« Bredouilles » ou « écoeurés », des maires de banlieue déçus par le discours de Macron
"Bredouilles", "K.O. debout" ou "écoeurés": les maires de plusieurs villes de banlieue ont reçu comme un camouflet le discours d...

« Bredouilles » ou « écoeurés », des maires de banlieue déçus par le discours de Macron

"Bredouilles", "K.O. debout" ou "écoeurés": les maires de plusieurs villes de banlieue ont reçu comme un camouflet le discours d...
Public Sénat

Par Gaëlle GEOFFROY

Temps de lecture :

4 min

Publié le

"Bredouilles", "K.O. debout" ou "écoeurés": les maires de plusieurs villes de banlieue ont reçu comme un camouflet le discours d'Emmanuel Macron sur les quartiers en difficulté, lui reprochant de les court-circuiter et un manque de volonté politique.

"Le diagnostic n'est pas faux, mais je suis ressorti de l'Elysée bredouille, sans élément concréto-concret", regrette Bruno Beschizza, maire Les Républicains d'Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). Et "j'ai eu le sentiment très étrange d'assister davantage à un meeting qu'à un discours présidentiel", dit-il à l'AFP, affirmant s'être "senti seul" en tant qu'élu au milieu des 600 invités.

Catherine Arenou, maire divers droite de Chanteloup-les-Vignes, était "K.O. debout en sortant". Emmanuel Macron "a nié le rapport Borloo, il a nié le fait que les élus sont des représentants de leurs collectivités, il a nié tout le travail associatif", a-t-elle critiqué sur France Inter.

A gauche, la maire socialiste de Bondy (Seine-Saint-Denis), Sylvine Thomassin, est "écoeurée": elle dit sur RTL avoir quitté la salle dix minutes avant la fin du discours, "quand le président a prononcé pour la troisième fois le mot +clientélisme+ en parlant des élus locaux".

"Je ne l'ai pas encore digéré", a abondé le député Nouvelle Gauche du Val-d'Oise François Pupponi, sur France Inter. Il évoque même un "tournant historique lorsque le président de la République dit que les acteurs des quartiers n'ont pas réussi à régler les problèmes et qu'il faut donc en changer", travailler avec d'autres, niant ainsi "la légitimité démocratique" des élus.

Qui sont ces autres acteurs ? "Un certains nombre de réseaux issus de la diversité (...) qui disent +nous sommes légitimes, la France est redevable vis-à-vis de nous, vous nous avez colonisés, on veut le pouvoir sur ces bases-là+", selon M. Pupponi. Mais "le pouvoir s'acquiert démocratiquement par le vote", et "laisser le champ ouvert à ces discours-là est dangereux", s'inquiète-t-il.

- "Passer à la réalité concrète" -

Du côté des moyens financiers, le manque est criant, se plaignent aussi ces élus.

Pour Jean-Louis Marsac, maire divers gauche de Villiers-le-Bel, une commune du Val-d'Oise secouée par des émeutes il y a dix ans, il n'y a "pas grand-chose".

Sujet-clé dans ces quartiers, la relance de la rénovation urbaine reste en suspens selon ces maires, et le doublement de la dotation pour l'Agence nationale de renouvellement urbain (Anru), à 10 milliards d'euros, était déjà prévu.

"A Villiers-le-Bel, on souhaite démolir au moins deux tours et quelques bâtiments, ce n'est pas avec les annonces du président de la République qu'on va pouvoir les financer", explique M. Marsac.

François Pupponi dénonce, lui, le double discours du gouvernement consistant à dire qu'"il faut arrêter de ghettoïser le ghetto" alors que "la loi Elan (sur le logement, NDLR) prend des mesures pour ghettoïser le ghetto".

Si les 30.000 stages pour les élèves de 3e ou le testing dans les grandes entreprises sont salués, certains notent qu'élus, associations et entreprises n'ont pas attendu le chef de l'Etat pour agir dans ce sens.

Et côté sécurité, le nombre annoncé de 1.300 policiers supplémentaires pour 60 quartiers leur paraît faible.

Evoquant la police de sécurité du quotidien, déjà promise par le président, Bruno Beschizza souligne que dans sa commune de 83.000 habitants, "les choses ne sont pas faites, rien de concret n'est encore arrivé".

A l'inverse, pour le maire LR de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, Emmanuel Macron "n'a éludé aucun des sujets essentiels qui font le quotidien des élus locaux: la sécurité, la lutte contre les trafics de stupéfiants ainsi que la radicalisation".

Le maire de Nice Christian Estrosi a salué la perspective d'un accès des maires au fichier FSPRT des personnes recensées pour radicalisation islamiste. Mais "je ne me bercerai pas de mots et nous attendons d'Emmanuel Macron que nous passions à la réalité concrète et que d'ici l'été les maires disposent enfin de ces fichiers", a-t-il prévenu sur Sud Radio.

Le chef de l'Etat a fixé un rendez-vous d'étape pour juillet.

Partager cet article

Dans la même thématique

« Bredouilles » ou « écoeurés », des maires de banlieue déçus par le discours de Macron
4min

Politique

711 jours otage au Mali : « C’est l’histoire la plus extraordinaire et terrible de ma vie » raconte Olivier Dubois

C’est un journaliste pas comme les autres. Parti interviewer un lieutenant djihadiste à Gao au Mali en mars 2021, il n’en revient que près de deux ans plus tard, après avoir été capturé par des terroristes. Une expérience marquante qui a chamboulé sa vie. Sa passion du journalisme est-elle toujours intacte ? Comment tenir dans de telles conditions, mais surtout comment se reconstruire ? Olivier Dubois répond à ces questions dans l’émission Un monde, un regard de Rebecca Fitoussi.

Le

« Bredouilles » ou « écoeurés », des maires de banlieue déçus par le discours de Macron
3min

Politique

Fin des moteurs thermiques en 2035 : « Si on n’a pas de période de transition, c’est du suicide économique » selon l’eurodéputé belge Benoît Cassart

D’ici à 2035, la vente des ventes de voitures thermiques neuves sera interdite. Un objectif remis en cause par la droite européenne et les défenseurs de l’automobile. Un enjeu majeur pour l’Union, où 8 véhicules neufs sur 10 roulent encore à moteur thermique. Voiture thermique stop ou encore on en débat dans l’émission Ici L’Europe présentée par Caroline de Camaret et Alexandre Poussart.

Le

MIGRANTS – CALAIS – CLASK DUNES
8min

Politique

Accord franco-britannique sur les migrants : « On va se renvoyer à la frontière les migrants dans un jeu de ping-pong », dénonce l’écologiste Guillaume Gontard

L’accord sur les migrants annoncés par Emmanuel Macron et le premier ministre britannique Keir Starmer est accueilli froidement au Sénat, à droite, comme à gauche. Du côté de Calais, « la situation est lourde à supporter », rappelle le sénateur LR du Pas-de-Calais, Jean-François Rapin.

Le