Paris: Conseil des Ministres Elysee
Francois Bayrou, Premier Ministre. Conseil des Ministres au Palais de l Elysee le 30 juillet 2025 a Paris. Paris, FRANCE – 30/07/2025 Francois Bayrou, French Prime Minister. Weekly Council of Ministers at Elysee Palace, 30 July, 2025 in Paris. Paris, FRANCE - 30/07/2025//04HARSIN_CONSEILDESMINISTRESELYSEE012/Credit:ISA HARSIN/SIPA/2507301554

Budget 2026 : François Bayrou peaufine sa copie avec les parlementaires du socle commun… avant de négocier avec le PS 

Une réunion des parlementaires soutiens du gouvernement est prévue avec Matignon mercredi 27 août prochain pour préparer l’examen du prochain budget. François Bayrou espère ensuite convaincre les députés socialistes de ne pas censurer.
Stephane Duguet

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Loin des scènes de discordes qui ont animé le socle commun à la fin de la dernière session parlementaire, le gouvernement travaille à l’unité en préparant l’inflammable budget 2026. Selon nos informations, précisant celles de nos confrères de Politico, des députés et sénateurs soutiens du gouvernement ont rendez-vous avec le cabinet du Premier ministre François Bayrou mercredi 27 août prochain afin d’échanger sur les mesures proposées pour faire 43,8 milliards d’euros d’économies. « C’est une réunion technique, explique un député Renaissance. Elle a pour objectif de préparer une réunion ultérieure entre François Bayrou et les chefs de partis du socle commun. »

Au Sénat, la majorité de droite et du centre porte à la baisse l’effort demandé aux collectivités territoriales. Le gouvernement tablait sur 5,3 milliards d’euros d’économies en 2026, un montant estimé à 10 milliards par le Comité des finances locales. Jean-François Husson (LR), rapporteur général du budget à la chambre haute maintient que cet effort « n’est pas possible » mais reconnaît que « le gouvernement est à l’écoute » et a bon espoir que les économies demandées n’atteindront finalement que 2 milliards d’euros.

Bayrou ne se laissera pas « humilier »

« Cette réunion vise à définir globalement ce que les parlementaires du socle commun pourront faire et dire », explique un élu Les Républicains (LR) qui participera aux échanges. L’enjeu est de taille pour François Bayrou. Celui de ne pas reproduire les divisions qui s’étaient exprimées au sein de ce même socle composé de Renaissance, des Républicains, d’Horizons, du MoDem et de l’UDI lors de l’examen du budget de son prédécesseur Michel Barnier. Malgré le vote de la motion de censure par les partis de gauche avec le Rassemblement national au mois de décembre 2024, d’aucuns au sein du camp gouvernemental estiment que l’ancien négociateur du Brexit avait été fragilisé par « les lignes rouges de Gabriel Attal et de Laurent Wauquiez », se souvient un proche de François Bayrou. Le même assure qu’à l’automne le Premier ministre « ne se laissera pas balader et humilier ».

François Bayrou préfère donc prendre les devants avec ces réunions tant le budget « devra contenter leurs objectifs politiques », détaille un conseiller gouvernemental. Cette fois, chacun préfère jouer la prudence. « Je n’ai pas entendu Laurent Wauquiez brandir de ligne rouge », note François Patriat, président du groupe Renaissance au Sénat. Sous l’impulsion de leur président et ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, Les Républicains ont d’ailleurs préféré proposer des mesures alternatives plutôt qu’un contre-budget pour éviter toute image d’affrontement. « Notre travail est un travail d’influence, de négociation, de propositions pour substituer à de mauvaises économies de bonnes économies », indique Jean-Didier Berger, député Les Républicains des Hauts-de-Seine. Du côté de l’Assemblée nationale, les députés LR estiment en effet que le constat de François Bayrou est le bon, mais que la désindexation des barèmes de l’impôt sur le revenu, des pensions de retraite ou encore la suppression de deux jours fériés ne sont pas de bonnes solutions. « On aimerait véritablement une politique de baisse des dépenses », appuie Jean-Didier Berger qui demande des « réformes structurelles ».

Négociations tendues à venir avec le PS

Du côté de Renaissance, « on est dans une logique de responsabilité, promet un député du groupe. On veut absolument garder l’objectif de 43 milliards d’euros d’économies et atteindre 4,6 % en 2026. » Mais il est bien conscient que sans majorité, le gouvernement devra aller discuter avec les partis d’opposition, le parti socialiste en tête. « Les marges de manœuvre sont minces ce qui complique la donne pour faire un deal avec le PS », ajoute le député. D’autant que chez LR, on dénonce un budget où il n’y a pas « un euro d’économie proposé sur l’immigration ». « C’est une discussion à plusieurs bandes, rétorque un conseiller de l’exécutif. Ils veulent des mesures sur l’immigration, mais si c’est pour qu’au final ça fasse capoter le budget… ».

