Le président de l'Assemblée nationale, François de Rugy (LREM), a assuré mercredi que le projet de loi constitutionnelle allait être "regonflé" et "renforcé" dans le débat parlementaire, concédant que "la majorité" ne pouvait "s'y retrouver" en l'état.
"Si on disait +le texte est à prendre ou à laisser tel quel+, la majorité de l'Assemblée, qui a travaillé, a fait des propositions, ne s'y retrouverait pas tellement", a admis M. Rugy devant l'Association des journalistes parlementaires.
Le président du Sénat Gérard Larcher (LR) a, lui, dénoncé mardi un "abaissement des pouvoirs du Parlement" en germe, en reprochant à Emmanuel Macron de ne pas respecter leur accord.
Selon le président de l'Assemblée, "il y a, en effet, un certain nombre de choses qui ne sont pas dans ce texte (envoyé au Conseil d’État avant le Conseil des ministres du 9 ou 16 mai, NDLR) alors que c'était des propositions qui étaient faites" lors de la consultation des responsables parlementaires par Édouard Philippe.
Selon une comparaison effectuée par l'AFP, ont notamment disparu "planification indicative chaque trimestre des travaux du Parlement", "possibilité que des services de l’État soient placés auprès du Parlement pour sa mission de contrôle" et "mise à disposition de la Cour des comptes".
Mais "il n'y a pas d'histoire de colère, c'est pas comme ça qu'on avance", a balayé le locataire de l'Hôtel de Lassay, au lendemain d'un article dans Le Parisien titré "François de Rugy en colère contre Edouard Philippe", qui a pu lui valoir des remontrances selon une source dans la majorité.
"Il n’est pas besoin d’élever la voix pour réclamer un +Parlement fort+: il suffit d’exercer le pouvoir constituant qui est le sien", a-t-il ajouté sur son site dans la soirée, dans ce qui peut se lire aussi comme un coup de griffe à l'égard de M. Larcher. "Le coup de collier est à mon sens plus efficace que les coups d’éclat", glisse-t-il encore.
"La balle est dans le camp du Parlement" et "elle sera renforcée, regonflée, pas amoindrie ou chiffonnée", a lancé en conférence de presse cet élu de Loire-Atlantique (issu des rangs écologistes). "Ce qui m'intéresse, c'est l'action", a-t-il martelé.
Et d'ajouter: "Nous ne sommes pas dans une bataille entre l'exécutif et le législatif - à qui prendra quelque chose à l'autre - nous sommes dans l'optique d'enrichir, rajouter, compléter le texte du gouvernement".
Il a estimé que "le président du Sénat ne s'est pas mis en position d'être celui qui bloquerait la réforme institutionnelle, et beaucoup de sénateurs sont dans cet état d'esprit malgré des consignes de parti", allusion au patron de LR Laurent Wauquiez.
A ses yeux, "on a fait beaucoup de chemin", même si c'est "un peu lent", et "il y a une voie de passage vers un texte commun adopté dans les mêmes termes" par les deux chambres, puis aux 3/5e des suffrages exprimés en Congrès.
Dans la révision, M. de Rugy souhaite, pour davantage d'"efficacité" de la procédure législative, un "délai de dépôt des amendements" imposé également au gouvernement, et un temps de parole des ministres "limité".
En outre, il veut réintroduire l'idée que "le gouvernement donne une ou deux fois par session parlementaire son programme législatif", et accroître le nombre de commissions parlementaires de 8 à 12-15.
Interrogé sur une mainmise accrue de l'exécutif sur l'ordre du jour, il a plaidé pour arrêter la "fiction" d'un ordre du jour partagé et suggéré d'inscrire prioritairement dans certaines semaines les initiatives parlementaires.
Un groupe de travail députés-sénateurs sur le numérique, s'appuyant sur une consultation citoyenne, va être créé en mai en vue d'éventuels amendements à la réforme constitutionnelle (protection des données personnelles, égalité d’accès aux réseaux, droit d’accès aux documents publics).
Parmi d'autres pistes d'amendements, M. de Rugy suggère sur son site de "renforcer les garanties de l’égalité réelle entre les femmes et les hommes".