Entre les cantines sans viande et la polémique sur l’« islamo-gauchiste », les couacs à répétition polluent la communication du gouvernement. Pour le patron des sénateurs LREM, François Patriat, ce n’est pas le « moment ». Mais le porte-parole des députés LREM, Sylvain Maillard, relance le débat et soutient qu’« il y a une sorte d’entrisme islamiste dans les universités ».
Cantines, « islamo-gauchisme » : François Patriat « ne comprend pas l’attitude des ministres qui lancent des polémiques inutiles »
Entre les cantines sans viande et la polémique sur l’« islamo-gauchiste », les couacs à répétition polluent la communication du gouvernement. Pour le patron des sénateurs LREM, François Patriat, ce n’est pas le « moment ». Mais le porte-parole des députés LREM, Sylvain Maillard, relance le débat et soutient qu’« il y a une sorte d’entrisme islamiste dans les universités ».
Couac, fausse note, polémique, cacophonie, bazar… Les différends, en politique, ne sont pas rares. Mais quand ils se répètent, le message se brouille. Après un certain calme, la majorité présidentielle, qui avait déjà donné, a visiblement décidé de s’y remettre. On attendait des difficultés sur le texte sur le séparatisme. Le groupe LREM a réussi à traverser sans trop d’encombre cette zone de possibles turbulences, pour finalement se prendre les pieds dans une histoire de cantine. Et il y a du rab.
Comme on le sait, après la décision de la mairie de Lyon d’instaurer un menu sans viande à la cantine, le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, a vertement critiqué la décision du maire EELV, tout comme le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avant que leur collègue (et ex-EEVL) de la Transition écologique, Barbara Pompili, dénonce des « débats préhistoriques » et défende l’intérêt des menus sans viande, tout comme le ministre de la Santé, Olivier Véran.
Quelques semaines avant la polémique, un proche de la ministre de la Transition écologique l’encourageait justement à s’affirmer. « Je lui conseille de jouer le rapport de force, en tant que seule personnalité politique écologique du gouvernement » expliquait-il, estimant que « Barbara a un boulevard. Car elle a un sujet essentiel ». Message visiblement entendu par la ministre.
« Je ne sais pas pourquoi le gouvernement se viande sur ce sujet… »
Reste que Matignon se serait bien passé de ces divergences. Nicolas Revel, le directeur de cabinet de Jean Castex, a écrit aux membres du gouvernement pour leur demander d’arrêter de nourrir la machine à baffes. « Le sens du mail, c’était moins on fait de polémique, mieux on se porte » rapporte un conseiller ministériel, qui préfère encore en rire : « Je ne sais pas pourquoi le gouvernement se viande sur ce sujet… » « On s’est un peu tiré une balle dans le pied. C’est quand même très con » résume le même.
Le 4 février dernier, Matignon avait tenté de mieux contrôler la com' gouvernementale, demandant aux ministères, dans un message envoyé via une boucle Telegram, une coordination plus forte, avec relecture par Matignon des interviews. Il a aussi été demandé aux ministres de ne pas faire de matinale ou d’interview les jours de déplacement du Président ou du premier ministre, pour ne pas polluer le message. « Mais des ministres ne l’appliquent pas » glisse-t-on… Le 15 février, changement de consigne et fin de la validation des entretiens par Matignon, qui n’a pas encore trouvé la formule anti-couac.
« Ce sont les journalistes qui font monter la chose », selon Julien Denormandie
Invité ce matin de la matinale de Public Sénat, Julien Denormandie minimise la polémique sur les cantines. « Barbara Pompili (pose la question) est-il possible de donner des menus végétariens équilibrés ? La loi Egalim prévoit déjà de pouvoir offrir des menus végétariens une fois par semaine […] C’est très différent ce débat-là, ce sont les journalistes qui font monter la chose », soutient le ministre. Regardez :
Le président du groupe RDPI (LREM), François Patriat, apprécie peu la polémique. Ce fidèle macroniste accompagnait mardi Emmanuel Macron pour un déplacement dans son département de la Côte-d’Or, lors d’une « visite d’une ferme qui coche toutes les cases en termes de diversification, de circuit court et de renouvelable ». L’ancien ministre de l’Agriculture est totalement « sur la position de Julien Denormandie, qui a dit que c’était insensé d’avoir tous les jours des repas sans viande ». Le patron des sénateurs LREM n’hésite pas à dénoncer les désaccords exposés publiquement entre membres du gouvernement : «
Je ne comprends pas l’attitude des ministres qui lancent des polémiques inutiles, au moment où nous sommes focalisés sur le covid-19, l’économie et le social. On est dans une situation difficile, il y a des morts tous les jours, des difficultés sanitaires, est-ce que c’est la priorité ?
