FRA – ASSEMBLEE – 4 COLONNES
Crédits : NICOLAS MESSYASZ/SIPA

Congrès du PS : les tractations se concentrent sur « Boris Vallaud, qui a des propositions de dates tous les jours »

Alors que les amis de Nicolas Mayer Rossignol, d’Hélène Geoffroy et de Fatima Yadani et Philippe Brun discutent pour fusionner, dans une union des opposants à Olivier Faure qui demandent la « clarté », le président du groupe PS de l’Assemblée, Boris Vallaud, se retrouve au centre des attentions. Mais « son but n’est pas d’être faiseur de roi, c’est de rassembler le royaume socialiste », soutient Rémi Branco, son porte-parole.
François Vignal

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C’est déjà le money time. Une bonne partie du congrès du PS, qui se tient à Nancy du 13 au 15 juin, se joue en réalité dans les jours à venir. Les discussions vont bon train et les conciliabules s’enchaînent entre « camarades » socialistes. Les représentants des contributions générales, ces textes qui contribuent au débat et définissent déjà des premiers rapports de force, échangent actuellement pour tenter de fusionner et constituer les fameux textes d’orientation, les « TO », anciennement appelés motions, sur lesquels les militants voteront. Ils ont jusqu’au 26 avril prochain, date d’un conseil national de synthèse, où seront déposés les textes d’orientation, pour toper.

Grandes manœuvres

Depuis quelques jours, les grandes manœuvres, fidèles à la tradition socialiste, ont commencé, entre rapprochements et batailles de soutiens. Vendredi dernier, les contributions de Nicolas Mayer Rossignol, qui avait perdu d’une courte tête face à Olivier Faure en 2023, celle d’Hélène Geoffroy et celle de la trésorière du PS, l’ex-fauriste Fatima Yadani, avec ses amis, les députés Philippe Brun et Jérôme Guedj, et la sénatrice Laurence Rossignol, annonçaient par communiqué engager les démarches vers une fusion.

Ces trois courants opposés à Olivier Faure, premier secrétaire sortant, qui entend rempiler, affirmaient ouvrir « des discussions pour rendre possible la présentation d’un texte d’orientation ». Or depuis, les discussions sont toujours en cours. D’autant que ce début de fusion connaît un peu de friture, Fatima Yadani affirmant dans Le Monde n’avoir « jamais donné (son) accord pour ce texte »… « J’ai simplement donné mon accord pour que des discussions soient engagées avec tous, d’Hélène Geoffroy à Olivier Faure en passant par Boris Vallaud et Nicolas Mayer-Rossignol. Pour l’instant, il n’y a aucune fusion », soutient la première signataire de « Pour un nouveau socialisme ».

Le courant d’Olivier Faure « pense qu’il y aura un rapprochement » avec l’aile gauche

Face à ce front qui le menace, Olivier Faure va pouvoir compter sur quelques soutiens bienvenus, avec le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel, la maire de Rennes, Nathalie Appéré, avant Martine Aubry et l’ancien premier ministre, Jean-Marc Ayrault.

De son côté, l’aile gauche, représentée par la contribution « Avenir socialiste », a posé jeudi ses conditions à toute fusion, appelant à construire « une plateforme commune avec les forces de gauche et écologistes » pour un candidat unique à la présidentielle, soit ce que souhaite Olivier Faure. Chez les amis du premier secrétaire, on ne se prive pas de le relever. « Les demandes d’Avenir socialiste sont en raccord avec ce que nous proposons. Nous pensons qu’il y aura un rapprochement avec Avenir socialiste. Tout ça est assez attendu », soutient Jonathan Kienzlen, secrétaire national du PS et soutien d’Olivier Faure.

