Le député LR des Alpes-Maritimes et ex-maire de Cannes, Bernard Brochand, devra comparaître devant le tribunal correctionnel de Paris pour n'avoir pas mentionné un compte en Suisse dans sa déclaration de patrimoine et pour blanchiment de fraude fiscale, le juge ayant rejeté vendredi une procédure de plaider coupable.
Tenu de déclarer son patrimoine à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), le doyen de l'Assemblée nationale avait omis en 2013 de déclarer un compte UBS crédité de plus d'un million d'euros. Il le détenait depuis 1976 et était en train de le rapatrier en France, selon son avocat Antoine Vey.
Saisi à l'époque par la HATVP, le parquet de Paris a proposé, après enquête, une condamnation à huit mois de prison avec sursis et 200.000 euros d'amende, que Bernard Brochand, 79 ans, avait acceptée dans le cadre d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC).
Mais, fait rare, un juge a refusé vendredi d'homologuer cette condamnation, lors d'une audience annoncée par Europe 1, au tribunal de grande instance de Paris.
"Le tribunal estime que les peines sont inadaptées au regard des circonstances de l'infraction et de la personnalité de l'auteur", "représentant de la Nation", a expliqué le juge à l'élu lors de l'audience. Selon le magistrat, les faits "portent gravement atteinte à l'égalité devant l'impôt" et nécessitent "un débat contradictoire" devant le tribunal correctionnel.
"Le juge aura manifestement oublié que M. Brochand n'est pas poursuivi pour fraude fiscale" et "que la procédure simplifiée mise en oeuvre démontrait bien l'absence d'intention frauduleuse", a réagi Me Antoine Vey, qui dénonce une "décision scandaleuse".
"Il s'agit de salaires parfaitement déclarés au fisc et versés en 1976 sur ce compte" qui fonctionnait "en vase clos jusqu'au rapatriement volontaire des sommes en 2013", a ajouté l'avocat. Selon lui, le blanchiment de fraude fiscale ne porte que sur les intérêts perçus sur ces sommes.
Depuis l'affaire du compte caché de Jérôme Cahuzac, la loi oblige membres du gouvernement, parlementaires et certains élus locaux à déclarer leur patrimoine auprès de la HATVP qui a déjà transmis une quinzaine de dossiers suspicieux à la justice.
Parmi eux, une ancienne députée et un sénateur LR ont été définitivement jugé en 2016, via une procédure de plaider-coupable : l'élue du Var Josette Pons a écopé de 45.000 euros d'amende pour une sous-évaluation de son patrimoine de plus de 2 millions d'euros, tandis que Bruno Sido a été condamné à six mois de prison et 60.000 euros d'amende, pour omission de patrimoine et blanchiment de fraude fiscale, en raison d'un compte en Suisse non déclaré.
Détenteur également d'un compte dissimulé en Suisse jusqu'en 2013, le député LR Dominique Tian doit encore être jugé devant le tribunal correctionnel de Paris.
L'ancienne ministre Yamina Benguigui a elle été condamnée en appel à un an d'inéligibilité, deux mois de prison avec sursis et 5.000 euros d'amende pour des omissions dans ses déclarations de patrimoine et d'intérêts, mais s'est pourvu en cassation.