Pas encore officiellement lancée, la candidature de Gabriel Attal pour prendre la tête de Renaissance ne fait plus beaucoup de doute en interne. Une bataille d’ex-premiers ministres, face à Elisabeth Borne, déjà candidate, va s’engager, au risque de tomber dans la guerre des chefs. Mais certains, à commencer par Emmanuel Macron, prônent un accord pour avoir un seul candidat.
Ce que prépare le Sénat pour moderniser ses méthodes de travail
Par Public Sénat
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Après une série de cinq réunions au cours de l’hiver, le groupe de travail sur la « modernisation des méthodes de travail du Sénat » a présenté le 25 mars ses conclusions au Bureau, l’instance autour du président qui régit l’organisation de l’institution. Une quarantaine de propositions ont été mises sur la table par ce groupe reflétant les équilibres politiques de la haute assemblée. Leur champ est large, il va de l’adaptation du fonctionnement du Sénat en période de crise, à l’amélioration du travail législatif, notamment en séance publique, en passant par le renforcement des travaux de contrôle sur l’action du gouvernement ou d’évaluation des lois. Public Sénat a pu les consulter et vous les révèle. Plusieurs d’entre elles nécessiteront une réforme du règlement du Sénat. La résolution pourrait être examinée au mois de juin. Elle devra, en cas d’adoption être soumise au filtre du Conseil constitutionnel. En cas de décision favorable, selon les services du Sénat, ces réformes internes pourraient alors s’appliquer à la prochaine session parlementaire, c’est-à-dire au mois de septembre.
La réforme pourrait d'abord déboucher sur un symbole pour l’égalité entre les femmes et les hommes. Le règlement pourrait fixer un objectif de parité pour les listes de candidats que les groupes politiques établissent pour le renouvellement triennal des fonctions clés du Sénat : les huit postes de vice-présidents, les trois places de questeurs, et enfin celle des 14 secrétaires.
Le devenir des ordonnances, l’un des axes majeurs de la réforme du règlement à venir
Premier gros dossier mis sur la table : les ordonnances, dont le nombre a connu une belle inflation en un an. Leur suivi devrait être renforcé avec la création d’un « outil dédié », accessible aussi bien aux sénateurs qu’au grand public. Cette plateforme retracerait l’histoire des habilitations accordées au gouvernement, indiquerait l’état des ratifications en cours, et surtout les délais fixés par la loi. Un système de notification serait mis en place. Le groupe de travail propose que le règlement fasse figurer « explicitement » que les commissions du Sénat ont un « rôle accru » dans le suivi des ordonnances. Le règlement du Sénat demanderait par ailleurs de la part du gouvernement, au début de chaque session, un programme prévisionnel de la publication des ordonnances. La Conférence des présidents – l’instance qui établit le programme de travail à intervalles réguliers – pourrait en outre décider l’organisation tous les ans, en séance, d’un débat sur le recours aux ordonnances.
Une large partie des propositions va dans le sens d’un renforcement des pouvoirs de contrôle du Sénat. Un exemple concret : celui des nominations des personnalités publiques proposées par le président de la République à des responsabilités et qui nécessitent l’approbation des commissions permanentes compétentes des deux chambres du Parlement. Le règlement du Sénat prévoirait la désignation d’un rapporteur, chargé de préparer l’audition et donc « d’éclairer » l’avis de ses collègues.
Des commissions d’enquête avec davantage de membres
Incendie de l’usine Lubrizol, lutte contre la radicalisation islamiste, concessions autoroutières, pollution des sols ou encore gestion de la crise sanitaire du covid-19 en France : les commissions d’enquête se sont multipliées les unes après les autres au Sénat ces deux dernières années. Le groupe de travail propose de relever le nombre maximal de leurs membres, de 21 à 23. Les missions d’information seraient également concernées.
Pour les instances qui seraient créées en dehors du droit de tirage traditionnel réservé aux groupes, la Conférence des présidents aurait la possibilité de déroger à ce seuil. Il faut d’ailleurs noter que la récente commission d’enquête sur la gestion de la crise sanitaire comptait 36 sénateurs.
Vers davantage de questions orales posées au gouvernement
La réforme du règlement sera aussi l’occasion pour les sénateurs d’obtenir du gouvernement des réponses plus rapidement. Les questions écrites sont l’un des outils à leur disposition, mais ces derniers mois, les différents cabinets ministériels ont de plus en boudé l’exercice. Dans de nombreux cas, la réponse reste en attente. Passé le délai théorique de deux mois pour une réponse, leurs auteurs peuvent les convertir en questions orales. Pour privilégier en séance les questions sans réponse les plus anciennes, le règlement du Sénat prévoit de tenir compte de la date de dépôt de la question écrite, et non de sa transformation en question orale.
