Brigitte Macron, plus proche de « Tante Yvonne » que de Danielle Mitterrand ?

Brigitte Macron, plus proche de « Tante Yvonne » que de Danielle Mitterrand ?

Pendant la campagne présidentielle elle avait joué un rôle de premier plan, depuis l’élection de son mari elle se fait discrète, presque jusqu’à l’effacement. Mais où donc est passée Brigitte Macron ? Si son statut a été clarifié avec la publication d’une charte, Brigitte Macron reste dans l’ombre de son mari, très loin de la liberté assumée par Danielle Mitterrand, ou Bernadette Chirac avant elle. Au moment de la journée des droits des femmes, c’est l’occasion d’interroger la place de première dame.
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Par Marie Oestreich et Pierre Bonte-Joseph

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Danielle Mitterrand : L’idéaliste
 

Comme elle, elle s’est engagée dans la campagne de son mari, comme elle, elle était à ses côtés le soir de la victoire sur le podium. Mais la comparaison entre Danielle Mitterrand et Brigitte Macron s’arrête là. Danielle Mitterrand, dont le parcours est raconté dans le documentaire « Danielle Mitterrand, une certaine idée de la France » de Laurence Thiriat était engagée politiquement, elle était celle qui défendait l’idéal à côté de son mari ancré lui, dans la brutalité du réel. Une femme de gauche, « probablement beaucoup plus que son mari », d’après Philippe Goulliaud, qui n’hésitait pas à mettre les pieds dans le plat : « assez indépendante, elle avait des passions, ce qui a parfois causé des difficultés à la diplomatie française ». Une « diplomatie parallèle » parfois gênante, comme lorsqu’elle s’engage pour les populations Kurdes opprimées, alors que François Mitterrand mène des discussions avec la Turquie, mais une voix que le Président de la République de 1981 à 1995 ne bâillonnera jamais.

Danielle Mitterrand était « assez indépendante, elle avait des passions, ce qui a parfois causé des difficultés à la diplomatie française »


Une liberté de parole qui tourne parfois à la provocation, comme le raconte Nathalie Schuck, journaliste et co-auteure de Madame la présidente, comme lors de la visite de Danielle Mitterrand dans un centre pour toxicomanes et qu'elle lance sans précautions : « Je ne comprends pas pourquoi on ne dit pas publiquement qu’il faut légaliser la drogue ? ». Pour Joëlle Chevé Danielle Mitterrand était « atypique par rapport à celles qui l’ont précédé et celles qui l’ont suivie », une parenthèse de liberté dans un monde de conventions fortes.

 

Nathalie Schuck : Quand Danielle Mitterrand se demandait « Pourquoi on ne dit pas publiquement qu'il faut légaliser la drogue ? » #UMED
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Yvonne de Gaulle : La discrète

À certains égards, Brigitte Macron emprunte certains codes à la première « première dame » Yvonne de Gaulle. Femme d’un militaire elle était d’« une discrétion terrible et une fidélité parfaite » comme le souligne Philippe Goulliaud, ancien correspondant de presse à l’Élysée. Si elle avait évidemment « ses bonnes œuvres », cette femme « pas particulièrement coquette » ne se mettait jamais en avant.
Discrète certes, mais elle jouait un rôle important comme le rappelle Joëlle Chevé, historienne et auteure de L'Élysée au féminin de la IIe à la Ve République. C’est elle qui convainc son mari de faire voter la Loi Neuwirth, autorisant la pilule en 1967. La même qui, au nom de l’égalité de traitement, reproche au Général de gracier plus facilement les femmes condamnées à mort que les hommes. Mais son rôle ne se limite pas à ces dossiers, le général dira d'elle dans ses Mémoires « ma femme, sans qui rien de ce qui a été fait n’aurait pu l’être ».

Vers une émancipation ?

Mais pour Joëlle Chevé la discrétion de Brigitte Macron ne s’explique pas uniquement par son caractère, « Une première dame aujourd’hui ne pourrait absolument pas exprimer ses opinions politiques comme a pu le faire Danielle Mitterrand. ». Et l’expérience de François Hollande avec son ex-compagne, la journaliste Valérie Trierweiler, le prouve. Pour Joëlle Chevé, Valérie Trierweiler incarnait « une nouvelle génération de femmes qui ont travaillé et qui ont cru, à tort, que c’était fait, qu’une femme de président allait pouvoir s’exprimer. » L’histoire prouvera que non.

« Une première dame aujourd’hui ne pourrait absolument pas exprimer ses opinions politiques comme a pu le faire Danielle Mitterrand. »

 

Joëlle Chévé : « Une première dame aujourd'hui ne pourrait pas exprimer ses opinions politiques comme l'a fait Danielle Mitterrand. » #UMED
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Brigitte Macron : Première dame effacée ?

Cette « hantise » du cas Trierweiler c’est peut-être, d’après Fabrice Gaignault, l’une des explications de la discrétion médiatique et publique de Brigitte Macron. « Quand elle fait des déplacements sur le terrain, elle n’embarque pas de caméra, et très rarement de presse » comme le rappelle Nathalie Schuck. Une communication de la première dame qui ne doit jamais « venir percuter celle du Président de la République ». Pourtant son rôle reste central dans l’exercice du pouvoir. Comme Bernadette Chirac qui avait vu venir l’arrivée de Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle de 2002, sur la crise des « gilets jaunes » « Brigitte Macron dans les courriers qu’elle recevait, avait senti que quelque chose couvait ». Et récemment, c’est elle qui a poussé le Président à mettre en place un secrétariat de la protection de l’enfance. Une position charnière, donc. S’il semble exagéré d’avancer comme Fabrice Gaignault que « les Français ont élu la première fois un couple », il reste que Brigitte Macron « contrebalance beaucoup le côté arrogant, techno, jeune et trop parfait d’Emmanuel Macron ». Pour Nathalie Schuck, « Emmanuel Macron a marketé son couple pour toucher les Français au cœur. »

Brigitte Macron « contrebalance beaucoup le côté arrogant, techno, jeune et trop parfait d’Emmanuel Macron »

 

Nathalie Schuck : « Emmanuel Macron a marketé son couple pour toucher les Français au coeur. » #UMED
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De Yvonne à Brigitte, difficile pour les épouses de Président de la République d’exister ; et la publication d’une charte en 2018 n’y a rien changé. La transparence annoncée bute toujours sur un rôle mal défini dont pourtant l’influence est réelle : derrière chaque homme continue de se cacher une femme.

 

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