« Le tout sauf Faure, c’est un peu court comme ligne politique de congrès, pour ne pas dire un peu stupide »

Quant aux rapprochements qui se forment en face, le premier secrétaire de la fédération PS du Val-de-Marne en minimise l’impact. « Nous ne sommes pas plus menacés qu’hier, et pas moins que demain. Il n’y a pas de grande surprise dans ce qu’il se passe. Les anciennes TO3 et TO1 de Nicolas Mayer Rossignol et d’Hélène Geoffroy nous avaient déjà expliqué, lors de l’université de Blois, qu’il y avait convergences entre eux et qu’ils travaillaient ensemble. Il n’y a rien de nouveau », soutient le secrétaire national du PS en charge des statuts. Pour Jonathan Kienzlen, il n’y a pas de « tous sauf Faure », qui se mettrait en place pour lui barrer la route. « Je sais bien que tout le monde raconte ça mais il ne se met pas plus en place qu’avant », assure le secrétaire national, qui ajoute que « le tout sauf Faure, c’est un peu court comme ligne politique de congrès, pour ne pas dire un peu stupide ».

Par ailleurs, il s’étonne des attaques des adversaires internes d’Olivier Faure, qui n’ont pas de sens selon lui, puisque « toutes les décisions stratégiques ont été prises quasiment à l’unanimité depuis deux ans, comme le Nouveau front populaire, la censure de Barnier, la non-censure de Bayrou. Donc en quoi Olivier Faure ne fait pas le rassemblement ? Il le fait depuis deux ans. Donc tout ça, c’est un peu du vent », tranche le soutien du premier secrétaire. Sous pression de ses opposants internes, et face aux déclarations et attaques de Jean-Luc Mélenchon, Olivier Faure a par ailleurs opéré une évolution stratégique, prenant ses distances avec LFI avant de couper les ponts. Au point que sa contribution revendique aujourd’hui représenter « l’union de la gauche non mélenchoniste ».

« Nicolas Mayer dit qu’il veut être premier secrétaire, Hélène Geoffroy dit qu’elle est dispo, Carole Delga aussi, Karim Bouamrane également… »

Dans le camp de la TO qui se profile par la fusion des opposants à Olivier Faure, il y a encore un peu de travail. « Ça avance bien. Nous sommes dans une phase où on développe les points du communiqué, on approfondit l’orientation dans le but de pouvoir déposer un texte d’orientation ensemble. A ce stade, sur l’essentiel, nous sommes d’accord », assure David Assouline, pour le courant Refondations de Nicolas Mayer Rossignol. « Ça discute. Le communiqué dit simplement qu’on ouvre la discussion, en vue de. Ça veut dire qu’il faut que cela aboutisse, qu’il y ait un consensus sur le fond, sur les questions stratégiques et aussi un consensus sur le premier signataire », résume pour sa part la sénatrice Laurence Rossignol, alors qu’un point sur le contenu était prévu jeudi matin à 11 heures.

Le nom du ou de la première signataire du texte d’orientation est crucial. Car seuls les premiers signataires des deux TO arrivés en tête du vote des militants peuvent postuler au poste de premier secrétaire. Et là, ça se bouscule entre les opposants d’Olivier Faure. Ce que raille un socialiste membre d’un autre courant. « Nicolas Mayer dit qu’il veut être premier secrétaire, Hélène Geoffroy dit qu’elle est dispo, Carole Delga aussi, Karim Bouamrane également… » énumère-t-on, sans oublier Philippe Brun, qui se pousse du col également, raconte Le Monde.

Sur cette question, « c’est une discussion que nous avons encore », reconnaît David Assouline, qui tient « d’abord à définir une orientation politique. Et ce n’est que lorsqu’on sera en clarté, qu’on va discuter de cela. C’est un collectif qui doit diriger demain et on verra qui peut être le premier signataire dans ce cadre ».

