Décentralisation : le Sénat renforce le rôle des élus locaux dans la gouvernance des ARS
Dans le cadre de l’examen du projet de loi de décentralisation dit « 3DS », les sénateurs ont aujourd’hui abordé la réforme de la gouvernance des Agences régionales de santé (ARS). La crise sanitaire a en effet mis en évidence une coordination insuffisante entre les ARS et les élus locaux. Sans surprise, le Sénat est allé plus loin que le gouvernement sur le sujet, notamment sur la réforme du conseil de surveillance des ARS. Celui-ci devient désormais un conseil d’administration coprésidé par le préfet de région et le président du conseil régional et dont les voix sont également réparties entre les représentants de l’Etat, de l’assurance maladie, des collectivités territoriales et des usagers.
« Je ne comprends pas bien la position du gouvernement » finit par lâcher Françoise Gatel, sénatrice centriste, après une nouvelle tentative de Jacqueline Gourault de concilier une volonté de « préserver un équilibre dans la gouvernance des ARS », sans en fixer la composition dans la loi. La ministre a beau « prendre un engagement » devant le Sénat et répéter que « le gouvernement s’engage » à respecter un certain équilibre par décret, les sénateurs ne semblent pas convaincus. Et pour cause, Jacqueline Gourault ne semble elle-même pas en mesure de pouvoir donner plus de précisions : « Je ne peux pas m’engager plus loin pour le ministère de la Santé, qui m’a donné ses consignes, donc je vous les donne. »
« L’ARS ne peut pas agir sans le bras armé que sont les collectivités »
Cet échange pour le moins confus sur la composition des futurs conseils d’administration des ARS donne une assez bonne idée du ton général des débats. Les sénateurs et le gouvernement semblent partager le même constat. La pandémie de Covid-19 a montré que les Agences régionales de santé ont eu du mal à se coordonner avec les élus locaux pour avoir une politique sanitaire efficace dans un contexte de crise sanitaire. « Les rapports convergent tous vers le fait que cette crise a mis en évidence une articulation indispensable entre l’Etat et les collectivités. Mais l’ARS ne peut pas agir sans le bras armé que sont les collectivités » résume ainsi Françoise Gatel. « Nous sommes d’accord sur l’objectif de préserver un équilibre dans la gouvernance des ARS » abonde la ministre de la Cohésion des territoires.
Pourtant, la commission a fortement remanié le texte du gouvernement, comme l’explique Alain Milon, rapporteur des dispositions sanitaires du projet de loi : « Dans le projet de loi du gouvernement, c’est l’Etat qui avait toujours raison dans ce conseil d’administration. Ce que nous avons proposé, c’est que le président du conseil régional préside le conseil d’administration avec le préfet de région et que le nombre de voix de l’Etat soit égal au nombre de voix des élus locaux, de l’assurance-maladie et des usagers, de manière à ce qu’on ait un conseil d’administration qui puisse décider à la majorité de ce qu’il leur semble bien ou pas bien pour la région. »
« Malheureusement il y a un décalage entre le discours tenu par Olivier Véran et Jacqueline Gourault »
Même constat de l’autre côté de l’hémicycle, où Bernard Jomier, sénateur socialiste, juge le texte initial proposé par le gouvernement insuffisant : « On a un gouvernement qui nous a présenté un texte qui ne change pas grand-chose sur la gouvernance des ARS. Au Sénat on a adopté un texte tout de même nettement plus ambitieux. » Mais alors comment expliquer que sur l’amendement de Bernard Jomier proposant d’inscrire l’égalité des voix au sein du conseil d’administration dans la loi, Jacqueline Gourault explique aux sénateurs que « le souci d’équilibre qui inspire l’amendement ne nous pose pas de difficultés » ?
Le sénateur socialiste de Paris y voit un décalage entre les discours et la véritable position législative du gouvernement : « Malheureusement il y a un décalage entre le discours tenu par Olivier Véran et Jacqueline Gourault, qui sur le principe disent qu’ils souhaitent un renforcement du rôle départemental des ARS, mais qui refusent de l’inscrire dans le texte de la loi ou dans la partie réglementaire. Il y a quelque chose qui n’est pas compréhensible. » Alain Milon a lui aussi noté ce décalage, mais reste optimiste : « Madame Gourault est une ancienne sénatrice, elle est très ouverte aux propositions du Sénat. J’espère qu’elle ne sera pas bouchée dans ses intentions par le gouvernement ou l’Assemblée nationale. »
« Quand on finance, on a le droit de dire quelque chose »
A l’heure actuelle, la position du gouvernement ne semble pas tout à fait arrêtée. Jacqueline Gourault se dit en effet « sensible » au « souci d’équilibre » proposé par les sénateurs, tout en rappelant que « le sanitaire est une compétence d’Etat et qu’il est donc normal que l’Etat soit majoritaire. » La ministre de la Cohésion des territoires précise : « Qu’il y ait un travail de rapprochement, c’est évident, mais nous sommes dans une compétence clairement régalienne.
Une compétence clairement régalienne, qui n’empêche pas le gouvernement d’autoriser dans l’article suivant les collectivités à financer « l’investissement des établissements de santé ». Une double peine pour Alain Milon : « On parle de l’administration de l’ARS et la ministre nous dit que ce n’est pas de la compétence de la région. Sauf que dans l’article suivant, le gouvernement propose que la région puisse participer à hauteur de millions d’euros, mais vous n’avez le droit de rien dire. Or quand on finance, on a le droit de dire quelque chose. » Le Sénat a donc limité ces investissements à des contributions volontaires.
Le projet de réforme des Agences régionales de santé du gouvernement a donc été profondément remanié par le Sénat en première lecture, mais dans le cadre d’un texte dont l’objet reste la décentralisation, et pas une réforme du système de soin global. C’est ce qu’ont pu regretter les sénateurs sur un certain nombre de sujets discutés dans ce texte de loi « fourre-tout », mais sans espoir de pouvoir revenir sur les équilibres globaux. Concernant la gouvernance des ARS, Bernard Jomier explique : « La commission a tenté de mettre un peu d’ordre dans tout ça et là on entre dans une question d’organisation générale du système de soin, qui n’est pas l’objet de cette loi et qui montre les limites de ce que l’on est en train de faire. »
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