Ce qu’il faut retenir du premier Conseil des ministres du nouveau gouvernement Borne
Tout juste nommé, le nouveau gouvernement d’Elisabeth Borne tenait lundi après-midi sont premier Conseil des ministres. Cinq textes de loi ont été présentés, dont l’un sur la prolongation de certaines dispositions d’urgence face au covid-19. Il sera le premier projet de loi du nouveau quinquennat à être débattu au Parlement.
L’équipe est en place, maintenant le plan d’action. Le gouvernement remanié d’Élisabeth Borne a été présenté ce lundi matin. Une petite vingtaine de personnalités ont rejoint les rangs de l’exécutif pour une équipe gouvernementale élargie à 41 membres. Ministres, ministres délégués et secrétaires d’Etat se sont retrouvés quelques heures plus tard, en milieu d’après-midi, dans la salle des fêtes du palais de l’Elysée pour un premier Conseil des ministres autour du chef de l’Etat. Emmanuel Macron, qui avait promis de mettre en place un « gouvernement d’action » après des législatives qui l’ont privé de majorité absolue à l’Assemblée nationale, a évoqué « une période exceptionnelle, compte tenu d’une situation politique qui impose au gouvernement beaucoup de volontarisme et d’ambition ».
Lors de son propos liminaire, que la presse a été autorisée à filmer, le président de la République a acté la faillite des consultations menées par Élisabeth Borne la semaine dernière auprès des principaux partis d’opposition, leur renvoyant la responsabilité de cet échec. « La Première ministre m’a rendu compte vendredi du résultat des consultations. Il convient de prendre acte de l’absence de volonté des partis de gouvernement de participer à un accord de gouvernement ou à toute forme de coalition », a-t-il déclaré. Dans ce contexte, Emmanuel Macron, qui devra manœuvrer au cas par cas, texte par texte, s’il veut continuer à réformer, a appelé les membres du gouvernement à faire preuve d’un « esprit de responsabilité pour bâtir des compromis exigeants ».
Lors de ce Conseil des ministres, le président de la République a aussi insisté sur le contexte international et « la guerre revenue sur le sol européen, qui frappe d’abord l’Ukraine, mais est aussi au cœur de conséquences profondes pour notre société ». Et le chef de l’Etat de marteler : « Vous aurez d’abord à tenir. Tenir dans ce contexte de guerre, qui change en profondeur beaucoup de choses, et je pense que cela n’a pas été assez intégré dans le débat public français. »
Élisabeth Borne ne se soumettra pas à un vote de confiance
« La Première ministre ne sollicitera pas la confiance des parlementaires. Il y aura une discussion de politique générale suivi de débat, mercredi à 15 heures à l’Assemblée nationale, et puis en soirée au Sénat », a indiqué Olivier Véran, le nouveau porte-parole du gouvernement, lors de la traditionnelle conférence de presse qui suit le Conseil des ministres. Une situation rare sous la Ve République, mais qui n’a rien d’inédite après la nomination d’un nouveau Premier ministre. En leur temps, Raymond Barre, Georges Pompidou, Michel Rocard ou encore Édith Cresson se sont passés du vote de confiance.
« Nous avons fait un décompte a priori du nombre de voix qu’elle aurait été sûre de recueillir en cas de vote de confiance, mais nous ne sommes pas certains que les conditions de cette confiance auraient été réunies », a encore indiqué Olivier Véran. « La confiance ne se décrète pas a priori. Elle se construit texte après texte », a-t-il ajouté.
Le cas Damien Abad
Interrogé sur le départ de Damien Abad, transfuge LR visé par une enquête pour tentative de viol, Olivier Véran a estimé que le désormais ex-ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées n’était plus en mesure d’assurer « sereinement » ses fonctions. « Dans le cas de Damien Abad, les conditions de sérénité n’étaient plus présentes pour permettre à un ministre qui porte, dans son portefeuille, toutes les politiques de solidarité, d’exercer pleinement ses fonctions. Cela aurait été l’exposition aux foudres à chaque entrée au Parlement, et beaucoup d’investissement consacré à sa défense », a-t-il expliqué.