Tout le monde « tend la main » à Boris Vallaud

Dans la jungle socialiste, où les espèces tentent de cohabiter sans se manger, un homme tente de tirer son épingle du jeu. C’est Boris Vallaud. Le président du groupe PS de l’Assemblée nationale a lui aussi présenté sa contribution. Et il n’entend pas jouer les figurants. Aujourd’hui, tous les regards et les mains se tournent vers le député des Landes. Ce qui amuse ses soutiens. « Je confirme que Boris Vallaud a des propositions de « dates » tous les jours. Pour le suivre beaucoup en ce moment, tout le monde l’appelle ou l’interpelle lors des débats en fédération pour qu’il rejoigne un clan, un bloc, tel ou tel courant », raconte Rémi Branco, vice-président du conseil départemental du Lot et porte-parole du député pour le congrès, aux côtés du sénateur Alexandre Ouizille.

Les trois contributions en cours de fusion proposent en effet à Unir, celle du patron des députés PS, de se rapprocher. « Nous ouvrons notre rassemblement. On a une discussion de prévue avec Boris Vallaud ce vendredi soir. Il a accepté la rencontre », se félicite David Assouline. « On lui tend la main », confirme Laurence Rossignol, pour la contribution de Philippe Brun. Chez les amis d’Olivier Faure, on fait aussi les yeux doux à « Boris ». « On souhaite qu’il continue de cheminer avec nous. Et on discute avec tout le monde, y compris avec les amis de Philippe Brun », avance Jonathan Kienzlen.

Mais face à tous ces appels du pied, plus ou moins insistants, « à chaque fois, il tient le même discours : je ne suis pas là pour être candidat d’un bloc contre un autre. Ce que je propose à chacun, c’est un mouvement vers la réconciliation », explique Remi Branco. Car Boris Vallaud ambitionne d’être le rassembleur en jouant le barycentre de la galaxie socialiste. « Soit Boris arrive à rassembler et on peut même finir ce congrès avec un seul texte d’orientation, qui sait ? Soit c’est reparti avec un congrès fratricide, comme à Marseille, et là, le PS repart pour un moment dans l’opposition », prévient ce proche du député des Landes.

Boris Vallaud veut renouer avec « l’art de la synthèse »

Le candidat entend ainsi renouer avec « l’art de la synthèse », une tradition pourtant toute socialiste, qui serait en désuétude. « Boris Vallaud est extrêmement attentif à ce que sa ligne politique puisse rassembler ceux qui sont proches d’Alexandre Ouizille (qui ont voté la censure contre Bayrou, ndlr) et ceux dont je suis plus proche au sein de Refondations notamment », résume Rémi Branco, ancien directeur de cabinet du très hollandais Stéphane Le Foll, quand il était ministre de l’Agriculture.

Si bien que le député n’a pas écarté l’ambition de prendre la tête du PS. « Boris Vallaud veut faire un congrès d’addition. Il veut être le premier secrétaire qui fait travailler ensemble Johanna Rolland et Carole Delga, Arthur Delaporte et Valérie Rabault, tous étaient alliés au congrès d’Aubervilliers en 2018. Pas un ne doit manquer sur la photo de famille », lance son lieutenant, qui assure que les discussions se font de toutes parts et ne se limitent pas à la rencontre de vendredi soir. « Il va y avoir une rencontre avec les représentants des cinq autres contributions générales dont celle d’Olivier Faure bien sûr, mais on discute avec l’aile gauche également dont Alexandre Ouizille est proche », affirme le porte-parole.

Pour le camp Vallaud, la division entre deux camps serait factice, « Les principaux désaccords sont derrière nous. La question de LFI est réglée. On n’aura pas de bannière commune avec Mélenchon, s’il y avait des législatives en juillet. Ce qui ne veut pas dire, ici ou là, des accords de non-agression face à des candidats sortants. La lutte contre le RN doit rester une priorité absolue », avance Rémi Branco, qui ajoute que « Boris Vallaud veut éviter un affrontement comme à Marseille, qui se ferait sur des raisons obsolètes puisque plus personne ne veut d’alliance avec LFI ». Et n’allait pas évoquer l’idée qu’il puisse être faiseur de roi, s’il le voulait. « Son but n’est pas d’être faiseur de roi, son but est de rassembler le royaume socialiste. Et si je suis avec lui, c’est que je ne vois que lui pour le faire, comme il le fait au quotidien au groupe à l’Assemblée », lance Rémi Branco.

