Lors de son audition au Sénat le 9 juin, la déclaration du directeur des relations institutionnelles de la Fédération française de football (FFF) a fait l’effet d’une petite bombe. Erwan Le Prévost a affirmé devant les parlementaires que les images captées par les caméras de surveillance aux abords du Stade de France, durant les incidents du 28 mai, ont été « automatiquement détruites ». « Les images sont disponibles pendant sept jours. Au bout de sept jours, elles sont automatiquement détruites. La seule façon, c’est qu’on aurait dû avoir une réquisition pour les fournir aux différentes populations », a-t-il exposé.
La destruction est fâcheuse, puisque ces images auraient permis de mieux comprendre le fiasco qui s’est déroulé avant la finale de la Ligue des champions. Selon les informations du Monde, un officier de police judiciaire a fait la demande des images au consortium Stade de France le jeudi 9 juin au soir, après les révélations de la FFF. Ce vendredi, Le Parisien nous apprend que les enregistrements issus de la vidéosurveillance de la RATP et de la SNCF, à proximité du Stade de France, « ont été automatiquement supprimés sans demande de récupération des images par la justice ».
Mais que dit la législation en matière de conservation et de suppression des images captées par un dispositif de vidéoprotection ? La réponse se trouve à l’article L252-5 du Code de la sécurité intérieure. Ce dernier est né par ordonnance, selon les dispositions de la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure de 2011 (Loppsi).
« Les enregistrements sont détruits dans un délai maximum fixé par l’autorisation »
Selon l’article, « hormis le cas d’une enquête de flagrant délit, d’une enquête préliminaire ou d’une information judiciaire, les enregistrements sont détruits dans un délai maximum fixé par l’autorisation. Ce délai ne peut excéder un mois. L’autorisation peut prévoir un délai minimal de conservation des enregistrements. » C’est une question de proportionnalité, explique la Commission nationale informatique et libertés (Cnil).
« En général, conserver les images quelques jours permet d’effectuer les vérifications nécessaires en cas d’incident et de lancer d’éventuelles procédures disciplinaires ou pénales. Dans ce cas, les images sont extraites de l’installation et conservées pour la durée de la procédure », détaille l’autorité indépendante.
La loi ne prévoit donc qu’un délai maximal, à l’issue duquel les enregistrements doivent être effacés s’ils ne sont pas demandés pour les besoins d’une enquête. Rien n’empêche un établissement de supprimer en quelques jours des images, pour des raisons d’espace limité sur des serveurs.
Pas forcément de durée minimale de conservation des images
Sauf si une durée minimale est précisée. L’existence d’une durée minimale de conservation est soumise à l’appréciation de la préfecture, lorsqu’elle délivre une autorisation pour le fonctionnement d’un système de vidéosurveillance.
Dans une circulaire publiée le 28 mars 2011, relative à l’application de la Loppsi, le ministre de l’Intérieur explique d’ailleurs que cette durée minimale sert justement à éviter que l’exploitation des images soit compromise par les forces de l’ordre, dans le cadre d’une enquête judiciaire. « Dans la plupart des cas, selon les systèmes et les lieux concernés, cette durée pourrait être comprise entre quatre et dix jours ».
Même dans l’hypothèse où une telle durée de conservation minimale figurait dans l’autorisation préfectorale délivrée au consortium du Stade de France, l’officier de police judiciaire se serait donc présenté trop tard le 9 juin, soit 12 jours après les évènements.
En outre, l’avocat Alexandre Archambault, avocat spécialisé dans les questions numériques et de données personnelles, note que les arrêtés préfectoraux en matière de vidéoprotection sont « assez standardisés ». Sur Twitter, il prend ainsi l’exemple de La Défense Arena, dans les Hauts-de-Seine. L’autorisation préfectorale ne prévoit pas de durée minimale pour la conservation des images de la vidéosurveillance.