Chantiers de l’Atlantique : le Sénat presse le gouvernement d’abandonner son projet de cession

Chantiers de l’Atlantique : le Sénat presse le gouvernement d’abandonner son projet de cession

Une nouvelle fois le Sénat déplore « l’enlisement » de l’accord de cession des Chantiers de l’Atlantique au groupe italien Fincantieri. Les parlementaires appellent le gouvernement à abandonner ce projet de rachat « contraire à l’intérêt économique et souverain du pays ».
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C’est un dossier qui traîne depuis quatre ans. En 2017, la faillite du groupe coréen STX, alors actionnaire majoritaire des Chantiers de l’Atlantique avait conduit l’Etat à opérer une renationalisation temporaire de ce fleuron de l’industrie navale. Par l’achat de 80 millions d’euros des titres de STX, l’Etat devenait actionnaire majoritaire avec 84 % du capital. La meilleure solution pour conduire les négociations avec le géant italien de la construction navale, Fincantieri, auteur de la seule offre de reprise.

Cette renationalisation avait été saluée au Sénat à droite comme à gauche. Mais depuis à la Haute assemblée, on s’accorde à dire que la situation tourne à « l’enlisement ». Depuis un peu plus d’un an, la cession pour un montant de 79,5 millions d’euros est suspendue aux investigations de la Commission européenne sur la conformité de l’opération au regard du droit de la concurrence. Faute d’avoir obtenu le feu vert de Bruxelles, le 30 décembre dernier, la France a prolongé pour la cinquième fois l’accord de cession des Chantiers de l’Atlantique.

15 jours pour voir l’offre italienne tombée

« Le constructeur italien n’a pas répondu aux interrogations des autorités européennes portant sur les engagements qu’il serait prêt à consentir en cas de rachat des Chantiers de l’Atlantique » estime, dans un communiqué, Sophie Primas présidente LR de la commission des Affaires économiques et auteure d’un rapport en octobre dernier sur le projet de cession des Chantiers de l’Atlantique.

Contactée par publicsenat.fr, la sénatrice des Yvelines se dit extrêmement surprise de la décision du gouvernement d’avoir prolongé pour un mois supplémentaire l’accord de cession alors qu’il avait une porte de sortie le 30 décembre dernier. « Si dans quinze jours, la commission européenne n’a pas donné son accord. La cession tombe. Et on pourra alors étudier officiellement l’offre d’un autre repreneur » met-elle en avant.

« Une alerte pour notre savoir-faire européen »

Car au Sénat, on s’inquiète vivement de voir aboutir « cet accord obsolète » selon l’avis du sénateur écologiste de Loire-Atlantique, Ronan Dantec. « Je n’ai rien contre les grandes entreprises européennes, c’est le sens de l’Histoire. Mais il y a une trop grande perméabilité entre Fincantieri avec les constructeurs chinois » souligne-t-il.

Fincantieri a effectivement créé avec China State Shipbuilding Corporation (CSSC) une coentreprise de production de paquebots en Chine, en acceptant au passage un transfert de technologies. « C’est une alerte pour notre savoir-faire européen », abonde Sophie Primas. La crise économique du covid-19 a également mis en lumière la nécessité pour la France de garder la main sur son industrie. Avec des carnets de commandes pleins pour les 10 prochaines années, les chantiers navals génèrent plus de 9 000 emplois directs et indirects. Sans compter les enjeux stratégiques, en 2025 le futur porte-avions nucléaire commencera sa construction aux Chantiers de l’Atlantique de Saint-Nazaire.

Alors pourquoi le gouvernement est toujours tourné vers l’offre Fincantieri ? « Il y a un aspect diplomatique entre la France et l’Italie qui rentre en ligne de compte. Mais ce n’est pas une raison pour prendre en otage les Chantiers de l’Atlantique », estime Yannick Vaugrenard, sénateur PS de la Loire-Atlantique.

D’autant que dans son rapport présenté en octobre, la commission des Affaires économiques du Sénat présentait plusieurs propositions à l’attention du gouvernement. Comme une implication plus importante de « l’écosystème économique local », en développant ce que les parlementaires nomment un « capitalisme territorial », qui comprendrait la participation des entreprises et collectivités locales au projet.

« La solution régionale » plébiscitée par le Sénat

« Ce ne serait pas délirant que la région Pays de la Loire qui a la compétence économique, puisse prendre une participation. C’est ce que l’Ile-de-France a commencé à faire avec la SEM (société d’économie mixte) », relève Sophie Primas. « La solution régionale mérite d’être exploitée mais pas uniquement les Pays de la Loire, la Bretagne aussi », appuie Ronan Dantec qui met en avant le savoir-faire du chantier naval de Brest.

« Nous ne comprendrions pas que ce fleuron industriel ne soit pas conservé », conclut Yannick Vaugrenard qui confie avoir examiné au Sénat il y a quelques semaines, une offre « sérieuse et crédible » d’un repreneur français.

 

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