Politique
Deux semaines après la mobilisation du 18 septembre, l’intersyndicale tente de mobiliser pour une nouvelle journée de contestation contre les orientations budgétaires. Néanmoins, le nombre de participants devrait être en recul.
Le
Par Simon Barbarit
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Conduite par les sénatrices Elsa Schalk (LR), Dominique Vérien (centriste), et Laurence Harribey, la mission d’information du Sénat présentait, ce mercredi, son rapport sur l’exécution des peines. L’objectif « était d’étudier les causes du paradoxe » d’une justice perçue comme « laxiste » par une majorité de Français, alors que « la surpopulation carcérale est désormais hors de contrôle », en raison « d’une sévérité croissante des lois pénales comme des juridictions chargées de les appliquer ».
Voilà pour la feuille de route, mais le hasard du calendrier a voulu que ce rapport soit présenté après la condamnation de Nicolas Sarkozy à 5 ans de prison avec exécution immédiate pour association de malfaiteurs dans la tentaculaire affaire du financement libyen de sa campagne de 2007. Son incarcération prochaine soulève depuis des jours une salve d’attaques de l’institution judiciaire de la part de l’ancien chef d’Etat et de ses soutiens. « L’état de droit » serait bafoué, car l’exécution provisoire d’une peine de 5 ans de prison, donc non suspensive d’appel, irait à l’encontre, selon eux, de la présomption d’innocence.
Cette charge inédite contre l’autorité judiciaire de la part de l’ancien plus haut personnage de l’Etat a pris de court les rapporteures de la mission les obligeant à se replonger dans leurs travaux afin de vérifier si cette question n’avait pas été soulevée lors des 75 auditions qu’elles ont menées. « Très curieusement, aucune de nos auditions n’a posé le problème de l’exécution du jugement. Ça n’a pas été évoqué. L’exécution immédiate, c’est quelque chose d’habituel en particulier pour les peines de plus de 5 ans. C’est plus de 88 % […] Si la majorité des personnes auditionnées avait posé ce problème. On s’y serait intéressés. Mais comme par hasard, personne ne l’a évoqué », rapporte Laurence Harribey.
« L’exécution provisoire des peines de prison n’a jamais été un sujet pendant nos auditions. Ce n’est pas un sujet qui préoccupait les avocats, les magistrats, ni personne… », confirme Dominique Vérien qui rappelle que 30 % des personnes en détention provisoire sont des prévenus qui n‘ont pas encore eu leur premier procès.
La sénatrice en profite pour enchaîner sur l’une des préconisations du rapport. « Pourquoi les juges prononcent majoritairement de la prison ? C’est parce qu’ils n’ont pas une grande confiance dans les peines alternatives en milieu ouvert. C’est pourquoi notre rapport propose de créer une vraie peine probatoire », souligne-t-elle. Cette « peine autonome de probation » offrirait au juge du fond une large palette de mesures contraignantes comme des travaux d’intérêt généraux, des obligations de se soigner ou de travailler. Il garantirait un suivi étroit et « le placement immédiat du condamné en détention dès lors qu’il ne respecte pas les obligations et interdictions auxquelles il est soumis », souligne le rapport.
Autre mesure forte, la réintroduction de très courtes peines d’emprisonnement, c’est-à-dire les peines inférieures ou égales à un mois. « Mais pas dans n’importe quelles conditions et pas pour n’importe qui », précise Dominique Vérien. Cette très courte peine viserait les primo délinquants qui effectueraient leur peine dans des établissements dédiés. « Il n’y aurait pas de mandat de dépôt immédiat. Vous pourrez vous préparer, prendre 15 jours de congé si vous travaillez. C’est une prise de conscience », détaille-t-elle.
Suppression de la libération sous contrainte
La mission demande la fin de la libération sous contrainte de plein droit pour privilégier des mécanismes individuels, tenant compte des efforts accomplis par le condamné durant sa détention. « Ce système a été totalement décrié pendant nos auditions. Il favorise les sorties sèches. On veut replacer la réinsertion au cœur de la peine. Il est aussi indispensable de favoriser la formation pendant la peine. Le taux de récidive est de 60 %, » 5 ans après la détention. Donc on voit bien que c’est un axe majeur sur lequel on peut travailler », explique Elsa Schalk.
En ce qui concerne les mineurs, les rapporteures rappellent que la justice pénale privilégie une finalité éducative. A ce titre, « la fin de peine doit faire l’objet d’une vigilance accrue pour les jeunes détenus ». La mission propose un recours aux aménagements sous forme de stages, de travaux d’intérêts généraux ou de mesures éducatives pour favoriser la réinsertion des mineurs.
En ce qui concerne les débouchés de ce rapport, les membres de la mission pourraient déposer des amendements au prochain projet de loi sur la réforme de la justice pénale dont Gérald Darmanin avait esquissé les grandes lignes aux printemps dernier. Mais après la chute du gouvernement Bayrou et la fragilité du prochain gouvernement Lecornu, cette réforme s’inscrit plus que jamais en pointillé.
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