Le sort de la réforme des retraites est désormais entre les mains de François Bayrou. Après une semaine de négociations, les socialistes continuent de réclamer le gel du décalage de l’âge légal de départ avant de s’engager sur un accord de non-censure du gouvernement, mais la droite refuse d’en entendre parler. Les discussions avec le PS et l’exécutif pourraient se poursuivre mardi.
Cyclone Chido à Mayotte : « On a l’impression que François Bayrou n’a pas pris la mesure de sa fonction »
Par Simon Barbarit
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A peine nommé à Matignon, François Bayrou a-t-il commis sa première « faute politique », comme l’a affirmé, lundi soir, un élu d’opposition du conseil municipal de Pau auquel assistait le Premier ministre ?
48 heures après le passage du cyclone le plus dévastateur que Mayotte n’a jamais connu en un siècle, le maire de Pau ne s’est en tout cas pas privé d’une première polémique. Elle semblait couver depuis la première conférence de presse sur la catastrophe dimanche. Lorsqu’interrogé sur la situation au côté du ministre de l’Intérieur, du ministre chargé des Outre-mer, François-Noël Buffet, et de Thani Mohamed Soilihi, secrétaire d’Etat chargé de la francophonie et des partenariats internationaux, François Bayrou avait préféré laisser répondre Bruno Retailleau en quittant la pièce devant les caméras, donnant l’impression de les laisser en plan.
« Evidement que c’est une connerie »
Le lendemain, son choix de se rendre en Falcon dans sa ville de Pau dont il est resté maire pour présider le conseil municipal, hérisse jusque dans le camp présidentiel. Et ce, même s’il a suivi à distance la réunion de crise sur Mayotte. « Evidement que c’est une connerie. Les Français n’attendaient pas que son premier déplacement se fasse à Pau, alors qu’on n’a ni budget ni de gouvernement », soupire un sénateur Renaissance. La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet aurait également préféré que « le Premier ministre, au lieu de prendre un avion pour Pau, prenne l’avion pour Mamoudzou ».
« Si le drame s’était produit dans un autre département, François Bayrou se serait rendu sur place »
Sans surprise, les critiques les plus virulentes sont parties de la gauche. « Ça renvoie une image catastrophique. Comment penser que face à un tel drame, sa présence à Pau était indispensable. Quel mépris pour les Mahorais », s’emporte la sénatrice socialiste de Seine-Saint-Denis, Corinne Narassiguin qui pense, à l’instar du président du groupe écologiste du Sénat, Guillaume Gontard que « si le drame s’était produit dans un autre département, François Bayrou se serait rendu sur place ». « Vous imaginez, alors qu’une catastrophe climatique se déroule chez moi en Isère, un Premier ministre qui assiste tranquillement à son conseil municipal, ce serait inconcevable », appuie Guillaume Gontard qui ressort justement d’une consultation avec le Premier ministre. « Avec une telle catastrophe, on s’attendait à ce que le rendez-vous soit annulé. François Bayrou a pratiquement arraché son poste de Premier ministre et on a l’impression qu’il n’a pas pris la mesure de sa fonction. Je ne sais pas ce qu’il a voulu faire en allant à Pau. Mais si l’objectif, c’était de faire la démonstration qu’il ne fallait pas revenir sur le non-cumul des mandats, on peut dire que c’est réussi », ironise le sénateur en référence aux propos du Premier ministre. Devant le conseil municipal de Pau, François Bayrou a estimé au contraire que rendre « incompatibles les responsabilités locales et nationales », était « une erreur ».
« A minima, il devait être présent à la réunion de crise »
« Je n’ai rien contre le cumul des mandats. On peut discuter de cette proposition. En revanche, François Bayrou a sûrement des adjoints très compétents à Pau pour le suppléer. Et en tant que Premier ministre, il doit être au service de notre pays. S’il ne pouvait se rendre sur place aux côtés des ministres de l’Intérieur et de l’Outre-mer, a minima il devait être présent à la réunion de crise, être pleinement investi en support des Mahorais », estime la présidente du groupe communiste, Cécile Cukierman.
« J’étais aussi à ma place de citoyen », se défend François Bayrou
Ce mardi, devant les députés, François Bayrou a répondu à la charge de Mathilde Panot sur ce sujet. « Pau, c’est en France (…) J’ai présidé le conseil municipal de ma ville de 19h à 23h. Je considère que, ce faisant, j’étais aussi à ma place de citoyen et j’ai l’intention de défendre cette idée que la citoyenneté ne se divise pas entre être à Paris et occuper ses responsabilités de citoyen sur le terrain », s’est-il défendu estimant qu’« on n’a pas le droit de séparer la province et le cercle des pouvoirs à Paris ».
Du côté de la droite, la séquence est un non-évènement. « Tout le monde ne va pas débarquer à Mayotte […] Ce qui est anormal c’est qu’on fait polémique de tout » […] « Il avait un conseil municipal, il a fait ce qu’il devait faire », a tranché dans la matinale de Public Sénat, Hervé Marseille, le président de l’UDI et du groupe Union centriste au Sénat.
Les sénateurs LR qui ont pourtant accueilli fraîchement la nomination de François Bayrou à Matignon, retiennent aussi leurs critiques. « Personnellement, je n’aurais pas fait ce choix. Mais, il y a tellement de sujets beaucoup plus importants », balaye un sénateur. Le porte-parole du groupe, le sénateur des Pyrénées-Atlantiques, Max Brisson, « ne s’attendait pas à cette polémique ». « Ce conseil municipal était prévu de longue date. Et franchement, nos interrogations ne sont pas là ». Dans l’attente de la nomination d’un nouveau gouvernement, la droite du Sénat demande, en effet, au Premier ministre qu’il éclaircisse rapidement sa feuille de route » sur les « sujets régaliens », comme « l’immigration » ou encore « l’urgence agricole » et que Les Républicains « soient représentés de façon significative » au gouvernement, a rappelé à l’AFP lundi, le chef de file des sénateurs LR, lundi en sortant de Matignon.
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