Invité de la matinale de Public Sénat, Mathieu Darnaud, président du groupe Les Républicains au Sénat, a répété ce jeudi que son parti ne participerait pas à « un gouvernement dont le Premier ministre serait de gauche et porterait le programme du Nouveau Front populaire ». Le responsable pointe « l’irresponsabilité » des forces politiques qui ont voté la censure.
Covid-19 dans l’Oise : « Nous étions des pestiférés » déplore le maire de Crépy-en-Valois
Par Public Sénat
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Avec la première victime française du Covid-19, un enseignant décédé dans la nuit du 26 au 27 février dernier, le département de l’Oise fait partie des territoires français les plus impactés par la pandémie. Ce jeudi, plusieurs acteurs de la santé et du territoire étaient auditionnés par la commission d’enquête pour l'évaluation des politiques publiques face aux grandes pandémies à la lumière de la crise sanitaire de la covid-19 et de sa gestion. « Nous entendons mener un examen de la gestion de la crise dans le département de l’Oise, pour comprendre comment celle-ci a été organisée, et quelles leçons nous devons en tirer », détaille le sénateur LR René-Paul Savary. Pour répondre à ces questions sont présents plusieurs membres du système de santé, dont la directrice de l’hôpital Saint-Lazare, Mairie-Cécile Darmois, le directeur de l’Agence régionale de santé (ARS) des Hauts-de-France Étienne Champion, l’épidémiologiste Arnaud Fontanay ; mais aussi le préfet de l’Oise, Louis Le Franc, la présidente du conseil départemental Nadège Lefebvre, et le maire de Crépy-en-Valois, Bruno Fortier.
Le témoignage poignant du maire de Crépy-en-Valois
Dans leurs propos liminaires, chacun des acteurs a reconnu que le département de l’Oise avait été la cible, pendant la pandémie, d’une importante propagation du virus. « La pandémie a été très longue dans le département, et a entraîné un choc sanitaire et économique des plus importants », constate Louis Le Franc, citant 591 personnes décédées des suites du virus dans ce département. « La crise n’a pas commencé le 26 février », renchérit Étienne Champion. « Nous avions des signes d’alerte dès le 23 janvier, et nous avons commencé à préparer la crise en travaillant avec l’ensemble des acteurs de terrain, en coordination avec les pouvoirs publics et les instances nationales. » Le maire de Crépy-en-Valois, Bruno Fortier, dresse quant à lui, d’une voix émue, le portrait d’une ville en pleine crise, soumise à une double pression médiatique et sanitaire, et dans laquelle l’implication des élus de terrains a été fondamentale. « Nous étions des pestiférés...», déplore Bruno Fortier. Et si Nadège Lefebvre salue « l’engagement et la mobilisation des nombreux élus locaux », elle cible les faiblesses et difficultés que les différents acteurs de la crise ont rencontrées dans l’organisation.
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« L’organisation régionalisée de certains services de l’état a montré ses limites », soutient la présidente du conseil départemental. « Beaucoup de temps a été perdu en échanges régionaux avec des préfets ou des présidents de conseils départementaux confrontés à des situations très différentes de la nôtre ». Elle pointe également du doigt la complexité de la double tutelle exercée par le département et l’ARS sur les Ehpad : « Les directeurs des établissements devaient en permanence jongler avec les interlocuteurs selon la nature de leurs besoins ». Comme dans les zones les plus touchées par le virus, les établissements d’accueil pour personnes âgées ont fait partie des endroits où la Covid-19 a beaucoup circulé, entraînant un nombre important de décès sur des patients souvent fragiles. « Le sujet de la double tutelle sur les Ehpad est un vrai sujet », reconnaît Étienne Champion. « Mais cette crise nous a montré que l’imbrication sanitaire médico-sociale a été fondamentale. Cette double tutelle, certes, est un peu complexe mais elle permet aussi un ancrage local et un lien avec le sanitaire très important. »
« Nous avons pris notre sort en main »
S’intéressant particulièrement à la temporalité de l’évolution du virus et de l’organisation du département, la rapporteure de la mission d’enquête, Catherine Déroche s’enquiert des mesures mises en place dès le mois de janvier, après les premiers signes d’alerte. « On commence à se préparer à partir du 23 janvier, en organisant une visio quotidienne avec les instances nationales, pour avoir une chaîne de réactivité très forte dès la fin janvier », détaille le directeur de l’ARS. Le préfet, quant à lui, décrit la mise en place de mesures spécifiques au département. « Nous avons pratiqué, dans l’Oise, une forme d’interministérialité locale déconcentrée, nous avons pris notre sort en main. En tant que préfet, j’étais dans une situation où, en l’absence de mesures nationales, j’ai dû prendre des décisions locales, en collaboration avec le responsable sanitaire, le responsable académique et les élus du territoire. » Des mesures coercitives, comme l’interdiction de rassemblement pour éviter la propagation du virus, ont ainsi été mises en place de manière anticipée dans le département de l’Oise.
Une prise de conscience tardive de la circulation du virus
Malgré tout, Arnaud Fontanay, qui a mené avec l’Institut Pasteur une recherche sur l’évolution du virus dans le département note que, malgré les premiers signes d’alerte en janvier, « il n’y avait pas de circulation connue du virus avant le 26 février. » « Nous avons passé le mois de février à faire du tracing », relate Étienne Champion. « Avant le 26, nous n’avions pas conscience que le virus circulait dans l’Oise. Nous pensions être dans la même situation que les Contamines-Montjoie : que nous aurions des cas de contaminés qui revenaient de Chine, ou qui avaient été en contact avec une personne qui en revenait. C’était finalement une situation totalement différente, mais qui n’a pas empêché une activation très forte de la veille sanitaire. »
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Sur les sujets des masques, notamment, le maire de Crépy-en-Valois s’en est enquis dès le mois de janvier, constatant que les stocks de la commune étaient épuisés. « Nous ne nous sommes trouvés en pénurie de masques que pendant les premières semaines », relate Nadège Lefebvre, qui cite le problème particulier des pompes funèbres. « Cela a été l’un des problèmes les plus importants, les morgues étaient saturées, il fallait trouver des solutions, car la pénurie de masques touchait le secteur mais le personnel ne pouvait travailler sans ». Finalement, grâce à un travail de relai entre les élus locaux et les corps intermédiaires tels que l’ARS, les stocks de masques sont renouvelés et la pénurie ne dure pas. Dans les hôpitaux de l’Oise, on assure d’ailleurs que le matériel n’a pas manqué. « Nous n’avons jamais été en pénurie de matériel, nous avons souvent été à flux tendu, mais nous n’avons jamais manqué », soutient Marie-Cécile Darmois. « Nous disposions d’un stock de masques FFP2 et chirurgicaux, et nous avons pu commander des équipements de protection dès le 26 février. »
Quelques semaines après la crise, les différents acteurs dressent donc le bilan des mesures prises face à l’épidémie, et entendent tirer les leçons de cet épisode, dans la crainte d’une deuxième vague. « Il est évident qu’il est nécessaire de s’inscrire dans une logique de complémentarité », conclue Louis Le Franc. « Les corps intermédiaires et le national doivent travailler en complémentarité avec les acteurs de terrain, notamment les maires, dont le rôle pendant la crise a été absolument déterminant. »