Congrès LR : face au très droitier Ciotti, les candidats éliminés rallient Pécresse
Le député LR des Alpes-Maritimes, Éric Ciotti, est arrivé en tête du premier tour du Congrès LR pour l’investiture à la présidentielle, talonné par la présidente de la région Île-de-France, Valérie Pécresse. La multiplication des ralliements en faveur de cette dernière laisse croire que l’ordre d’arrivée pourrait s’inverser au second tour.

Congrès LR : face au très droitier Ciotti, les candidats éliminés rallient Pécresse

Le député LR des Alpes-Maritimes, Éric Ciotti, est arrivé en tête du premier tour du Congrès LR pour l’investiture à la présidentielle, talonné par la présidente de la région Île-de-France, Valérie Pécresse. La multiplication des ralliements en faveur de cette dernière laisse croire que l’ordre d’arrivée pourrait s’inverser au second tour.
Romain David

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La horde des journalistes se masse au fond du Toucan, un petit bar-restaurant à moins d’une centaine de mètres du siège des Républicains, dans le 15e arrondissement de Paris. C’est là qu’Éric Ciotti a réuni ses soutiens, lui qui n’a pas souhaité avoir de véritable QG pour cette campagne du congrès LR. Dos au mur, cerné par les perches-micros et les caméras, il affiche un discret sourire de contentement. Derrière ses lunettes, l’œil pétille : « C’est avec beaucoup de bonheur et une immense joie que j’accueille cette victoire ». Les adhérents LR viennent de le porter en tête du premier tour, d’un cheveu certes, avec 25,59 % des suffrages, soit 665 petites voix d’avance sur Valérie Pécresse, en deuxième position (25 %), selon les résultats communiqués un peu plus tôt par Christian Jacob, le président des Républicains. Double surprise de ce scrutin, comme sait en réserver ce type d’élections, internes aux partis : le succès de l’outsider Éric Ciotti… et l’élimination de Xavier Bertrand, pourtant favori des sondages nationaux. Il termine à la quatrième place (22,36 %), derrière Michel Barnier (23,93 %).

« Maintenant ce sera plus compliqué… »

À présent, l’éternel « monsieur sécurité » des Républicains va devoir transformer l’essai. Et passée l’euphorie de cette première victoire, la marche du second tour, qui se tient de vendredi à samedi, apparaît déjà aussi haute qu’une montagne. Les résultats ont à peine été dévoilés que Xavier Bertrand a appelé ses soutiens à se ranger derrière la présidente de la région Île-de-France. Même position du côté de Michel Barnier - « Elle est la mieux préparée pour gagner l’élection présidentielle », soutient-il sur Twitter -, et de Philippe Juvin, arrivé dernier au premier tour (3,13 %). En moins d’une heure, le jeu des tractations est bouclé : les trois autres candidats font le choix de la ligne libérale de Valérie Pécresse, contre celle, identitaire, du député des Alpes-Maritimes. Autre poids lourd de droite à avoir rallier la candidate : Gérard Larcher, le président du Sénat, qui avait déjà présidé le comité de soutien à Valérie Pécresse aux dernières élections régionales. 

« La victoire d’Éric, je l’avais prédite. Mais maintenant ce sera plus compliqué… », lâche un membre de l’équipe de campagne au milieu de la foule qui se presse à la sortie du Toucan. Le regard sévère d’un élu l’empêche de finir sa phrase. Devant les micros, les soutiens d’Éric Ciotti veulent jouer la gagne : « Xavier Bertrand a son libre arbitre, il a fait son choix. Mais nul n’est propriétaire des voix des militants », avertit le sénateur Stéphane Le Rudulier auprès de Public Sénat. « Éric va continuer à parler aux militants pendant les heures qui restent entre le premier et le second tour, afin de convaincre que sa ligne politique est véritablement la meilleure pour redresser notre pays », martèle-t-il. Face caméra, Éric Ciotti distribue déjà les ministères aux ténors du parti : il rappelle qu’il voudrait Laurent Wauquiez, très apprécié des militants, à Matignon. Il évoque Bruno Retailleau, le président du groupe LR au Sénat, pour piloter « un grand ministère de la sécurité ». Sollicité par Public Sénat, le filloniste, qui est resté neutre durant la campagne, n’a pas souhaité réagir.

"La ligne politique d'Eric Ciotti est véritablement la meilleure pour redresser notre pays"
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La fidélité récompensée par les militants ?

