L'Assemblée nationale a approuvé mardi une ultime fois la ratification des ordonnances réformant le Code du travail, première grande réforme sociale du quinquennat Macron, après un baroud d'honneur de la gauche de la gauche.
Le Parlement adoptera définitivement le projet de loi de ratification par un dernier vote du Sénat, prévu le 14 février. Cela donnera une valeur législative aux ordonnances prises par le gouvernement en septembre et qui sont déjà applicables, tous les décrets d'application ayant été publiés.
La gauche entend toutefois porter le projet de loi devant le Conseil constitutionnel.
Les ordonnances prévoient la fusion des instances représentatives, dont le CHSCT, la barémisation des indemnités prud'homales en cas de licenciement abusif, et encore la réforme du compte pénibilité en compte de prévention.
Députés et sénateurs s'étaient accordés en commission mixte paritaire la semaine dernière sur une version commune du projet de loi porté par la ministre du Travail Muriel Pénicaud. Le texte a été adopté mardi par 79 voix contre 20, et 2 abstentions, sous les applaudissements de la majorité.
"Ce nouveau cadre juridique, empreint de pragmatisme, crée les conditions d'un dialogue social structuré, lisible, décentralisé, offrant beaucoup plus d'agilité et de sécurité tant aux employeurs qu'aux salariés", a vanté la ministre et ancienne DRH de grandes groupes dans l'hémicycle.
Le rapporteur Laurent Pietraszewski (LREM) a envoyé un "message de confiance aux salariés, aux employeurs". "Des centaines d'accords sont signés ou en cours de préparation" dans les entreprises, s'est félicité Patrick Mignola (MoDem).
Les communistes ont défendu en vain une ultime motion de rejet de cet "acte fondateur de la majorité" qui "ébranle délibérément le Code du travail". Les ruptures conventionnelles collectives, permises par les ordonnances, ont "déjà produit leurs effets" et sont "une belle réussite dans la lutte contre le chômage", a ironisé Pierre Dharréville, en référence aux projets chez Pimkie, Téléperformance ou PSA.
"C'est la dernière étape, vous avez le point", a redit Jean-Luc Mélenchon, chef de file de la France Insoumise, regrettant entre autres une "division syndicale (...) aggravée par une coupure entre l'action sociale et le mouvement politique".
"Nous n'avons pas pu ou su fédérer les forces qui auraient eu intérêt à ce que le dialogue puisse s'établir sur d'autres bases (...) du fait d'une division syndicale" qui a été "aggravée par une coupure entre l'action sociale et le mouvement politique", a-t-il ajouté.
Egalement contre, les socialistes ont déploré, par la voix de Boris Vallaud, que le recours aux ordonnances aient "privé les Français d'un processus démocratique et pluraliste".
Assemblée et Sénat avaient adopté à une large majorité l'été dernier le projet de loi habilitant le gouvernement à prendre ces ordonnances.
En soutien au projet de loi, Gérard Cherpion, au nom de LR, a cependant jugé les mesures prévues "insuffisantes pour redonner confiance aux entreprises". Elles vont "dans le bon sens" mais "manquent d'ambition", selon Francis Vercamer (UAI).
L'intégration par le Sénat dans le projet de loi de ratification d'une sixième ordonnance, corrigeant et précisant les cinq précédentes, a été critiquée jusque par le rapporteur, car l'Assemblée n'a pu en débattre.
Le "seul regret" de Mme Pénicaud a été la suppression par un amendement sénatorial de l'instance de dialogue social des réseaux de franchises, instaurée par la loi El Khomri, au grand dam de la CFDT. "Nous devrons travailler avec la profession à trouver une solution satisfaisante", s'est engagée la ministre.