Après l’adoption du budget de la sécurité sociale hier soir, à quelque seize voix près, à l’Assemblée nationale, la balle se retrouve désormais dans le camp de la majorité sénatoriale, de droite et du centre. Vendredi, la copie votée par les députés – réintroduisant notamment la suspension de la réforme des retraites, arrivera pour la seconde fois au palais du Luxembourg. Les sénateurs devraient la renvoyer immédiatement à la Chambre basse, par une question préalable, sans examen. Une décision prise ce matin par la commission des Affaires sociales, qui éloigne l’hypothèse d’un nouveau détricotage.
« Le Sénat a montré beaucoup de sagesse », estime le président du parti UDI Hervé Marseille, « parce que si on avait rouvert le dossier, on aurait pu reprendre un certain nombre de mesures qui nous sont chères, mais on n’aurait pas tenu les délais, et, de ce fait, on tuait le PLFSS [ndlr : projet de loi de financement de la sécurité sociale] ».
L’avenir du PLF plus incertain que celui du PLFSS
Aussi sur la table : l’avenir du projet de loi de finances (PLF), actuellement débattu au Sénat, avant le vote solennel du 15 décembre, puis l’ouverture d’une commission mixte paritaire (CMP) prévue, pour l’heure, le 19 décembre. L’issue du texte semble d’autant plus périlleuse, que la partie « recettes » a été rejetée en bloc par l’Assemblée nationale (un bulletin « pour » sur les 405 exprimés) fin novembre, expédiant la copie directement au Sénat, dans sa version initiale. Une entente entre les sept députés et sept sénateurs est-elle envisageable ? « Je crois qu’un accord est possible, parce que l’esprit de compromis habite aussi les sénateurs », veut croire Hervé Marseille, « en CMP, il y aura un travail pour essayer de trouver des convergences […] qu’il faudra ensuite, d’abord faire valider à l’Assemblée nationale, puis au Sénat ». « On a le temps de préparer les choses [ndlr : entre le vote solennel du 15 et l’ouverture de la CMP le 19]», insiste le sénateur centriste, « et on aura le temps de les discuter (…), [lors de] cette CMP qui durera deux jours a priori ».
Si l’adoption du PLFSS a été fluidifiée par les gages du gouvernement accordés à la gauche, le scénario s’annonce moins favorable pour le budget de l’État. « A un moment donné, il faut s’arrêter », s’agace le chef de file de la formation UC à la Chambre haute, « des concessions, il y en a tous les matins. […] Le déficit du budget [de la sécurité] social(e), ce n’est pas une paille, on a toujours 3 500 milliards de dette, on n’a pas commencé la moindre économie. Alors, moi je veux bien que le PS demande encore plus de déficit et de dépenses, mais à un moment donné, […] on ne peut pas continuer comme ça ». « Dans un compromis, on est à deux. Je pense qu’on peut terminer ce budget. Forcément, il y aura des mécontentements parce que chacun doit faire un compromis », poursuit-il. Face à la menace d’une censure toujours agitée par certains groupes politiques, Hervé Marseille ne s’alarme pas : « Des risques, il y en a tous les matins ». Et le premier reste « de ne pas avoir de budget », d’ici la fin de l’année, martèle-t-il.
Loi spéciale ou 49-3 ?
L’hypothèse d’une loi spéciale, que l’exécutif devrait déposer le 19 décembre au plus tard, s’épaissit chaque jour un peu plus. Mais cette voie implique de « retravailler le budget 2026 en début d’année [prochaine] », comme évoqué dans la matinée par la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon, et « de faire tourner l’État avec le budget 2025, qui a coûté, au bas mot, douze milliards d’euros », déplore l’élu des Hauts-de-France. « Je ne connais pas beaucoup de parlementaires désireux de venir début janvier, et en février, au moment des municipales. […] Je ne vois pas pourquoi on trouverait des solutions qu’on n’aura pas trouvées au mois de décembre ». Et si le recours au 49-3 a, pour l’instant, été écarté par le Premier ministre, Hervé Marseille n’exclut pas cet outil constitutionnel : « Je pense que pour conclure le budget, le 23 décembre, il faudra un petit coup de main du gouvernement ».