Coup d’envoi à l’Assemblée de la délicate réforme de la fonction publique
Le gouvernement vante une réforme "utile" et "attendue" offrant plus de "souplesse", les oppositions comme les syndicats y voient un "grignotage...
Par Charlotte HILL
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Le gouvernement vante une réforme "utile" et "attendue" offrant plus de "souplesse", les oppositions comme les syndicats y voient un "grignotage" du statut: l'Assemblée a entamé lundi l'examen d'un projet de loi sensible pour les 5,5 millions de fonctionnaires.
Récusant tout "recul social" ou "casse de la fonction publique", le secrétaire d'Etat Olivier Dussopt a défendu devant un hémicycle clairsemé "une profonde modernisation de la gestion des ressources humaines" dans un secteur "trop souvent" victime de "rigidités".
Il a mis en avant une "nouvelle étape" de la modernisation du statut de fonctionnaire et "de son adaptation à la société et à ses attentes", mais "avec précaution", le gouvernement étant "attaché" à ce statut.
Le texte qui concerne l'ensemble des agents (Etat, hospitalière, territoriale) a été "percuté" par avance par les récentes annonces du chef de l'Etat: le possible abandon de l'objectif de 120.000 suppressions de postes d'ici 2022 et la volonté de repenser le fonctionnement de la haute fonction publique, avec la suppression de l'ENA.
Si l'objectif de réduction des postes reste "atteignable", d'après le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin, le Premier ministre Edouard Philippe a assuré dimanche ne pas avoir de "dogme" sur cette question.
Ces sujets ne figurent pas stricto sensu dans le projet, mais ne manqueront pas de planer sur les deux semaines d'examen, avec plus de 1.000 amendements au menu, avant un vote solennel le 28 mai.
La franche opposition des syndicats de fonctionnaires qui ont fait front commun dans la rue jeudi contre le texte, comptera aussi. Des élus de droite comme de gauche n'ont pas manqué dès lundi de féliciter ironiquement le gouvernement de s'être "mis à dos" tous les syndicats. Ces derniers critiquent "un passage en force" du gouvernement, qu'ils accusent de vouloir une fonction publique alignée sur les règles du privé, au détriment du statut de fonctionnaire et de l'indépendance des agents.
Olivier Dussopt le 29 avril 2019 à Paris
AFP/Archives
Le texte vise notamment, selon M. Dussopt, à davantage de "souplesse" dans le recrutement avec un recours accru aux contractuels (déjà au nombre d'un million) mais aussi des mobilités facilitées, un dispositif de rupture conventionnelle, ou encore un dialogue social "simplifié" avec une refonte des instances.
En commission, gouvernement et majorité ont donné des gages en matière de précarité ou de transparence, Olivier Dussopt annonçant notamment une prime de précarité pour certains contrats à durée déterminée (CDD).
Elle concernera les contrats inférieurs à un an et coûtera environ 400 millions d'euros par an, a précisé le secrétaire d'Etat lundi (600 millions selon la rapporteure LREM Emilie Chalas), et pourrait s'appliquer jusqu'à un salaire équivalent à deux Smic.
Effectifs, statuts, salaires dans la fonction publique en France
AFP
- "Petit bras" pour LR -
Un élu de la majorité avait dit craindre par avance des débats électriques à l'approche des élections européennes du 26 mai.
Manifestation contre le projet de réforme de la fonction publique, à Montpellier, le 9 mai 2019
AFP/Archives
Dès lundi soir, LR a défendu en vain deux motions contre le texte, Olivier Marleix dénonçant un "manque de courage" du gouvernement avec un projet assimilé à une "tartarinade". L'élu, qui avait évoqué en commission, comme d'autres LR en séance, "une espèce de mitage du statut", a notamment déploré l'absence de mesures permettant de réduire la dépense publique, son collègue Jean-Louis Masson jugeant aussi le projet "petit bras". En retour Sacha Houlié (LREM) leur a reproché de n'avoir pour seul objectif un "dogme", celui de la "suppression des agents de la fonction publique".
Pascal Brindeau (UDI-Agir) a lui estimé que le projet propose un statut "grignoté de toutes parts par le recours aux contrats", tandis que pour Sylvia Pinel (Libertés et Territoires) il est porteur de "dangers" et "pose le cadre d'une réduction des effectifs".
"Vous introduisez le ver dans le fruit du service public" avec ce texte, a lancé Hervé Saulignac (PS), tandis que pour Ugo Bernalicis (LFI) le gouvernement veut "mettre fin au statut".
Stéphane Peu (PCF) a lui dénoncé un projet "pernicieux", n'attaquant pas le statut de "front", mais par le biais du recrutement de contractuels qui joue sur son "effacement progressif".
Parmi les autres dispositions du texte qui promettent de faire débat figurent notamment des mesures pour revoir à la hausse le temps de travail des agents - dans un premier temps dans la Territoriale - ou un nouveau cadre pour un contrôle plus efficace du "pantouflage" (départs d'agents dans le privé).
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