Covid-19 : un vaccin obligatoire ? Les sénateurs divisés

Covid-19 : un vaccin obligatoire ? Les sénateurs divisés

La vague d’optimisme suscitée par l’annonce des sociétés Pfizer et BioNTECH ne s’est pas arrêtée aux portes du Palais du Luxembourg. Les sénateurs voient dans un vaccin potentiel contre le coronavirus une nouvelle encourageante. Mais l’opportunité d’une vaccination obligatoire ne fait pas l’unanimité.
Public Sénat

Par Steve Jourdin

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Une lueur d’espoir

Efficace à 90 %, mais approuvé à 100 % par les sénateurs. « C’est une excellente nouvelle. Obtenir aussi rapidement un candidat vaccin est une chose exceptionnelle » se réjouit la présidente de la commission des affaires sociales Catherine Deroche (LR). « D’autant plus que, jusque-là, lorsque l’on posait la question des délais aux spécialistes, nous étions sur des périodes beaucoup plus longues » ajoute celle qui est aussi rapporteure de la commission d’enquête COVID du Sénat. L’annonce de l’américain Pfizer et de son partenaire allemand BioNTECH est saluée sur tous les bancs de l’hémicycle. « C’est quelque chose de très positif ! Mais cela demande encore confirmation. Quelle est la durée de la protection dans le temps, quel sera le délai de production du vaccin ? Il y a encore beaucoup de questions devant nous » nuance cependant le socialiste Bernard Jomier, également rapporteur de la commission d’enquête COVID.

Il ne faudrait en effet pas susciter de faux espoirs dans la population selon Véronique Guillotin (RDSE) : « Nous devons bien saisir tous les enjeux de cette annonce. Il ne s’agit pour l’heure que d’une phase expérimentale. Restons prudents! » Les scientifiques ont réalisé un essai dit de phase 3, mais d’autres analyses doivent encore être menées avant de passer au stade de l’homologation par les autorités sanitaires. Les sénateurs préfèrent rester mesurés : « J’attends de voir si ce vaccin est vraiment efficace, confie Alain Milon. Les chercheurs ont utilisé une technique nouvelle (ARN messager, ndlr). Or cette technique n’a jusqu’à présent jamais fait ses preuves. Elle n’a encore jamais été approuvée dans le cadre d’un vaccin pour l’homme » remarque le sénateur LR du Vaucluse.

 

Vers une vaccination obligatoire ?

Si le vaccin venait à prouver son efficacité, se poserait alors la question d’une vaccination obligatoire. Ce mardi, le député européen Yannick Jadot (EELV) s’est dit favorable à une telle obligation. 

Reste à déterminer les modalités d’une telle vaccination. « Peut-on vraiment obliger des personnes adultes à se faire vacciner ? » se demande la sénatrice Catherine Procaccia (LR), qui rappelle que les onze vaccins aujourd’hui obligatoires sont imposés aux jeunes enfants au moment de leur adhésion à certains lieux de vie collective (crèches, écoles, colonies de vacances, etc.). « À défaut de le rendre obligatoire à tous les Français, nous pourrions cibler certaines parties de la population, comme les personnes âgées ou les personnes à risques » ajoute-t-elle.

Pour le sénateur René-Paul Savary (LR), une vaccination obligatoire serait aussi une bonne chose, à condition que les médecins puissent en assurer le contrôle : « Nous devons rendre le vaccin contre le Covid obligatoire pour les personnes les plus fragiles, sauf dérogation accordée par le médecin. Il faudrait d’ailleurs étendre cette obligation au vaccin contre la grippe ». Alors que les sénateurs examinent actuellement le budget de la sécurité sociale pour 2021, Alain Milon (LR) met cependant en garde : « Les comptes sont dans le rouge. Nous ne pouvons pas rendre le vaccin contre le Covid entièrement obligatoire, c’est-à-dire remboursable à 100 % par la sécurité sociale. Il faut que ceux qui se font vacciner mettent la main à la poche, la médecine a un coût, nous avons tendance à l’oublier », regrette ce médecin de formation.

 

La défiance des Français

La vaccination obligatoire n’a pas que des partisans au Sénat. Alors qu’un récent sondage IFOP indique que près de la moitié des Français n’ont pas l’intention de se faire vacciner contre le Covid-19, certains élus constatent une colère de moins en moins sourde d’une partie de la population envers les choix du gouvernement. Le sénateur Bernard Jomier fait partie de ceux qui considèrent que l’obligation vaccinale n’est pas la meilleure manière d’obtenir l’adhésion des Français. « Nous sommes confrontés à une grave crise de confiance au sein de la société. Cette crise est renforcée par la façon dont l’épidémie a été gérée par l’exécutif. Le rejet actuel de nos concitoyens envers un potentiel vaccin traduit l’échec du gouvernement dans la gestion de l’épidémie » note l’élu de Paris.


D’autres sénateurs estiment qu’il est encore trop tôt pour évoquer les contours de la future stratégie de vaccination. « Nous n’en sommes pas encore là. Le gouvernement a tout intérêt à faire preuve dès aujourd’hui de pédagogie et de transparence sur les éventuels vaccins. Il faut aller chercher la confiance des Français. Cette fois-ci, il ne faut pas se louper, les enjeux sont trop importants » résume Véronique Guillotin (RDSE).

Dans la même thématique

Strasbourg : European Parliament session
6min

Politique

Européennes 2024 : que disent les derniers sondages sur les tendances ?

Jordan Bardella reste toujours loin devant, quand Valérie Hayer peine à contenir la dynamique de Raphaël Glucksmann. Le candidat PS/Place Publique talonne de plus en plus la liste de la majorité présidentielle. Manon Aubry pour LFI progresse un peu, quand François-Xavier Bellamy est plus ou moins stable.

Le