Après le référendum d’indépendance du dimanche 1er octobre où le oui l’a emporté à 90%, la Catalogne est toujours en crise. Une grève générale est organisée à l’appel des syndicats, ce mardi 3 octobre, dénonçant les violences policières au moment du vote. Mais pourquoi cette crise éclate-t-elle aujourd’hui ?
Benoît Pellistrandi, historien, spécialiste de l’Espagne et invité d’ « On va plus loin », explique : « Il y a quelque chose de très curieux qui est en train de se passer en Catalogne, qui vient d’abord d’une recomposition des forces politiques (…) Le Parti socialiste qui était toujours très fort, s’est effondré. [Il] était l’un des bras d’articulation entre la Catalogne et le niveau national (…) Du coup d’autres forces sont arrivées sur le devant de la scène et notamment la Couple (Candidature d’unité populaire) qui est un parti radical d’extrême gauche, tout à fait indépendantiste et qui sert d’aiguillon à cette coalition des deux nationalismes historiques : le nationalisme de centre droit (…) et le nationalisme de gauche républicaine (…) Dans la construction du bras de fer, la cause indépendantiste est devenue un but en soi, alors qu’au départ, elle était plus, pour certains, un instrument de la négociation ».
Une riposte du côté madrilène
Mais que va-t-il se passer concrètement ces prochains jours après cette victoire au référendum ? « Il y a une session parlementaire mercredi prochain et au cours de cette session, le gouvernement catalan informera des résultats du référendum » détaille l’historien, qui poursuit : « On pense, ce n’est pas encore confirmer, que la proclamation unilatérale interviendra le 6 octobre (…) La logique veut que l’on aille jusqu’à cette déclaration d’indépendance (…) Et il y aura ensuite une riposte du côté madrilène ».
Pour Benoît Pellistrandi, cette riposte se traduirait par un débat au Sénat et un vote. Et si ce vote était positif, cela suspendrait l’autonomie de la Catalogne et on passerait par un gouvernement depuis Madrid. « Si on en arrivait là, ce serait extraordinairement grave. Mais le gouvernement de Madrid le ferait pour convoquer de nouvelles élections régionales. Cela voudrait dire que toute la classe politique catalane, notamment le gouvernement, serait invalidée juridiquement » prévient le spécialiste de l’Espagne. « Il y a une solution sur le plan constitutionnel, mais sur le plan politique, la situation est vraiment de l’ordre de l’impasse » ajoute-t-il.
« On a déversé tellement de discours de haine, de violence (…) que tous les éléments sont réunis pour un conflit civil qui aujourd’hui prend la forme d’un conflit politique mais qui, si par malheur des incidents se multipliaient, pourrait à ce moment-là déboucher sur un conflit beaucoup plus violent » prévient l’historien.
La crise en catalogne expliquée par l'historien Benoît Pellistrandi (OVPL entretien en intégral)
Entretien OVPl de Benoît Pellistrandi, en intégral