Délinquance financière : « 1,129 milliard saisi en 2024 », indique Bruno Retailleau

Auditionné par la commission d’enquête du Sénat sur la délinquance financière,  Bruno Retailleau a esquissé plusieurs pistes d’action essentiellement en lien avec la lutte contre le narcotrafic, comme un recours plus accru à la présomption de blanchiment.
Simon Barbarit

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Il n’y a pas si longtemps Bruno Retailleau était de l’autre côté de la table des commissions du Sénat. Pour la première fois, le ministre de l’Intérieur a prêté serment devant une commission d’enquête du Sénat. Celle-ci porte sur la délinquance financière. Elle est présidée par le sénateur du Lot (groupe RDSE), Raphaël Daubet, et sa rapporteure, la sénatrice centriste, Nathalie Goulet.

Après le propos liminaire du ministre, la sénatrice a rappelé que les travaux de la commission ne portaient pas uniquement sur le narcotrafic, soulignant la « pluridisciplinarité de la criminalité organisée, tel que « le trafic de migrants, de pierres précieuses ou d’art, etc.)

Présomption anti-blanchiment

Bruno Retailleau est lui resté dans son couloir ramenant insensiblement son propos à la lutte contre le narcotrafic dont le chiffre d’affaires en France évalué entre 3 et 6 milliards d’euros dans le rapport du Sénat. « On est sûrement bien au-delà », a estimé le ministre. La proposition de loi, issue de ce rapport, votée il y a quelques semaines, comporte, en effet, un volet antiblanchiment. « On a des outils qui sont trop peu utilisés », a-t-il regretté citant la présomption de blanchiment. Une procédure qui inverse la charge de la preuve et oblige les suspects à prouver l’origine de leurs fonds ou de leurs biens.

A noter qu’une disposition de lutte contre le blanchiment a été supprimée du texte lors de son passage en commission mixte paritaire. Il s’agit de la procédure d’injonction pour richesse inexpliquée. Elle avait pour but d’obliger les personnes suspectées de trafic de stupéfiants ou de complicité, à s’expliquer sur tout écart manifeste entre leurs revenus et leur train de vie. En cas d’absence de réponse ou de réponse insuffisante, les biens pouvaient être saisis et faisaient l’objet d’une présomption de blanchiment. « Les députés ont trouvé que la procédure n’était pas assez bordée juridiquement », avait expliqué à publicsenat.fr Jérôme Durain, le rapporteur PS.

Reste d’autres mesures comme la fermeture temporaire par les préfets des commerces suspectés de blanchiment, l’interdiction du paiement en liquide des locations de voiture et bien sûr la présomption de blanchiment étendue aux « mixeurs » de cryptoactifs. « Je ne sais pas pourquoi, on l’utilise (cette procédure) très peu. Mais c’est un outil qui est fondamental », a regretté Bruno Retailleau.

Sur ce point, le ministre rappelle une piste consistant à mettre en place d’un fichier nominatif de détenteurs de cryptomonnaies ». « On doit pouvoir pousser ce point-là », a-t-il demandé reconnaissant que la question des fichiers « était délicate. », comparant cette idée à l’obligation faite aux plateformes de messageries cryptées, comme WhatsApp ou Signal, de communiquer les correspondances des narcotrafiquants. une mesure votée au Sénat dans le cadre de la loi narcotrafic avant d’être supprimée lors de la commission mixte paritaire.

Un plan national anticorruption

Le ministre de l’Intérieur a rappelé « qu’un plan intergouvernemental contre la criminalité organisée » avait été formalisé le 30 avril. « Il faut mobiliser les bailleurs sociaux, les services de sécurité sociale et les services fiscaux. C’est capital », a-t-il estimé. Un plan national anticorruption impliquant Beauvau et Bercy est « en cours de finalisation » comportera une trentaine de mesures actuellement « en cours d’arbitrage ».

En 2024, « 1,129 milliard a été saisi par la police et la gendarmerie nationale dont plus de 122 millions qui ont été saisis en lien avec des infractions à la législation sur les stupéfiants. Donc ce n’est pas majoritaire », a-t-il relevé espérant « mieux faire » à l’avenir. Il précise que la valorisation de la drogue saisie n’est pas prise en compte dans ce calcul.

La commission d’enquête rendra ses conclusions le 18 juin. La rapporteure a dit espérer qu’elles provoqueront « le même sursaut » au sein du gouvernement que celui provoqué par la commission d’enquête narcotrafic.

 

Partager cet article

Dans la même thématique

Délinquance financière : « 1,129 milliard saisi en 2024 », indique Bruno Retailleau
3min

Politique

Smartphone à l’entrée au collège : le dilemme de cette maman

À l’heure où plusieurs sociétés savantes alertent sur les dangers d’une trop forte exposition des enfants aux écrans, Clémentine Legrand, maman active et parisienne s’interroge sur la pertinence de fournir, au plus jeune de ses enfants, un téléphone pour son entrée au collège. Interrogée dans l’émission Dialogue citoyen, présentée par Quentin Calmet, elle revient sur les risques encourus par les enfants au moment du passage au collège.

Le

Délinquance financière : « 1,129 milliard saisi en 2024 », indique Bruno Retailleau
4min

Politique

Ministère de l’Intérieur : « Ce qui m’a frappé, c’est le rapport quasiment quotidien à la mort » déclare le dessinateur Mathieu Sapin

Il est toujours dans le décor, un carnet de croquis à la main. Depuis presque 15 ans maintenant, Mathieu Sapin s’est fait une spécialité dans ses ouvrages de nous dévoiler les coulisses du monde politique. Dans son dernier opus A l’intérieur, il embarque avec les forces de l’ordre. Police judiciaire, compagnie républicaine de sécurité, le dessinateur qui se classe à gauche nous dévoile au micro de Rebecca Fitoussi dan l’émission Un monde, un regard les raisons qui l’ont poussées à accepter de franchir les portes du ministère de la place Beauvau, alors dirigé par Gérald Darmanin.

Le

Cats and dogs shelter in Nabeul .
6min

Politique

Vente de chiens et de chats : la loi est-elle contournée ?

Moins d’un mois après le lancement de la mission d’information visant à contrôler le respect de la loi dite maltraitance animale, la commission des affaires économiques a publié ce 11 juin un rapport sur l’encadrement des modalités de vente des chiens et chats. Un rapport qui pointe les situations d’abandon et les dérives dans la vente des animaux de compagnie.

Le