteur" pour son groupe, le chef de file des Insoumis, Jean-Luc Mélenchon, a aussi dénoncé "une comptabilité à deux balles!".
Laurent Pietraszewski, nouveau chef de file LREM de la commission des Affaires sociales, estime que cette évaluation "fait vivre la démocratie" même si "c'est incomplet", mais juge qu'il faut "faire gaffe à ne pas déclencher de l'antiparlementarisme".
Lors de ses vœux mi-janvier, le président de l'Assemblée François de Rugy (LREM), a d'ailleurs mis en garde vis à vis de ces classements. Jugeant les données "utiles", il a estimé que "force est de constater que ni les associations citoyennes qui les traitent, ni les médias, qui parfois disons-le les maltraitent, n’ont réussi jusqu’ici à traduire, à travers ces chiffres, la réalité du travail parlementaire".
Dénonçant des "baromètres à la noix", Richard Ferrand, a plaidé dimanche sur France 3 pour que l'évaluation du travail des députés soit "repensée, et ce sans poujadisme". Le président des députés LREM a indiqué avoir "suggéré que soit créé un outil informatique" indiquant leur "activité réelle".
Tangui Morlier ne dit pas non, pour peu que l'Assemblée ne "tombe pas dans les travers" des classements en "imposant un point de vue", ni que cela impacte certaines pratiques, comme cela s'est vu au Parlement européen.
Il y a déjà "des députés qui savent très bien utiliser le système en déposant, ou faisant déposer par leurs assistants, des amendements par kg", observe Olivier Costa, ce qui "non seulement truque le jeu, mais devient nuisible au travail parlementaire".
En commission, "pour être comptabilisés présents, beaucoup sont amenés à re-poser une question déjà posée", souligne aussi André Chassaigne, concédant que les classements, "ça booste les députés pour être plus présents".