Aux côtés de Catherine Vautrin, Sébastien Lecornu est revenu sur sa volonté d’organiser un débat thématique sur la défense à l’Assemblée nationale, en vertu de l’article 50-1, avant la fin des discussions sur le projet de loi de finances (PLF). « J’ai pris cette décision tenant compte du fait que la partie recettes du budget de l’État, ayant été repoussée à l’Assemblée nationale », ceci n’a pas permis aux députés « d’observer tous les crédits de dépense », a retracé à la presse le locataire de Matignon. Il y voit un « problème démocratique », « parce qu’il est question d’une augmentation particulièrement importante […] pour nos armées l’année prochaine ». En l’espèce : une hausse de 6,7 milliards d’euros, annoncée dès le mois de juillet dernier par Emmanuel Macron. « Il est important d’avoir un moment spécifique dédié à ce sujet », alors que les risques se cumulent, en particulier terroristes. « On ne veut pas prendre la représentation nationale en traître », a-t-il poursuivi, avant de prévenir que cette croissance des crédits dédiés aux Armées « va durer dans le temps », évoquant une augmentation de 36 milliards entre 2026 et 2030. Et risque de « s’imposer pendant la campagne présidentielle ».
L’enjeu de la souveraineté nationale
« L’enjeu est considérable en matière de souveraineté », a affirmé Sébastien Lecornu. Sa ligne est claire : « Nous avons fait un choix depuis les années 1960, de ne dépendre de quasiment personne pour nos systèmes d’armes […]. Ça veut dire que derrière l’enjeu budgétaire », se trouve un « enjeu industriel », de « commandes publiques » et de « compétences », à l’égard des « neufs grands géants de notre industrie de défense », mais aussi des PME et TPE, « sous-traitantes du secteur ». « Je ne proposerais jamais d’acheter des armes américaines », a-t-il renchéri.
Avec les difficultés à faire adopter un budget en début d’année, « on a dû gérer […] des décalages importants, pas complètement rattrapés », a-t-il mis en garde. Néanmoins, « je ne veux pas instrumentaliser le sujet de la défense sur le terrain de la politique intérieur », a précisé le Premier ministre, « c’est pour ça qu’on a souhaité une réunion retirée loin des micros […], pour donner de manière très transparente […], les effets du non-vote d’un budget pour l’État au 1er janvier ». Et de préciser que Catherine Vautrin « s’est vue confier le soin d’imaginer un plan de contingence, si d’aventure il arrivait qu’il n’y ait pas de budget, pour justement documenter les retards, ce à quoi il faudrait renoncer et le donner à la représentation nationale avant le 31 décembre pour que le débat soit […] largement éclairé ».
L’actualisation de la loi de programmation militaire, attendue d’ici la fin de l’année, dépendra également de l’atterrissage du PLF : « Tant qu’on n’a pas de certitude qu’on a bien un budget pour l’année prochaine, il est compliqué de se lancer dans une mise à jour de la programmation ».
« Trouver des voies de compromis sur la question militaire est essentiel »
« Il y a un point commun parmi toutes les familles politiques, de LFI au RN, c’est que tout le monde réclame de la souveraineté, de l’autonomie voire de l’indépendance », a insisté le Premier ministre. C’est donc l’heure d’un « moment de clarification ». Le chef du gouvernement n’a pas manqué de rappeler que « notre capacité à avoir un budget dans les temps », sera observée « par nos alliés » et « nos compétiteurs ».
Sébastien Lecornu a mis sur la table la responsabilité et la capacité des parlementaires à « isoler la défense nationale et la question de la défense de notre souveraineté du reste ». Et d’ajouter : « Trouver des voies de compromis sur la question militaire est essentiel ». « De mes nombreuses consultations, je vois bien qu’il y a des convergences sur ces thématiques […], sur lesquelles l’ensemble des formations politiques doivent pouvoir se retrouver ». Mais pas question de se reposer uniquement sur le débat du 50-1 : « Le vote du budget est une question politique, donc la seule question de la défense ne peut pas suffire à emporter un vote ».