J-3 avant le lancement de la Coupe du monde de football au Qatar. Si l’échéance approche, les critiques ne se tarissent pas. Le sénateur des Français hors de France, Olivier Cadic, a organisé ce jeudi une conférence de presse avant son départ vers le pays du golfe. Après avoir réaffirmé les intérêts relatifs au partenariat sur la sécurité unissant les deux nations, l’élu a souhaité dénoncer « le Qatar-bashing », et « l’hypocrisie » entourant l’organisation de l’événement international.
« Le rendez-vous planétaire » est, en effet, très scruté, en raison des nombreuses critiques qu’il suscite. Les questions concernant les droits des travailleurs migrants, mais aussi ses conséquences environnementales, sont régulièrement posées par des associations depuis l’attribution de la Coupe du monde à l’État pétrolier, en 2010. Surtout, c’est le chiffre de 6.500 morts sur les chantiers, avancé par le quotidien britannique The Guardian, qui a cristallisé les tensions. Chiffre démenti par les autorités qataries, mais aussi par Olivier Cadic qui a choisi d’utiliser « les chiffres de l’OIT », estimant le nombre de morts sur les chantiers en 2020 à 50 travailleurs.
Malgré un contexte épineux pour le mariage franco qatari, le président du groupe interparlementaire d’amitié France Pays du Golfe du Sénat n’a pas hésité à louer le lien qui unit les deux pays. En passant par « les succès commerciaux » à l’image du métro de Doha, fruit d’un partenariat avec la SNCF-RATP et des entités locales, aux « 18 % de commandes d’armes » effectuées par le Qatar à la France, le vice-président de la commission des affaires étrangères a rappelé voir dans le pays du golfe « un allié ».
« La pression des ONG a eu un effet positif […] sur les droits de l’homme au Qatar », estime Olivier Cadic
Le tableau positif, dressé par le sénateur, est cependant assombri par les multiples polémiques, au point de diviser l’opinion publique, et de faire marcher sur des œufs les annonceurs publicitaires. En octobre, le reportage de France Télé sur les conditions des travailleurs dans l’hôtel des Bleus à Doha avait montré les conditions de vie - loin d’être luxueuses - de ces derniers, enfonçant le clou sur la situation des ouvriers.
« Le Qatar a fait évoluer sa législation du travail », a nuancé Olivier Cadic. Comparant la situation avec celle de la Chine, le sénateur a ajouté : « L’Organisation Internationale du Travail (OIT) est présente, et peut travailler au Qatar », contrairement à la Chine. En effet, le géant du gaz a adopté un certain nombre de réformes, qui protègent davantage ses employés. En septembre 2020, le système de la Kafala, qui donnait les pleins pouvoirs aux employeurs sur les travailleurs étrangers par le biais d’un système de parrainage, avait été suspendu. « Cela va dans le bon sens », s’est réjoui l’élu, reconnaissant cependant « un rythme » d’application des réformes « qu’on peut regretter ».
Un point de vue que ne partage pas son collègue communiste le sénateur Jérémy Bacchi qui a interpellé mercredi la ministre des Sports sur « l’exploitation des travailleurs migrants » lors des questions d’actualité au gouvernement.
Olivier Cadic s’est déclaré inquiet d’un « Qatar-bashing », qui selon lui, risquerait de détourner le pays vers la Chine, laquelle utiliserait « un narratif […] expliquant que les droits de l’homme ne sont pas le bon modèle pour le développement du pays », a explicité le vice-président de la commission des affaires étrangères.
Un bilan « neutre en carbone » ?
Second point d’achoppement : l’écologie. Si le Qatar s’est donné l’objectif de « neutralité carbone », de nombreuses associations ont dénoncé une forme de « greenwashing ». Stades ouverts et climatisés, logement des supporters dans les pays voisins - et donc - trajets en avion, la liste des reproches est longue. En juin 2021, un rapport de la Fifa indiquait que le Mondial 2022 produirait jusqu’à 3.6 millions de tonnes de dioxyde de carbone.
« Est-ce qu’on doit arrêter les événements internationaux ? Peut-être, mais aujourd’hui, on doit faire la Coupe du monde », a indiqué le sénateur centriste. Ce dernier s’attend avant tout à faire un « retour d’expérience » post-mondial pour voir ce qui sera améliorable… Avec dans toutes les têtes, les Jeux olympiques de 2024 à Paris. Dans ce climat sous tension, il sera difficile de ne pas « politiser le sport », contrairement au souhait formulé la veille par Emmanuel Macron.