« Personne ne peut poser d’exclusive sur personne »

Pas sûr que son syncrétisme socialiste parle à toutes les chapelles. Chez les anti-Faure, on se dit cependant prêt à ouvrir largement vers Boris Vallaud. Voire à lui laisser la place de numéro 1 pour certains. « On est prêt à suivre cette hypothèse. C’est à lui de proposer. En tout cas, s’il propose, il n’y a pas de véto », confie un membre de Nouveau socialisme, sans pour autant écarter la solution Philippe Brun, « il y a plusieurs configurations possibles ». De son côté, un soutien de Nicolas Mayer Rossignol assure aussi qu’« il n’y a pas d’exclusive, ni véto. Personne ne peut poser d’exclusive sur personne ».

Un opposant à la direction ne croit pas une seconde en revanche que le président du groupe socialiste retourne aux côtés du premier secrétaire. « Comme Olivier Faure ne va pas lui proposer d’être premier secrétaire à sa place, je ne vois pas ce que Boris peut avoir de plus que ce qu’il est déjà », avance ce socialiste, qui pointe, par ailleurs, un conflit d’ambition : « Olivier Faure veut être candidat à la présidentielle… et Boris Vallaud aussi ».

« Je ne vois pas pourquoi on changerait le pilote de l’avion »

Dans le camp du député de Seine-et-Marne, on écarte en effet clairement l’idée d’un retrait d’Olivier Faure derrière Boris Vallaud. « Je ne vois pas pourquoi on changerait le pilote de l’avion, alors qu’on a récupéré un avion qui n’avait plus de moteur et plus de train d’atterrissage. L’amerrissage sur l’Hudson, c’est compliqué et l‘avion ne s’est pas écrasé. Et c’est en partie grâce à Olivier », avance Jonathan Kienzlen. « Mathématiquement, je ne vois pas comment il sera premier secrétaire, ni dans les deux premiers », ajoute le secrétaire national, « donc il doit continuer à discuter avec nous, car nos contributions sont compatibles ».

Un autre socialiste, soutien du numéro 1 du PS, décrit même la candidature Vallaud déjà comme un échec. « Il pensait nous faire les poches et faire une OPA sur le texte de Faure. La réalité, c’est que Boris va finir en dessous de 20 %, largement. Leur pari n’a pas réussi, à cause de la ligne politique, celle de Vallaud. Car c’est la ligne de Faure ».

« Venir faire un pronostic pour ce congrès, ce serait bien ambitieux »

Alors, ce serait plié pour Boris Vallaud ? Reste une option, que l’ancien secrétaire général adjoint de l’Elysée, sous François Hollande, pourrait envisager : se maintenir, se compter, pour peser pour la suite. Un stratège l’imagine : « Admettons que Boris Vallaud fasse 20/25 %, il est troisième, il ne peut pas se présenter comme premier secrétaire. Mais il est sûr qu’aucun des autres blocs n’aura de majorité. Donc c’est lui, de l’intérieur, qui constitue la synthèse. Il peut poursuivre son travail de réconciliation de l’intérieur ».

Chacun fait ses petits calculs. En réalité, l’incertitude est encore de mise. « Les blocs sont à peu près les mêmes, mais est-ce qu’à l’intérieur des blocs, c’est la même chose ? Personne ne le sait vraiment. Venir faire un pronostic pour ce congrès, en tout cas jusqu’au dépôt des textes d’orientation, ce serait bien ambitieux », prévient un cadre PS. Les socialistes devront attendre la formation des TO et le conseil national du 26 avril, pour espérer y voir plus clair.

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