Soutien du Niçois, la sénatrice Alexandra Borchio-Fontimp veut croire que la dynamique qui s’est amorcée au fil des débats télévisés va se poursuivre : « Les gens ont découvert Éric Ciotti, qui était peut-être moins populaire que ses autres concurrents », pointe-t-elle. À ses yeux, les militants ont aussi fait le choix de la constance : « Éric Ciotti va continuer de réaffirmer un programme courageux, en rupture avec le macronisme, mais aussi sa fidélité à sa famille politique, même au moment où ça a tangué. » Une manière de tacler Xavier Bertrand et Valérie Pécresse, revenus dans le giron de LR à l’approche de la présidentielle.

Ciotti en tête du premier tour au congrès LR: "Il va continuer de réaffirmer un programme courageux"
01:45

« C’est sans doute la raison pour laquelle Xavier Bertrand ne s’est pas démarqué à l’intérieur de LR, quand, à l’extérieur, tous les sondages lui donnaient une légère avance. Pour des militants, qui ont consacré leur temps et leur énergie au parti, les conditions de son départ n’ont pas été faciles à digérer », analyse la vice-présidente du Sénat Pascale Gruny, qui a aussi été la suppléante du président de la région des Hauts-de-France. En vue de ce congrès LR, elle a fait le choix de Valérie Pécresse. Bien lui en a pris : « Je suis très heureuse, Valérie a fait une très belle campagne. » Malgré l’enchaînement des ralliements, la sénatrice veut rester prudente : « Cela reste une petite élection, nous ne sommes pas à l’abri d’un retournement de situation. Les appels au vote des différents candidats ne seront pas suivis par 100 % de leurs militants. Il y a toujours des déçus qui ne se retrouvent pas dans les deux finalistes », nous explique-t-elle. « L’avance d’Éric est une surprise, poursuit Pascale Gruny, les différences d’idées sont assez marquées avec Valérie Pécresse, mais elles montrent aussi la richesse de notre parti ».

« La ligne politique tenue par Éric Ciotti est une ligne qui compte »

Richesse ou risque de rupture entre deux lignes ? À l’image de ce qui s’est passé durant la dernière présidentielle, face à la campagne très droitière d’un François Fillon rattrapé par les affaires. « Je ne veux pas voir de fracture, il y a un réel danger si nous ne sommes pas au second tour, celui de la disparition de notre famille politique ! », balaye la sénatrice Céline Boulay-Espéronnier, l’une des porte-parole de Xavier Bertrand. « Forcément déçue » par le score de son candidat – « on était dans le vrai, mais malheureusement nous n’avons pas été entendus » -, elle veut faire contre mauvaise fortune bon cœur. « Cet après-midi, j’ai accompagné Xavier Bertrand jusqu’au QG de Valérie Pécresse, et j’y ai retrouvé des amis. Le ralliement de Xavier Bertrand, c’est le choix de la clarté, c’est son ADN politique et le mien. »

» Lire notre article : « Je suis une femme qui gagne et qui fait », déclare Valérie Pécresse

« ADN ». Ce jeudi, le mot est aussi dans la bouche de l’un des soutiens d’Éric Ciotti. « Le résultat montre que la ligne politique tenue par Éric Ciotti est une ligne qui compte, qui fait penser à l’ADN de notre famille politique, en tout cas à ses origines : le RPR. J’espère que dans 48 heures, elle sera majoritaire », explique Stéphane Le Rudulier. Coïncidence : c’est aussi avec une référence au parti fondé par Jacques Chirac que le polémiste, et désormais candidat à la présidentielle, Éric Zemmour, a salué sur Twitter la victoire d’Éric Ciotti : « Heureux, cher Éric, de voir nos idées si largement partagées par les militants LR. Le RPR n’est pas mort. » À plusieurs reprises, Éric Ciotti s’est dit prêt à voter pour Éric Zemmour si celui-ci se retrouvait au second tour de la présidentielle face à Emmanuel Macron. Des déclarations qui ont suscité quelques remous durant la campagne, et poussé le président de la région PACA, Renaud Muselier, à claquer la porte du parti. Mais après un premier tour dont le taux de participation a frôlé les 90 %, plus personne chez LR ne veut croire que la droite républicaine puisse être absente le 24 avril 2022. Et surtout, que le rassemblement ne soit pas au rendez-vous, quel que soit le candidat qui décrochera l’investiture samedi : « Nous leur avons posé la question à tous les deux lorsqu’ils ont été reçus par le groupe LR au Sénat. À chaque fois, la réponse a été claire et nette », conclut Pascale Gruny.

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