Catherine Fournier : « Il faut relocaliser la production de médicaments »

Catherine Fournier : « Il faut relocaliser la production de médicaments »

La crise du coronavirus a aggravé la pénurie de médicaments en France. La sénatrice centriste du Pas-de-Calais, Catherine Fournier, a été missionnée par son groupe politique pour réfléchir à la manière de pallier ce manque à l’avenir. Elle propose de relocaliser la production sur le territoire.  
Public Sénat

Par Cécile Sixou

Temps de lecture :

3 min

Publié le

Mis à jour le

« Il y a 10 ans , il manquait 40 médicaments en France , aujourd’hui c’est plus de 400 ». Les pénuries de médicaments, c’est un thème que la sénatrice centriste du Pas-de-Calais, Catherine Fournier, connaît bien. Pour elle, la crise du coronavirus a aggravé ce manque, elle réfléchit depuis un mois à la manière de relocaliser la production en France. Il faut que « notre pays  soit indépendant » en matière de production de médicaments. «Cette crise sanitaire montre que nous manquons pratiquement de tout, on est tributaire d’une chaîne de production qui est à 80% en dehors de l’Europe ». Un marché phagocyté par la Chine, les États-Unis et l’Inde qui fabriquent 80% des principes actifs commercialisés en Europe, « quand la Chine a arrêté sa production à cause de la crise, ça a eu un effet boule de neige, on avait beau leur réclamer, il n’en avait plus pour nous ».

L’État doit reprendre la main

Si la France est dépendante , c’est parce qu’elle a progressivement perdu son industrie pharmaceutique estime la sénatrice, « on a tout perdu pas seulement en France, mais aussi en Europe ». Dans son département, deux sites ont fermé, « ça a pris 10 ans et le dernier a arrêté sa production il y a 6 ans ». Désormais il resterait une soixantaine de lieux de production sur le territoire, presque rien comparé au reste du monde. Les normes environnementales européennes, trop contraignantes, y sont pour beaucoup d’après la sénatrice,  « les usines ont été délocalisées parce qu’elles sont polluantes, elles sont souvent classées Seveso ». Mais ce n’est pas tout, la rentabilité économique est plus intéressante à l’étranger où les normes  sociales et fiscales sont moins exigeantes. « Nous ne sommes pas dans un monde de bisounours, nous sommes dans un monde virulent, celui de la finance ». La sénatrice reconnaît la puissance des lobbys pharmaceutiques, et des états qui dominent le marché. « Comment voulez-vous négocier avec la Chine, si vous n’avez plus de produit, si vous n’avez rien dans la balance, plus aucun pouvoir ». Mais il faut, selon elle, que l’État reprenne la main sur ce secteur et revoit sa politique industrielle, « on est sur un sujet vital, si les états n’arrivent pas à les défendre, c’est dramatique ».

L’outil de production « toujours là »

La sénatrice propose notamment de relocaliser la production en France.  « L’industrie de la santé n’est pas un secteur économique comme un autre, c’est un secteur essentiel comme peut l’être l’énergie ». Elle appelle l’État à négocier avec les industries pharmaceutiques  pour qu’elles relocalisent,  soit en les « incitant » mais aussi en les « forçant » . Elle propose par exemple de conditionner la mise sur le marché d’un médicament à sa production sur le sol français ou européen. « Quand on donne l’autorisation de mise sur le marché d’un médicament, c’est l’État qui paye, c’est la sécurité sociale, ça peut être un levier de négociation». Elle estime par ailleurs que la France pourrait rapidement relancer la production. « Dans ma région, l’outil de production a été abandonné mais il est toujours là ». L’usine qui a fermé il y a 6 ans pourrait après rénovation repartir, « on a des potentialités, les friches existent, il faut juste se les réapproprier ».  

Dans la même thématique

Catherine Fournier : « Il faut relocaliser la production de médicaments »
3min

Politique

Dissuasion nucléaire française élargie : « Impossible d’imaginer qu’il y ait 27 doigts sur un bouton »  pour Bernard Guetta

L’heure est à l’urgence pour les Européens. Dans un climat mondial tendu, avec les décisions américaines de ne plus participer massivement à la protection des Européens, les dirigeants des États membres de l’Union convergent vers l’idée d’une défense européenne commune, et surtout, d’un réarmement massif. À quoi correspondent les 800 milliards promis par la Commission européenne ? Pour quels achats ? Quid de l'élargissement de dissuasion nucléaire française aux autres pays européens ? Caroline de Camaret et Alexandre Poussart ouvrent le débat dans Ici l’Europe avec l’eurodéputé français Bernard Guetta, et l’Allemande Hannah Neumann du parti des Verts.

Le

Taxe Zucman : après les députés, les sénateurs écologistes à l’offensive sur le projet d’impôt de 2 % sur la fortune des plus riches
6min

Politique

Taxe Zucman : après les députés, les sénateurs écologistes à l’offensive sur le projet d’impôt de 2 % sur la fortune des plus riches

La proposition de loi des députés écologistes, adoptée en février à l’Assemblée nationale, sera inscrite dans le prochain espace réservé de leurs homologues sénateurs. Inspiré des travaux de l’économiste Gabriel Zucman, le texte instaure un impôt plancher de 2 % sur le patrimoine des « ultra-riches ». Ses chances d’adoption au Sénat sont très minces, mais ses partisans espèrent convaincre.

Le

Catherine Fournier : « Il faut relocaliser la production de médicaments »
3min

Politique

Réarmement : « Je pense que la Russie n’est pas une menace pour le territoire français », estime Éric Coquerel

Invité de la matinale de Public Sénat, le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, Éric Coquerel revient sur la réunion à Bercy pour financer l’industrie de la défense. Si l’insoumis reconnaît une réflexion nécessaire, il estime cependant que la Russie ne représente pas une menace existentielle pour la France. Par ailleurs, le député demande au gouvernement d’organiser un débat avec vote au Parlement sur le sujet du réarmement.

Le