Budget : le Sénat de droite devrait « corriger la copie » des députés
Il n’est « pas exclu » que la majorité sénatoriale adopte une version modifiée du budget 2018, affirme son rapporteur, le sénateur LR Albéric de Montgolfier. Les députés ont débuté l’examen du projet de loi finances en commission.

Budget : le Sénat de droite devrait « corriger la copie » des députés

Il n’est « pas exclu » que la majorité sénatoriale adopte une version modifiée du budget 2018, affirme son rapporteur, le sénateur LR Albéric de Montgolfier. Les députés ont débuté l’examen du projet de loi finances en commission.
Public Sénat

Temps de lecture :

6 min

Publié le

Mis à jour le

Alors que le budget 2018 arrive en commission devant les députés ce mardi, la majorité sénatoriale a encore un peu de temps pour se préparer. La commission des finances commence à examiner les premières missions à partir de la semaine prochaine et fera ensuite ses premières auditions. Le rapport sur l’ensemble du projet de loi de finances (PLF) viendra début novembre pour un examen en séance prévu du 23 novembre au 12 décembre.

Bruno Retailleau ne votera « sans doute » pas le budget du gouvernement

Mais les sénateurs n’attendent pas le mois de novembre pour s’exprimer. Le président du groupe LR, Bruno Retailleau, a prévenu, ce matin, sur France Inter : il ne votera « sans doute » pas le budget qu’il juge « décevant » sur la question des déficits et de la compétitivité des entreprises.

Fidèle à lui-même, Gérard Larcher est un peu plus mesuré. Des variations au sein de la droite qui n’ont pas échappé du côté de la majorité présidentielle : « Selon le parlementaire, vous n’avez pas les mêmes référents et la même droite » constate avec un brin de malice une source ministérielle.

Avant de dire s’il voterait ou non le texte, Gérard Larcher veut « dialoguer avec (ses) collèges de la commission des finances ». « Avant de mettre une note, il faut examiner la copie totalement. Il y a beaucoup de zones de flou : collectivités territoriales, baisse d’impôts » a-t-il affirmé ce matin, invité de Territoires d’Infos, sur Public Sénat. Il pointe l’effet de la hausse de la CSG « sur les retraités » et « les injustices » qu’elle peut engendrer. Quant à l’ISF, dont la réforme gouvernementale fait polémique, il « pense que c’est un mauvais impôt ».

L’approche du président sur la CSG « peut créer des injustices », avertit Gérard Larcher
02:44

Albéric de Montgolfier : « Il faudra sans doute qu’on corrige pas mal la copie »

Alors comment ses collègues de la commission des finances perçoivent-ils le PLF ? Le rapporteur général du budget, le sénateur LR Albéric de Montgolfier, qui doit justement s’entretenir avec Gérard Larcher du sujet, distribue les bons et les mauvais points. « C’est un budget contrasté. Il y a des très bonnes choses, avec des économies proposées et un changement dans la méthode pour les faire. On s’attaque à des économies structurelles. (…) Mais il y a également des aspects très critiquables : la CSG sur les retraités, la réforme imparfaite de la fiscalité immobilière, des augmentations d’impôts, je pense en particulier à la fiscalité environnementale, et des économies au final très insuffisantes car on crée pas mal de postes dans la fonction publique » affirme à Public Sénat le rapporteur du PLF (voir la première vidéo. Images : Fabien Recker).

Sur la réforme de l’ISF, il critique le texte, mais parce qu’il ne va pas aller plus loin. Il juge « la position un peu maladroite. Si le gouvernement avait complètement supprimé la fiscalité sur le patrimoine, ça aurait été plus lisible ». Quant à la baisse de 5 euros des APL, « accepter de s’y attaquer, c’est courageux, c’est peut-être maladroit, mais ça mérite qu’on s’y penche » reconnaît le sénateur d’Eure-et-Loir, pour qui « la question est de savoir si les APL sont parfois inflationnistes ».

Au Sénat, la majorité LR/UDI est en mesure de modifier le budget pour adopter sa propre version. Y aura-t-il pour autant un contre budget au Sénat ? Si les sénateurs ne peuvent pas, sur le plan légal, tout changer et partir d’une feuille blanche, ni adopter des amendements qui créent de nouvelles dépenses ou en suppriment – c’est le fameux article 40 de la Constitution, épée de Damoclès sur tout amendement déposé par un député ou sénateur  – ils ne restent pas les mains liées. « Comme toujours, on fera des propositions. (…) A ce stade, ça mérite une analyse et de regarder quelle est la position de la majorité. Mais ce n’est pas exclu. Il faudra sans doute qu’on corrige pas mal la copie… » prévient Albéric de Montgolfier.