Pour François Patriat, « on peut débattre de ça, mais à un moment où les gens ne sont pas fatigués ou ne souffrent pas. On peut repousser ce genre de débat à un moment plus serein ».
« Hugues Renson a tort d’envenimer le débat »
Du côté du Palais Bourbon, le vice-président LREM de l’Assemblée, Hugues Renson, responsable d’En Commun avec Barbara Pompili, a carrément demandé la démission du porte-parole d’En Marche, Jean-Baptiste Moreau, éleveur de profession. Ce dernier avait attaqué la ministre. « Le pragmatisme comme l’amour de la science et la loyauté sont des concepts qui vous sont étrangers » avait lancé le député LREM…
« A l’évidence, il ne peut plus rester », affirme à Chez Pol, la newsletter de Libération, Hugues Renson, dénonçant « la violence et la grossièreté de son attaque comme le choix de ses mots, qui sont absolument inacceptables ». Une vindicte qui passe mal.
« C’est une réaction un peu sanguine. Il n’y a pas de personnes qui doivent faire taire les autres. Chacun a le droit à la parole », rétorque à publicsenat.fr Sylvain Maillard, député et porte-parole du groupe LREM de l’Assemblée. « Quand vous dites que c’est un débat préhistorique, c’est très dénigrant. Il y a des propos un peu excessifs des deux côtés ».
« Jean-Baptiste Moreau a raison je pense. Hugues Renson n’a pas à apporter un jugement sur ce sujet qu’il connaît moins bien » soutient aussi François Patriat, qui ajoute : « Hugues Renson a tort d’envenimer le débat. Il veut exister. Mais on n’existe pas en voulant se démarquer à tout prix. J’ai connu comment faisaient les frondeurs à l’époque. Ce n’est pas une méthode. On ne doit pas se déchirer là-dessus ».
« La ministre de l’Enseignement supérieur doit plutôt prêter son attention à la politique de soutien aux étudiants »
L’autre polémique, c’est évidemment celle qui fait suite aux propos de la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, sur le rôle que jouerait « l’islamo-gauchiste » à l’université. Des propos qui sont très mal passés au sein même de la conférence des présidents d’université et du CNRS, qui a fortement critiqué sa ministre.
Au sein de la majorité, le sujet divise encore. « Je pense que la ministre de l’Enseignement supérieur doit, en ce moment, plutôt prêter son attention et toutes ses forces pour poursuivre la politique de soutien aux étudiants », estime François Patriat, avant d’ajouter : « A Pouilly-en-Auxois, je ne crois pas qu’on me parle d’islamo-gauchiste, ni de repas sans viande, mais de vaccination et du covid ». Autrement dit, il faut se concentrer sur les sujets concrets.
Dans une tribune publiée dans Le Monde, plusieurs ministres, députés et proches d’Emmanuel Macron, dont le numéro 1 de LREM, Stanislas Guerini, Cédric O, Agnès Pannier-Runacher, Adrien Taquet, Elisabeth Moreno et Stéphane Sejourné, tentent de remettre les choses à plat. Ils y dénoncent une polémique « stérile » entre deux « camps », « anti- « islamo-gauchisme » d’un côté, pro- « intersectionnalité » de l’autre ». Un débat où « les anathèmes remplacent les arguments ». « Ce clivage est également délétère : à s’écharper ainsi sur les plateaux télé, on passe tout simplement à côté de la vie quotidienne, beaucoup moins faite d’intersectionnalité et/ou d’« islamo-gauchisme » que de discriminations pures et simples » ajoutent-ils.
« Il y a une sorte d’entrisme islamiste dans les universités », selon Sylvain Maillard
A l’inverse, Sylvain Maillard remet lui une (grosse) pièce dans la machine. Il soutient à fond la ministre. « On vient de voter une loi qui dit clairement les choses. On voit bien qu’il y a un souci dans les universités. Ne refermons pas tout de suite le chapitre. Il y a un débat sur un terme, mais allons au bout des choses. Il y a une sorte d’entrisme islamiste dans les universités. C’est important de bien réfléchir à ça. La ministre l’a bien expliqué », soutient le porte-parole des députés LREM. Sylvain Maillard estime que « certains travaux font en sorte de valider des idées contraires à celle de la République. C’est assez logique que la République se défende. On doit pouvoir regarder ce qui se passe ». Des propos qui devraient encore susciter la colère du monde des enseignants-chercheurs…
On le voit, difficile de clore les polémiques. Mais la majorité va peut-être trouver bientôt un nouveau terrain pour s’écharper. « La loi sur la convention climat va vous donner beaucoup d’exemples de couacs », prédit un conseiller, « il y a autant d’articles que de merdes possibles. Et on peut compter sur Renson et Pompili pour animer un peu le débat… »
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