Olivier Véran répond aux critiques sur la parité
Le nouveau gouvernement compte 21 femmes (en incluant la Première ministre) et 21 hommes. Mais elles ne sont que cinq à être ministres de plein droit. Une situation pointée du doigt par certains membres de l’opposition, qui dénoncent une parité de façade. « Vous avez une femme Première ministre, une présidente de l’Assemblée nationale pour la première fois, une femme présidente du groupe majoritaire pour la première fois, vous avez cinq vice-présidentes sur six postes à l’Assemblée nationale et 21 femmes sur 41 membres du gouvernement », a énuméré Olivier Véran. « Ne regardez pas le positionnement des différents portefeuilles. Vous pouvez être ministre délégué après avoir été ministre de plein exercice, ce qui compte c’est la mission qui vous occupe et pour laquelle vous avez été nommé. Aucune mission n’est moins importante qu’une autre, donc oui, ce gouvernement est paritaire », a-t-il défendu.
Cinq textes ont été représentés lors de ce Conseil des ministres
Le premier texte porte sur l’urgence sanitaire avec un projet de loi pour prolonger certaines mesures d’urgence, nommant le logiciel Sidep - qui permet d’enregistrer les résultats des laboratoires de tests covid -, jusqu’au 31 mars 2023. « Un autre article propose aussi, si nous devions faire face à un nouveau variant, de pouvoir rétablir un système de passe aux frontières ou entre les territoires métropolitains et l’Outre-mer », a expliqué Olivier Véran. Ce texte sera le premier du quinquennat à arriver sur le bureau de l’Assemblée nationale. La France doit sortir de l’état d’urgence sanitaire le 31 juillet, avec cette sortie doit s’éteindre une partie des dispositifs d’exception mis en place pour faire face à la crise sanitaire.
Bruno Le Maire et Gabriel Attal ont présenté un projet de loi de finances rectificatives. Il intègre certaines dépenses débloquées en 2021 pour faire face au covid-19, tout en tenant compte de la baisse du taux de chômage, d’une croissance record à 6,8 % en 2021 et de recettes fiscales « meilleures que prévues ». « Notre objectif : aller vers une stabilisation de la dette à compter de 2026, et atteindre un déficit en dessous des 3 % du PIB dès 2027 », a rappelé Olivier Véran. Par ailleurs, le paquet de mesures promises pour lutter contre l’inflation devrait être dévoilé jeudi, lors d’un autre Conseil des ministres.
Catherine Colonna, la ministre des Affaires étrangères, a présenté projet de loi qui permet la ratification d’un traité franco-italien, « texte qui vise à approfondir et structurer la relation de la France et de l’Italie dans plusieurs secteurs », a résumé le porte-parole du gouvernement.
Le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, a quant à lui présenté un projet de loi pour acter la création d’un nouveau code, consacré aux prisons, dont il centralise l’ensemble des textes de loi. « Toutes les dispositions en rapport avec le fonctionnement des prisons, jusqu’ici éparpillées dans plusieurs textes, se retrouvent simplifiées dans ce code », a indiqué Olivier Véran.
Enfin, la première ministre Élisabeth Borne a présenté un décret relatif aux renseignements et à la lutte contre le terrorisme, consacré à « l’attractivité et à la fidélisation des personnes qui travaillent dans le secteur du renseignement. Il va également permettre d’encourager la mobilité entre les différents services », a fait valoir le nouveau porte-parole du gouvernement.
Après avoir été présenté en conseil des ministres ce mercredi 11 décembre, le projet de loi spéciale sera examiné à l’Assemblée nationale à partir du 16 décembre et au Sénat en milieu de semaine prochaine. Cet après-midi, les ministres démissionnaires de l’Economie et du budget ont été entendus à ce sujet par les sénateurs. « La Constitution prévoit des formules pour enjamber la fin d’année », s’est réjoui le président de la commission des Finances du Palais du Luxembourg à la sortie de l’audition.
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Olivier Faure, le Premier secrétaire du PS, réclame un Premier ministre de gauche, alors que LFI refuse de se mettre autour de la table pour travailler sur la mise en place d’un gouvernement, préférant pousser pour une démission du chef de l’Etat. Ce mercredi, députés et sénateurs PS se sont réunis alors que le nom du nouveau chef de gouvernement pourrait tomber d’un instant à l’autre.
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