Sans recours à l’article 49.3 et sans majorité à l’Assemblée nationale, le débat budgétaire patine à l’Assemblée nationale et le rend incompréhensible pour ceux qui ne suivent pas assidûment les chaînes parlementaires. Cette semaine, la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet a lancé une mission afin de repenser l’organisation actuelle des débats sur le projet de loi de finances et du financement de la Sécurité Sociale.
Mais pour le sénateur Place Publique du Maine-et-Loire, Grégory Blanc, l’origine des dysfonctionnements se situe en amont et en aval de la procédure budgétaire. C’est pourquoi avec son collègue Bernard Jomier, il vient de déposer une proposition de loi sénatoriale visant à renforcer le contrôle budgétaire par le Parlement et le Haut Conseil des finances publiques.
Plusieurs mesures que l’élu a détaillé fin octobre dans une note publiée par la Fondation Jean Jaurès. « On assiste à une sorte théâtre d’ombres. On ne sait pas très bien où sont prises les décisions. Le budget est d’abord élaboré de manière administrative sans être pensé politiquement. Une fois qu’il sera adopté, le gouvernement reprendra la main lors de l’année en cours avec des gels et des sur gel de crédits pris sans contrôle parlementaire », diagnostique-t-il avant de rappeler que le rôle des Parlements est de décider de l’impôt, de son usage, de la manière dont la cité s’organise et dont les priorités collectives sont fixées ».
Renforcement du Haut Conseil aux finances publiques
Ce manque de transparence pointé ici, avait notamment conduit les sénateurs a lancé une mission d’information en 2024 pour rechercher les causes de la dégradation spectaculaire des déficits publics (lire notre article).
C’est pourquoi Grégory Blanc préconise de renforcer les prérogatives et les moyens du Haut Conseil aux finances publiques (HCFP), une autorité indépendante du gouvernement et du Parlement, placé auprès de la Cour des comptes et présidé par le premier président de la Cour des comptes. Son rôle est d’apprécier la sincérité des prévisions macroéconomiques, la cohérence des trajectoires de finances publiques et la conformité des lois de finances et de financement de la sécurité sociale aux engagements européens de la France.
Pour faciliter la mission du HCFP, Grégory Blanc, préconise de lui accorder « un accès élargi aux données de Bercy, notamment par la systématisation de la transmission des notes mensuelles et trimestrielles relatives aux recettes fiscales et aux prévisions macroéconomiques et de déficit public produites par les administrations ». Et pour que ses avis soient éclairants pour les parlementaires, le Haut Conseil ne doit pas être saisi quelques jours avant le dépôt du budget devant les deux chambres. C’est pourquoi, la proposition de loi préconise d’avancer la date de dépôt du budget auprès du Haut Conseil, « avant la fin de la première semaine de septembre ».
« Nous n’avons pas les mêmes capacités que le gouvernement pour faire des études d’impact », souligne l’élu, qui souhaite doter le Parlement d’une capacité de saisine du Haut Conseil des Finances Publiques « lorsque subsiste un doute sur la qualité de l’exécution budgétaire ».
Mise en place d’un nouveau projet de loi de finances d’équilibre (PLFE)
« Pour que le débat budgétaire fonctionne, il faut, certes, bien le préparer, mais aussi avoir un contrôle effectif en cours d’exécution budgétaire », ajoute-t-il. La proposition de loi introduit un nouvel avis du HCFP au printemps « sur la cohérence des dépenses et recettes avec les cibles fixées par la loi de finances initiale ». Si le Parlement à la possibilité de se prononcer sur un projet de loi de finances rectificative, le dispositif est jugé trop lourd pour le sénateur qui recommande de créer un nouveau véhicule législatif : un projet de loi de finances d’équilibre (PLFE). Un texte destiné à restaurer « l’équilibre macroéconomique, structurel, des comptes publics », ils « ne pourraient comporter que des mesures d’améliorations du solde budgétaire, en recettes comme en dépenses, limitant ainsi le risque d’ouvrir l’ensemble des champs comme c’est le cas avec un projet de loi de finances rectificative ».
Il n’est pas certain que la proposition de loi de Grégory Blanc figure dans la niche parlementaire de son groupe Les Ecologistes. Mais le débat est lancé. « Le pouvoir budgétaire est confus et dilué, la responsabilité politique n’est plus au gouvernement mais pas encore au Parlement, il faut savoir qui décide et qui est responsable.