L’élection du nouveau chancelier Friedrich Merz a été compliquée, élu au second tour du vote du parlement allemand, une première de l’histoire de la République fédérale allemande. La grande coalition CDU-SPD est apparue plus fragile que prévu, avec peu de marges de manœuvre. Dans le même temps, le désengagement des États-Unis et la menace d’une guerre avec la Russie obligent le couple franco-allemand à se renforcer.
Une élection compliquée pour Merz
L’élection du nouveau chancelier, du parti conservateur de la CDU, n’a pas été évidente. Pour Tobias Cremer, eurodéputé social-démocrate au Parlement européen et membre du SPD en Allemagne, « ce n’était pas un départ idéal. C’est irresponsable de la part de ceux qui ont voté contre ». L’eurodéputé allemand, membre de Renew Europe et du FDP allemand, Jan-Christoph Oetjen, abonde : « C’est un mauvais départ. Ça montre qu’il y a des oppositions au sein de cette nouvelle coalition, qu’ils ne sont pas d’accord avec tout ce qui a été discuté ».
Un impact négatif sur le couple franco-allemand ?
L’Allemagne et la France représentent l’équivalent de 40% du PIB de l’Union européenne. Le tandem « Merzcron », d’Emmanuel Macron et Friedrich Merz, semble être obligé de fonctionner. « C’est un nouveau couple où on espère qu’il durera un certain temps, pour qu’il puisse faire avancer les choses en Europe » estime Jan-Christoph Oetjen. Christophe Gomart, eurodéputé français, du Parti populaire européen, affirme qu’avant d’arriver au Parlement européen, le couple franco-allemand était pour lui « quelque chose qui n’existait pas vraiment ». « Mais en arrivant au Parlement, des collègues de petits pays sont venus me voir en me disant ‘Il faut que la France et l’Allemagne s’entendent sinon l’Europe n’avance pas’ », analyse-t-il.
Selon Tobias Cremer : « Je crois qu’ils n’ont pas le choix, ils doivent se comprendre. Le chancelier Merz a fait sa première visite à Paris, ce qui est un bon signe… On n’a pas le choix, on a besoin du couple franco-allemand ».
Les Allemands, « réalistes et pragmatiques », investissent
Face aux menaces de la Russie, l’Allemagne a sorti un « bazooka » d’investissements de 1 000 milliards d’euros, destinés aux infrastructures et à la défense, mais les libéraux allemands sont opposés à ces dépenses massives. Jan-Christoph Oetjen, membre du FDP, explique : « Ce qu’a fait ce nouveau gouvernement, au lieu de voir où l’on peut réduire les dépenses, c’est de financer tous ces investissements avec une dette. C’est du jamais-vu en Allemagne. On était critiques par rapport à cette dette, mais pas par rapport aux investissements ».
Tobias Cremer ajoute : « On est réaliste et on est pragmatique. Je suis transatlantiste, mais je vois qu’il y a une administration américaine qui essaye de quitter cette alliance ».
La France, plus endettée, n’a pas les moyens de réaliser de tels investissements. De quoi recevoir des leçons de rigueur budgétaire par l’Allemagne ? D’après Christophe Gomart, « il est nécessaire que la France en ait, parce qu’on ne peut pas continuer à s’endetter à cette vitesse ».
L’Allemagne et la France comme ciment d’une Europe renforcée militairement ?
Emmanuel Macron préconise d’être plus indépendant vis-à-vis des Américains et de soutenir plus massivement l’Ukraine avec des garanties de sécurité. Outre-Rhin, Jan-Christoph Oetjen n’est « pas sûr que l’on arrive sur des lignes politiques françaises », mais pense « qu’il est nécessaire de converger plus ».
Pour Christophe Gomart : « On est à un moment de choix pour la France et l’Allemagne comme pour l’Union européenne, face à l’impérialisme russe, très visible dans son agression totale de l’Ukraine ». Face à l’isolationnisme et au désengagement américain, « il est nécessaire que la France et l’Allemagne prennent le lead d’une Europe renforcée. Quand on parle d’industrie de défense, l’Allemagne entend ‘industrie’ et la France entend ‘défense’. On doit se coordonner, se rejoindre sur ce point-là », conclut-il.
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