Le budget n’a fait qu’un rapide et dernier aller/retour au Sénat, ce mardi. Le projet de loi de finances 2018 est en effet revenu en nouvelle lecture devant les sénateurs. Après l’échec prévisible de la commission mixte paritaire, lors de laquelle députés et sénateurs ont constaté leurs désaccords sur le premier budget d’Emmanuel Macron, le texte est repassé une dernière fois devant la Haute assemblée, comme le prévoit la procédure parlementaire.
Après les presque trois semaines de débats lors de la première lecture (voir le résumé), les sénateurs se sont épargné un nouveau débat, alors que les positions de chacun et de chaque assemblée sont connues. Le rapporteur général LR de la commission des finances, Albéric de Montgolfier, a déposé une motion opposant la question préalable sur le budget. Une arme de la procédure parlementaire qui permet de mettre fin au débat après la discussion générale. Elle a été adoptée par 197 voix de la majorité LR et UDI, contre 135 (PS, RDSE, LREM et groupe communiste). Ce qui revient à rejeter le texte.
« L’Assemblée nationale a rejeté bon nombre de nos initiatives »
Si certaines dispositions votées par les sénateurs ont été conservées par les députés, comme la hausse de la TVA sur le logement social, « L’Assemblée nationale a rejeté bon nombre de nos initiatives » a regretté le rapporteur du budget. Les députés ont rétabli la suppression de la taxe d’habitation, que les sénateurs avaient annulée. Sur l’ISF, que les sénateurs avaient supprimé totalement, les députés ont rétabli la version gouvernementale qui supprime en partie l’impôt. Ils sont aussi revenus sur le relèvement du quotient familial, tout comme sur l’instauration, votée par les sénateurs et remarquée, de trois jours de carence pour les fonctionnaires. Le texte du gouvernement prévoit déjà d’en rétablir un.
Les membres du Palais Bourbon n’ont pas non plus conservé la taxation des revenus supérieurs à 3.000 euros issus des plateformes collaboratives, comme Airbnb, ou l’idée d’une taxe sur les entrepôts des sites de vente en ligne, au profit des commerces de centre-ville.
« Orientation libérale »
Pour le groupe PS, la sénatrice du Val-de-Marne, Sophie Taillé-Polian, a dénoncé l’esprit globalement « d’orientation libérale » du texte du gouvernement. « Le premier de cordée monte toujours plus haut, (…) assuré par son capital financier, social et culturel, mais il laisse en bas celui qu’il accuse de ne pas être assez combatif pour grimper » selon la socialiste.
« Il est trop tard pour refaire le match » lance le sénateur LREM Julien Bargeton, en s’adressant aux sénateurs LR et UDI. Il fait dans la métaphore :
« La majorité sénatoriale a décidé de voter un PLF à la découpe : la fiscalité du capital, on prend. La réforme de la taxe d’habitation, on ne prend pas. La fiscalité des entreprises et la réforme du CICE, on prend. (…) Ça clignote un peu comme une guirlande de Noël mais ça sent hélas le sapin pour notre débat, victime d’une question préalable ».
Le sénateur LREM Richard Yung, qui s’est opposé au principe d’écourter les débats, y a vu une remise en cause même du Sénat. « Ça veut dire au fond, d’une certaine manière, que le Sénat n’existe pas, le Sénat ne compte pas. C’est ce que vous voulez voter, (…) ce sera interprété comme ça par le pays » met en garde le sénateur PS, sous les protestations de la droite. Réponse d’Albéric de Montgolfier : « Est-ce que les collègues qui s’apprêtent à voter contre la motion sont-ils prêts à venir en séance les 26 et 27 décembre ? Ou même le 24 ou le 25 au soir ? Je ne veux pas être tout seul… » Le secrétaire d’Etat Olivier Dussopt se prononce contre la motion « pour que le débat puisse se poursuivre ». Et ajoute, sourire en coin : « Je ne voudrais pas participer à gâcher les vacances du rapporteur général ». Le texte va faire un dernier retour devant les députés et qui auront le dernier mot… avant la trêve des confiseurs.