En 2017, cette même délégation avait remis un rapport d’information sur « les nouvelles technologies au service de la modernisation des territoires ». Présenté à l’époque par les sénateurs Jacques Mézard et Philippe Mouiller, le texte présentait les avantages de la digitalisation des collectivités territoriales. Cinq ans plus tard, la délégation publie un nouveau rapport sur la même thématique d’innovation technologique et de transition numérique « mais en circonscrivant son périmètre à la protection des populations », précise Antoine Lefèvre, sénateur LR de l’Aisne et l’un des rapporteurs du texte.
Des outils numériques au service de la protection de l’ordre public
Plusieurs exemples de bonnes pratiques sont présentés tout au long du rapport. C’est le cas des centres de supervision urbain (CSU), plus particulièrement celui de Charleville-Mézières. Ces salles de surveillance affichent en direct les images de vidéoprotection. Les CSU offrent de nombreux avantages aux collectivités comme « prévenir les atteintes aux biens et aux personnes, sécuriser les bâtiments et sites communaux », précise le sénateur Antoine Lefèvre.
L’utilisation de drones est une pratique locale « intéressante » saluée par le rapporteur. La ville d’Istres est à ce titre, citée en exemple. Première commune de France à doter sa police municipale de deux drones en 2020, les aéronefs permettent « l’identification des auteurs de méfaits en temps réel », explique le sénateur.
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Le rapport présente un dispositif « simple et efficace » : « voisins vigilants et solidaires ». Inspirée des modèles de surveillance de quartier anglo-saxons, cette initiative numérique lancée en 2002 en France à Saint-Paul-de-Vence permet aux habitants d’une commune de « lutter ensemble contre les cambriolages » en les alertant par SMS ou une notification. « L’efficacité est avérée puisqu’une baisse des cambriolages de 40 % par an a été constatée par le ministère de l’Intérieur », souligne Antoine Lefèvre.
L’innovation numérique au service de la prévention des risques naturels
Le numérique apporte également une plus-value importante dans un autre domaine : la protection des populations face aux risques naturels. Plusieurs dispositifs de surveillance des crues déployés comme celui à Nîmes (EPSADA) ou dans le Pays de Lourdes et des Vallées des Gaves et le système d’alerte de la commune de Sommières dans le Gard sont autant d’outils d’observation et de prévention du risque. Ces dispositifs « apportent une aide à la décision pour élus », explique le sénateur des Alpes de Haute-Provence, Jean-Yves Roux.
En matière de surveillance des incendies, le rapport souligne une initiative lancée dans les Bouches du Rhône. « Le conseil départemental s’est muni depuis 2014 de drones de seconde génération dotés de capteurs infrarouges détectant les départs d’incendie », un moyen efficace de lutter contre les départs des feux de forêt pointe le sénateur.
Dans les Alpes, le rapport cite l’exemple de drones dans la station de sports d’hiver, Val Thorens. Les aéronefs apportent une aide précieuse lors des missions de secours aux personnes victimes d’avalanches grâce « à ses deux caméras performantes l’une est thermique, l’autre est munie d’un zoom grossissant 200 fois. »
Une transformation numérique à la portée des territoires périurbains et ruraux
Le rapport détaille des recommandations aux collectivités territoriales pour « accentuer et sécuriser le mouvement de numérisation », explique la sénatrice de la Côte d’Or Anne-Catherine Loisier. L’utilisation de ces nouvelles technologies doit être fondée sur « une méthode rigoureuse fondée sur une réflexion préalable approfondie », calculant le risque, le coût et les avantages soulignent la rapporteuse. Cette démarche doit également « s’accompagner d’une communication des élus auprès des habitants. »
Les rapporteurs rappellent la nécessité de sensibiliser les élus et les services aux enjeux de la cybersécurité en actualisant les moyens de protection et adoptant les bonnes pratiques numériques. « L’efficacité du numérique passe par un numérique de confiance, sécurisé qui s’appuie sur une montée en compétences des élus et des services. » Le but est d’éviter l’apparition de failles dans des dispositifs qui deviendraient « des colosses aux pieds d’argiles. »
Le rapport insiste également sur la nécessité de mutualiser les usages numériques. « Il apparaît en effet pertinent de confier la compétence numérique à l’échelon en capacité d’effectuer la veille technologique, d’adaptation et de sécurisation », commente la sénatrice. Le texte identifie l’intercommunalité et le département comme les structures administratives à privilégier. Enfin, les sénateurs conseillent un renforcement de la coopération entre les collectivités territoriales et les services déconcentrés de l’Etat dans le domaine de la protection des populations. Cette collaboration, « s’impose en matière de sécurité publique pour des raisons qui sont parfois, techniques, réglementaires ou juridiques », complète la sénatrice.
Pour conclure, la présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation Françoise Gatel, rappelle le but de ce rapport : « L’objectif de ce travail est de diffuser des pépites technologiques qui pourront inspirer demain les décideurs publics locaux dans le domaine de l’ordre public et de la gestion des risques. Surtout, nous avons souhaité montrer que la transformation numérique n’est pas l’apanage des grandes agglomérations. Elle est à la portée des territoires périurbains et ruraux. »