"Là, je vous le dis, il faut se bouger!" En perte de vitesse dans les sondages, Jean-Luc Mélenchon a battu avec gravité le rappel de ses électeurs de 2017 pour les élections européennes de mai, jeudi à Saint-Brieuc dans un meeting commun avec la tête de liste de La France insoumise Manon Aubry.
Les enquêtes d'opinion continuent en effet d'être mauvais pour LFI, qui ne dépasse plus les 8% d'intentions de vote, loin des 19,58% de la présidentielle.
Alors devant 800 personnes, le chef de file des Insoumis a adopté un ton bien plus solennel que lors de son premier meeting à Caen, deux semaines auparavant: "C'est le moment de vous bouger! Ceux qui se bougent le moins, paraît-il c'est nous selon des sondages... Je ne sais pas si c'est vrai. Mais c'est le devoir pour moi de dire +Alerte+!"
"J'ai dit de ne pas attendre les consignes car les gens savent ce qu'il y a à faire. Mais là je vous le dis, il faut se bouger car c'est la même bataille qui fait déferler les +gilets jaunes+ et celle qui nous mène au scrutin, c'est la même séquence historique", a-t-il dit.
Dans la salle, Claudine, assistante maternelle de 45 ans, et son ami Charly, sculpteur de 55 ans, qui sont sûrs de voter LFI, pestent aussi: "La plupart des gens ne se sont pas encore posés la question de savoir pour qui voter, s'ils vont voter... Ils sont trop volatils!"
Régulièrement accusé par la majorité de jeter de l'huile sur le feu de la contestation sociale, Jean-Luc Mélenchon a tenu à souligner: "Nous croyons dans la démocratie. Avec la violence ce n'est jamais nous qui gagnons. Nous ne pouvons gagner que si la grande masse s'implique dans la décision".
Pour tenter de résoudre le paradoxe, existant peut-être chez des électeurs, d'appeler à voter pour des représentants au sein d'une Union européenne que l'on critique, il a expliqué: "Nous sommes 17 députés au sein de la Ve République que nous désapprouvons. La représentation politique fait partie de la démarche."
- "On n'a pas fait les imbéciles" -
Le patron du groupe insoumis à l'Assemblée nationale a réactivé l'idée de "référendum anti-Macron" en attaquant la liste LREM tout juste constituée: "Il y a la liste fourre-tout qui dit +Vous êtes écolo? Ca tombe bien j'en ai deux, vous voulez quelque chose d'autre? Je l'ai en magasin."
Le numéro 2 de cette liste, Pascal Canfin, a-t-il ajouté, "c'est un homme intelligent, sympathique, j'ai appris de lui (sur l'écologie). Mais que compte-il faire? Il dit une chose et va dans une liste qui va faire exactement l'inverse. Quand je lui parle désormais, est-ce que je parle à M. Canfin? Ou au masque de Mme Loiseau, qui elle-même est le masque de M. Macron, lui-même masque de Mme Merkel?"
Se justifiant de la stratégie solitaire de LFI, M. Mélenchon a aussi brocardé les tentatives d'union à gauche par Place publique, qui s'est soldée par une alliance avec le PS: "Rassemblement, rassemblement? Teu teu teu, ça dépend avec qui et pour quoi faire! (...) Je pense qu'on mérite votre confiance, on n'a pas fait les imbéciles, chaque fois qu'on a discuté, on regardait si on pouvait être d'accord sur le fond".
Manon Aubry avait plus tôt, à l'issue d'un plaidoyer pour la sauvegarde des services publics de santé, résumé l'argumentaire: "Faites d'un bulletin de vote trois coups: sanctionnez Emmanuel Macron, envoyez des parlementaires de combat, construisez l'alternative!"
Lorsqu'elle a passé la main sur scène à Jean-Luc Mélenchon, celui-ci lui a donné une longue accolade, lui rendant ensuite hommage comme pour montrer qu'il n'a pas pour but, avec son entrée en campagne, de l'éclipser: "On est fiers, hein? Les gens de ma génération, on n'a pas fait tout ça pour rien, la relève est assurée, qu'ils s'en prennent encore pour un siècle!"
"Elle est un peu surprise, on lui avait dit +Tu vas voir il y a un excité, il contrôle tout+, et là c'est l'inverse c'est elle qui me court après, qui me dit +Qu'est-ce que tu fais?+ Moi j'ai autre chose à faire, ma grande!", s'est-il amusé.