Masques, chloroquine, désinfection... alors que l'épidémie de coronavirus s'aggrave rapidement en France, la droite distille, au nom de la transparence, ses critiques sur la gestion de la crise par l'exécutif.
Le patron des députés LR Damien Abad a donné le ton jeudi, regrettant "le peu de réponses" concrètes apportées par Emmanuel Macron la veille à Mulhouse, et estimant que l'urgence était aux masques et aux dépistages plus qu'à un nouveau plan pour l'hôpital.
Dans son discours de mercredi soir, le chef de l'Etat avait appelé à "l'union" pour mener "la guerre" contre l'épidémie de coronavirus, en fustigeant "les facteurs de divisions" et "celles et ceux qui voudraient fracturer le pays".
La critique a-t-elle sa place dans cet appel à la concorde? Pour M. Abad, "on peut être dans une démarche d'union et interroger le gouvernement sur la pénurie des masques, du gel, des tests...".
"Notre rôle, c'est aussi de relayer les interrogations que se posent les Français, pas de mettre la poussière sous le tapis. L'union repose sur la transparence, la vérité", a-t-il insisté.
Un rôle de veille également revendiqué par le président LR du Sénat Gérard Larcher: "Nous exercerons pleinement notre mission de contrôle" sur les mesures d'état d'urgence, a-t-il martelé mercredi, car s'il faut "un rapport de confiance" avec l'exécutif, "cela ne veut pas dire défaut de vigilance".
"Le message n'est pas simple, on est dans l'opposition mais l'heure est à l'unité nationale. Et en même temps on ne doit pas laisser la place aux extrêmes. Donc on doit être dans le contrôle et la proposition", résume une collaboratrice LR.
Dans une démarche de responsabilité que revendique la droite, certains ont pris les devants depuis une dizaine de jours pour montrer la marche à suivre dans la gestion de la crise.
Plusieurs présidents de région LR ou ex-LR ont ainsi commandé des milliers de masques: Valérie Pécresse (Ile-de-France), Xavier Bertrand (Hauts-de-France), Renaud Muselier (PACA), Laurent Wauquiez (Auvergne-Rhône-Alpes)...
Le maire LR de Nice Christian Estrosi a lui lancé une campagne de "désinfection des espaces publics" de sa ville, mesure fréquente en Chine mais inédite en France.
M. Estrosi s'était déjà démarqué en début de semaine sur le sujet de la chloroquine, cet antipaludéen testé par le Dr Didier Raoult contre le coronavirus, mais qui suscite des réserves dans la communauté scientifique.
- "Un temps de retard" -
"Nous sommes en guerre et nous n'avons pas le temps d'expérimenter sur des souris pendant 6 mois", lançait le 23 mars le maire de Nice, lui-même contaminé par le coronavirus.
Egalement contaminées, et traitées à la chloroquine, la présidente des Bouches-du-Rhône Martine Vassal et la députée LR Valérie Boyer ont publiquement pris la défense du Pr. Raoult, égratignant au passage l'exécutif.
"Les personnes qui critiquent le traitement (...) ont été incapables de protéger les Français" avec des masques et "de commander à temps les tests", a lancé Mme Boyer.
Le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau a aussi déploré que "notre pays a eu un temps de retard sur les masques, sur le dépistage, sur le confinement, n'en n'ajoutons pas sur le traitement".
Le manque de masques avait aussi été pointé avec virulence par le chef des urgences de Pompidou Philippe Juvin, également maire LR de La Garenne Colombes -- un engagement politique qui lui a été rapidement renvoyé.
Car ces critiques irritent dans la majorité. "Les Français ne comprennent pas le double langage de l'opposition: l'étendard de l'unité dans une main, la dague politicienne dans l'autre", a lancé jeudi sur Twitter le patron des députés LREM Gilles Le Gendre, pour qui "la controverse démocratique, c'est après!"
A contre-courant des critiques, Xavier Bertrand (ex-LR) a prôné jeudi le "zéro polémique", assurant qu'il avait "eu l'occasion de faire savoir ce (qu'il) pensait d'un certain nombre de décisions", mais "aux intéressés" directement.
"Notre obligation aujourd'hui est de nous serrer les coudes", a ajouté M. Bertrand, régulièrement évoqué à droite pour la présidentielle de 2022.