Parce que le gouvernement souhaite éviter tout irritant qui pousserait les députés socialistes à voter une motion de censure. Comme en janvier, François Bayrou souhaite convaincre les députés PS de ne pas le renverser. « Bayrou est prêt à lâcher quelques milliards », croit savoir un membre du camp présidentiel. Les socialistes préparent en ce moment un contre budget qui sera discuté lors de leur université d’été à Blois la semaine prochaine et pendant leurs journées parlementaires début septembre. « Pour nous, la baisse de la dépense publique est trop rapide bien qu’on ne la conteste pas », détaille Patrick Kanner, président du groupe PS au Sénat. « Je ne crois pas que spontanément ils accepteront de dire oui et de valider les efforts nécessaires même si je suis prêt à toutes les discussions avec qui voudra pour mieux répartir les efforts en matière de justice et d’efficacité », avait affirmé le Premier ministre sur Youtube le 8 août dernier. Le PS demande une taxation des plus hauts revenus parce qu’ils jugent les efforts demandés « déséquilibrés » notamment « pour ceux qui ont bénéficié de la politique fiscale mise en place par Emmanuel Macron », détaille Patrick Kanner.

Avant d’aller négocier au ministère de l’Economie, les socialistes préciseront publiquement sur quelles mesures ils s’engagent à négocier. « On va avoir une approche différente, nous ne rentrerons pas dans des négociations rampantes comme en janvier. Ces échanges ont laissé un sentiment mitigé sur la méthode », affirme un député PS proche d’Olivier Faure. Ce dernier rappelle aussi que « pour le moment, nous votons la censure ».

« Ça ne sert à rien de discuter avec le RN »

Dans cette équation, le gouvernement ne compte pas sur le Rassemblement National. « Ça ne sert à rien de discuter avec le RN parce qu’ils sont dans un autre monde. Leur positionnement n’a rien à voir avec un positionnement rationnel. Michel Barnier l’a expérimenté », retrace une ministre. L’ancien Premier ministre était tombé sur le budget de la sécurité sociale après avoir accédé à certaines demandes de Marine Le Pen qui finalement avait annoncé que ce ne serait pas suffisant et que ses députés voteraient la censure.

La cheffe des députés RN a écrit à François Bayrou le 25 juillet dernier pour lui signifier son mécontentement de ne pas avoir été à nouveau reçue pour échanger sur le budget. La députée du Pas-de-Calais précise que son parti « n’accepter [a] pas un seul centime de contribution financière, directe ou indirecte, des Français tant que les chantiers d’économies […] n’auront pas été engagés avec efficacité et bonne foi ». Dans les couloirs, un conseiller explique que le RN sera reçu mais qu’aujourd’hui « l’équilibre politique sur lequel repose le gouvernement, c’est d’abord la construction d’un budget avec le socle commun et une négociation avec le PS » pour éviter la censure.

Le risque de la censure pris au sérieux

« François Bayrou a 9 chances sur 10 de tomber », redoute même un député macroniste. D’autant que la rentrée s’annonce électrique entre la mobilisation du 10 septembre soutenue par La France Insoumise, le Parti socialiste, les Ecologistes et le Parti communiste, et l’intersyndicale qui se réunit pour décider de mobilisations en septembre contre le budget. Les syndicats doivent également se prononcer avant le 1er septembre sur leur participation ou non aux négociations proposées par le Premier ministre sur la pénibilité, la réforme de l’assurance chômage et la suppression des deux jours fériés.

De leur côté, les Insoumis ne s’embarrasseront pas de la négociation. Éric Coquerel, député LFI de Seine-Saint-Denis et président de la commission des Finances à l’Assemblée nationale, ne tergiverse pas : « Nous n’irons pas faire semblant de co-construire alors que c’est un leurre et que le budget est déjà établi. » Le message est clair. La France Insoumise appelle à voter la censure le plus rapidement possible contre le gouvernement de François Bayrou. « Au plus tard en octobre il est censuré », anticipe Éric Coquerel.

Une telle option fait bien sûr l’objet de mises en garde dans le camp gouvernemental. « On a vu ce que la censure nous a coûté, 12 milliards d’euros », fulmine François Patriat. « Les forces politiques qui l’ont votée savent qu’elles sont comptables de la censure », note aussi le conseiller gouvernemental qui pense que cela peut servir d’argument dans la négociation avec les socialistes. Dans sa capsule vidéo estivale du 11 août, François Bayrou brandissait encore la menace de la faillite avec sa métaphore montagneuse : « Si vient le moment que j’ai appelé la falaise de laquelle on tombe, le moment où nous n’aurons pas d’autres solutions que d’être coincés par les agences de notation et les prêteurs, alors il n’y aura aucune autre possibilité que de sacrifices terribles ». Un argument qui ne suffira pas à convaincre l’opposition.

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