Sa collègue de la commission des finances, la sénatrice LR du Bas-Rhin Fabienne Keller, est moins critique sur la question des économies que Bruno Retailleau. « Sur la question de la rigueur budgétaire, ça va dans le bon sens » affirme la sénatrice, sur une ligne constructive à l’égard de l’exécutif. « La maîtrise des dépenses publiques a été souhaitée par tous les candidats de la primaire de la droite et du centre » rappelle Fabienne Keller. « Mais sur les territoires, il y a un point de vigilance sur le plan financier » tempère-t-elle.

« On tape sur les plus modestes et de l’autre, on baisse l’ISF »

Le nouveau président PS de la commission des finances, Vincent Eblé, qui n’aura pas les mains libres face à la majorité de droite au Sénat, rejoint cependant l’inquiétude des sénateurs sur « les finances des collectivités territoriales ». Mais ce socialiste met en garde sur les économies qui ne devront pas « mettre à mal les services publics ». Xavier Iacovelli, nouveau sénateur PS des Hauts-de-Seine, a des mots plus durs. Il dénonce « un budget d’injustice sociale fait par quatre ultralibéraux, Emmanuel Macron, Edouard Philippe, Bruno Le Maire et Gerald Darmanin. On tape sur les plus modestes (…) et de l’autre, on baisse l’ISF. C’est un budget qui cherche des coupables : les fonctionnaires, les « fainéants », les « assistés » ».

Si les débats ne font que commencer à l’Assemblée et se préparent au Sénat, le premier ministre Edouard Philippe reste confiant. « Je crois au débat parlementaire et il n’y a aucune raison que ça ne se passe pas bien » a-t-il affirmé à Public Sénat à la sortie de la réunion de groupe des sénateurs LREM, ce mardi. Si la majorité sénatoriale revoit la copie gouvernementale, il est vrai que l’Assemblée, où l’exécutif dispose d’une écrasante majorité, aura le dernier mot. Mais les sénateurs pourront profiter du budget pour faire entendre leur propre musique.

Budget 2018 : « Aucune raison que ça ne se passe pas bien » au Sénat, juge Édouard Philippe
00:13

Partager cet article

Dans la même thématique

SIPA_01221444_000001
4min

Politique

Otages français en Iran : Cécile Kohler et Jacques Paris sont sortis de prison, mais « ils ne sont pas libres », précise l'avocate des familles

Cécile Kohler et Jacques Paris, détenus depuis mai 2022 en Iran suite à des accusations d’espionnage, « sont sortis de la prison d'Evin et sont en route pour l'ambassade de France à Téhéran », a annoncé Emmanuel Macron sur X. Les avocats des familles précisent qu'ils ne sont pas libres et toujours empêchés de regagner la France

Le

Paris : session of questions to the government at the Senate
10min

Politique

« Vexations », échanges « pas fluides », négos avec le PS : pourquoi la relation entre le Sénat et le gouvernement Lecornu s’est détériorée

Depuis « un mauvais départ », le courant passe mal entre la majorité LR-centriste du Sénat et le gouvernement. Discussions avec le PS au détriment des LR, députés invités à Matignon sans les sénateurs, qui aimeraient « être dans la boucle »… Les causes de fâcheries se multiplient. Pour tenter de retisser des liens dégradés, Sébastien Lecornu invite les présidents de groupe du Sénat à Matignon ce mercredi, avant de se rendre en conférence des présidents.

Le

Budget : le Sénat de droite devrait « corriger la copie » des députés
5min

Politique

« C’est à la fin de la partie qu’on comptera les choses » : sur le budget, les socialistes veulent encore laisser du temps au gouvernement

Les députés mettent en pause l’examen du projet de loi de finances pour étudier le budget de la Sécurité sociale. S’ils ne sont pas allés au bout de la partie recettes, ils ont néanmoins pu adopter un certain nombre de mesures absentes du projet initial. Certaines sont vues par le gouvernement comme des gains concédés aux socialistes, bien que ces derniers se montrent toujours insatisfaits. Pas suffisamment, pourtant, pour interrompre les négociations et l’examen budgétaire.

Le