Le groupe de travail recommande que la Conférence des présidents puisse organiser une séance de questions orales supplémentaires pendant les semaines de contrôle, le jeudi matin, en plus du mardi matin. Autre astuce : la Conférence des présidents pourrait réduire de deux minutes et demie à deux minutes le temps de réponse pour les sénateurs et les ministres dans ces séances de questions orales, sur le même modèle que les questions au gouvernement. Cette solution permettrait d’accroître sensiblement le volume de questions : 45 questions au lieu de 36.
Dans le souci d’améliorer les travaux de contrôle en séance, et de dynamiser les échanges, les débats de contrôle thématique seraient soumis au même régime : pas plus de deux minutes par orateur. La Conférence des présidents pourrait également renouer avec les débats préalables aux réunions du Conseil européen. C’était d’ailleurs le cas le 23 mars dernier. Le nouveau président de la commission des affaires européennes, Jean-François Rapin (LR), a jugé qu’il était bien plus utile de pouvoir faire pression sur le gouvernement pour donner une orientation à la voix de France, plutôt de convoquer un débat une fois le sommet européen achevé.
Plus de souplesse dans le partage de l’ordre du jour
La Conférence des présidents sera également amenée à se prononcer sur une meilleure utilisation du temps passé en séance. Le partage de l’ordre du jour serait une piste. Actuellement, rappelons que le Parlement est rythmé ainsi : deux semaines où le gouvernement a la main, suivies de deux semaines parlementaires : l’une avec des travaux de contrôle, l’autre avec des initiatives parlementaires (propositions de loi). Pour « desserrer la contrainte de temps sur les semaines gouvernementales », il est ainsi suggéré que la Conférence des présidents accepte plus souvent l’inscription de petits textes : ratifications de conventions, conclusions de commissions mixtes paritaires ou encore nouvelles lectures. Le groupe de travail préconise de recourir plus souvent à la procédure de législation en commission, mais aussi de réduire la durée des interventions lorsque l’hémicycle ne fait qu’examiner les conclusions d’une commission mixte paritaire, le résultat d’un accord entre les deux chambres, rappelons-le.
Quant aux déclarations du gouvernement, l’idée sera de faire passer les orateurs dans un ordre suivant l’importance numérique des groupes, comme c’est le cas des débats au Parlement réuni en Congrès à Versailles.
Toujours dans l’optique de rendre plus efficaces et concis les débats en séance, la durée de présentation d’un article, d’un amendement ou d’une explication de vote pourrait être limitée à deux minutes. Plus anecdotique, le rapporteur aurait la possibilité de projeter des données sur les écrans situés dans l’hémicycle.
Un cadre juridique pour le Sénat en temps de crise
Après un an de crise sanitaire, le groupe de travail sur la modernisation des procédures du Sénat recommande enfin d’insérer dans le règlement un cadre clair relatif au fonctionnement du Sénat en temps de crise, afin de « cantonner les adaptations » à la présence physique des sénateurs « aux seules circonstances pouvant les justifier ». Si le Sénat s’est adapté ces derniers mois face aux circonstances, tout reste à formaliser juridiquement. Ce « régime de crise » serait « subordonné » à des principes constitutionnels : la clarté, la sincérité et la publicité des débats parlementaires, le pluralisme, le droit d’amendement et le droit de vote. Les mesures envisageables seraient listées dans un vade-mecum, à la disposition de la Conférence des présidents. Le groupe de travail préconise de maintenir le principe d’une présence physique minimale, en séance comme en commission. Ce vade-mecum devra aussi aborder la question des modalités possibles d’adaptation des sénateurs non présents physiquement en commission.
Certaines propositions ne sont pas tranchées et feront l’objet d’une « réflexion spécifique », pour « rationaliser, coordonner et mieux valoriser » les travaux de contrôle. Le groupe de travail évoque notamment comme pistes, l’expérimentation de débats de contrôle en commission ou encore un dispositif prévoyant un débouché systématique pour chaque travail de contrôle (proposition de loi, proposition de résolution ou débat). Les propositions déjà formulées doivent encore être présentées devant la Conférence des présidents, et le président du Sénat a invité les membres du Bureau à lui soumettre, s’ils le souhaitent, des contributions par écrit.