« Un astre mort ». Voilà comment le politologue Stéphane Rozès, président de CAP et enseignant à Sciences-po et HEC, qualifie le parti socialiste, ou plutôt « ce qu’il en reste » comme le précise Xavier Iacovelli, sénateur PS des Hauts-de-Seine.
Dimanche, le parti à la rose a subi une déroute sans précédent à l’issue du premier tour des législatives partielles. Dans le territoire du Belfort, la gauche socialiste n’a récolté que 2,6% des voix, se plaçant ainsi derrière Debout la France, le parti de Nicolas Dupont-Aignan, et les Verts. Un « score de petite secte », estime Stéphane Rozès, qui confirme qu’il s’agit « sans doute du niveau le plus bas jamais atteint par cette grande famille qu’était la famille socialiste ».
Législatives partielles : un « score de petite secte » pour le PS, estime Stéphane Rozès
« Se reconstruire » ou « renaître »
De son côté, Xavier Iacovelli analyse ce résultat comme étant « symptomatique du PS actuellement ». Depuis la défaite de Benoît Hamon à la présidentielle – 6,35% des voix, « un score presque groupusculaire » commente Stéphane Rozès – le parti est en déliquescence. Et les résultats de dimanche ne font que le confirmer. Le Parti socialiste peut-il se « reconstruire » comme l’envisage Stéphane Le Foll s’il est élu à sa tête en mars prochain ?
Olivier Faure, l’un de ses concurrents, plaide plutôt pour une « renaissance », comme si le parti était déjà mort. Le président du groupe socialiste au Palais Bourbon comparait ce matin sur France Inter l’appareil socialiste à « un bus où tous les dirigeants se disputent le volant et tous les copilotes sont sur le côté avec chacun une direction ». « Comment voulez-vous mettre ses enfants dans ce bus ? », interroge-t-il.
Pour Olivier Faure, le PS est « un bus où tous les dirigeants se disputent le volant et tous les copilotes sont sur le côté avec chacun une direction »
« Faire repartir les territoires »
D’après le député socialiste, son parti a certes « été sanctionné », mais « il le méritait ». Il estime qu’il est désormais temps de retourner aux fondamentaux de Jaurès tout en « entrant dans la modernité ». Une volonté partagée par le sénateur PS Xavier Iacovelli, qui remarque d’ailleurs que « c’est le seul parti à ne pas utiliser le vote électronique ». Selon lui, seul Luc Carvounas à la présidence du PS pourrait changer la donne, grâce à sa « volonté de faire repartir des territoires » : « La refondation ne passera pas par le Congrès à Aubervilliers (7 et 8 avril prochains) mais partira des territoires. »
Aucune femme candidate à la présidence
La ligne de défense des socialistes est claire : après le constat amer de la défaite aux législatives partielles, il convient de souligner la victoire de la « gauche rassemblée » à Auterive (Haute-Garonne), à l’issue des élections municipales anticipées. Un argument de plus pour rappeler que le parti à la rose est encore présent sur le territoire métropolitain, et notamment dans les grandes métropoles et villes de France : Anne Hidalgo à Paris, Martine Aubry à Lille, Johanna Rolland à Nantes… Toutes socialistes, mais également des femmes. Et là encore, à gauche, on ne manque pas de le rappeler pour contrer le « mauvais procès » fait au PS pour l’absence de femmes candidates à la présidence du parti, aux côtés de Stéphane Le Foll, Emmanuel Maurel, Luc Carvounas et Olivier Faure. « Le parti a toujours mis en avant la parité », renchérit Xavier Iacovelli avant d’ajouter qu’ « on n’est pas à un concours de beauté ».
Xavier Iacovelli : "Le PS a toujours mis en avant la parité"
« Peu de femmes voulaient y aller », tempère Gérard Grunberg, directeur de recherche émérite au CNRS ainsi qu’au centre d’études européennes de Sciences Po. Najat Vallaud-Belkacem avait en effet renoncé à se présenter. Delphine Batho et Myriam Petit n’ont quant à elles pas récolté les seize parrainages nécessaires pour candidater.
« 2018 sera une année fondamentale »
Reste à élire une figure capable d’incarner le leadership du Parti socialiste, « tiraillé entre le macronisme, « avatar moderne du bonapartisme », et la France insoumise, « qui occupe le terrain de la vocation protestataire et tribunitienne du parti communiste », analyse Stéphane Rozès. « Est-ce que la personnalité élue en avril le sera avec une large majorité, suffisante pour avoir un certain leadership ? » doute Gérard Grunberg, peu optimiste quant à l’avenir du parti, qu’il estime « ne pas être en état de se redresser pour l’instant ». D’autant que les élections européennes approchent (mai 2019) et qu’il est peu probable que le score du PS dépasse les 5% selon le politologue. Et de conclure : « 2018 sera une année fondamentale. Le PS va-t-il être définitivement marginalisé comme le PCF ou se redresser ? » Avec un nombre de militants qui s’étiole, des débâcles électorales qui s’accentuent et des membres qui désertent, le chemin vers le redressement s’annonce encore long.