Des retraités désabusés face à la présidentielle
"Mon vote ? Vous voulez dire pour le concours Super mamie ?": au salon des Seniors de la Roche-sur-Yon, les retraités français qui déambulent...

Des retraités désabusés face à la présidentielle

"Mon vote ? Vous voulez dire pour le concours Super mamie ?": au salon des Seniors de la Roche-sur-Yon, les retraités français qui déambulent...
Public Sénat

Par Marie WOLFROM

Temps de lecture :

4 min

Publié le

"Mon vote ? Vous voulez dire pour le concours Super mamie ?": au salon des Seniors de la Roche-sur-Yon, les retraités français qui déambulent dans les allées s'avouent frustrés par une campagne présidentielle décousue et éloignée de leur quotidien.

Pimpante dans son tailleur gris souris, Eliane met une dernière touche à son maquillage avant de monter en scène. Cette ancienne vendeuse d'oeufs, poules et lapins, qui a longtemps travaillé sur les marchés, est l'une des six candidates au titre de "Super Mamie Vendée", décerné vendredi dans ce département de l'ouest de la France.

Mais de l'autre élection à venir, celle du président de la République, cette dynamique grand-mère de 82 ans, adepte des bains glacés dans l'océan, n'aime guère parler. "Je ne sais pas pour qui je vais voter", soupire-t-elle, avant de se lancer dans un trépidant Charleston.

Une participante au concours de
Une participante au concours de "Super Mamie" à La Roche-sur-Yon, dans l'ouest de la France, le 3 mars 2017
AFP

Le vote des seniors, qui représentent près de 20% de la population, est pourtant crucial dans les élections en France. "Les plus de 65 ans s'intéressent beaucoup plus que les jeunes à la vie politique et ils votent davantage qu'eux, donc leur poids dans l'électorat est plus important que leur poids démographique", relève Luc Rouban, du Centre de recherches politiques à Paris (Cevipof).

Ainsi, 76% des seniors ont voté lors des trois derniers scrutins en France, alors que dans la tranche des 25-34 ans, moins d'un électeur sur deux s'est déplacé, selon une enquête du Cevipof.

Au salon de la Roche-sur-Yon, plusieurs des visiteurs qui naviguent entre les stands de douches aménagées ou de monte-escaliers, se disent déçus par le candidat de la droite François Fillon, menacé d'inculpation pour avoir fourni des emplois présumés fictifs à sa femme et deux de ses enfants.

"Plus ils ont d'argent, plus ils en veulent. Des fois, on est en colère, on a une tellement petite retraite", confie Marie-Josèphe, 80 ans, qui ne veut pas donner son nom.

Concourt
Concourt "Super Mamie Vendée" à La Roche-sur-Yon, dans l'ouest de la France, le 3 mars 2017
AFP

Elle a travaillé plusieurs années avec son mari Marcel, qui gérait un petit magasin d'alimentation à La Rochelle. "On n'est jamais partis en vacances".

A eux deux, ils touchent moins de 1.400 euros de retraite mensuelle. "Si on n'avait pas de jardin, je ne sais pas comment on ferait. C'est 40% de notre nourriture", explique Marcel, né en 1932.

S'il rechignent parfois à discuter du sujet, les retraités rencontrés au Salon se disent tous déterminés à aller voter les 23 avril et 7 mai.

"On vote toujours", souligne Danièle Pubert, femme de ménage à la retraite de 65 ans, blonde et élégante, venue avec son compagnon Jean-Pierre Farré, un ancien sommelier de trois ans son aîné.

- 'Effet de génération' -

Souvent libéraux au plan économique et conservateurs sur les questions de société, les plus de 65 ans penchent en majorité vers la droite dite "classique".

Une participante au concours de
Une participante au concours de "Super Mamie" à La Roche-sur-Yon, dans l'ouest de la France, le 3 mars 2017
AFP

Affaires ou pas, François Fillon restait le candidat favori de 32% des retraités, selon une enquête du Cevipof réalisée en février alors que le champion de la droite ne convainquait que 9,5% des moins de 34 ans.

En revanche, les seniors sont longtemps restés rétifs au Front national, le parti d'extrême droite à la popularité grandissante mené par Marine Le Pen.

"Se séparer de l'Europe, changer la monnaie: ça ne tient pas debout", estime Marcel à propos de son programme.

"Les intentions de vote pour le FN déclinent de manière abrupte au-delà de 65 ans. On a vraiment une opposition majeure entre les classes d'âge actives et les inactifs", détaille Joël Gombin, politologue.

Il y voit "un effet de génération": chez les seniors, des "référents historiques tels que la Seconde guerre mondiale, la guerre d'Algérie, l'antifascisme (...) opèrent encore des effets puissants".

Le concourt de
Le concourt de "Super Mamie" à La Roche-sur-Yon, dans l'ouest de la France, le 3 mars 2017
AFP

Cette défiance commence toutefois à s'estomper, souligne Luc Rouban: "chez les plus modestes, le Front national réussit à gagner un peu de terrain".

Danièle Pubert est ainsi décidée à voter Marine Le Pen, "pour un grand changement. Nous les Français, on n'est plus prioritaires" dans notre pays, juge-t-elle. "Ce sera comme (le président américain Donald) Trump, elle aura des gens derrière pour la raisonner", estime son compagnon.

Partager cet article

Dans la même thématique

Des retraités désabusés face à la présidentielle
3min

Politique

« L’humour est de gauche » selon l’humoriste belge Alex Vizorek

C’est l'un des Belges les plus connus de la scène humoristique francophone. Passé par France Inter, il officie désormais à RTL. Comment un humoriste est-il passé d’un public à l’autre ? Comment faire indifféremment rire un public de droite et de gauche ? Cette semaine, Alex Vizorek est l’invité de Rebecca Fitoussi dans l’émission Un monde, un regard.

Le

Des retraités désabusés face à la présidentielle
3min

Politique

Parlement européen : « la droite traditionnelle pro-européenne joue avec l’extrême droite » pour Javier Moreno Sanchez   

« Un discours ferme et rassembleur ». Pour la députée centriste du groupe Renew, Fabienne Keller, les propos tenus par Ursula von der Leyen sont « absolument essentiels en ce moment historique où nous sommes en tension maximum avec Vladimir Poutine ». La présidente de l’exécutif européen a en effet annoncé une esquisse de nouvelles sanctions contre la Russie. Dans ce contexte, l’eurodéputée française estime que « la défense que l’on n’a pas voulue dans les années 50, s’impose à nous » désormais.   « C’est un peu tard mais elle commence à réagir »   Concernant le conflit israélo-palestinien, l’eurodéputé espagnol Javier Moreno Sanchez espère que qu’Ursula von der Leyen ira plus loin dans la condamnation des actes commis par l’Etat hébreu. « Ce que nous lui demandons, c’est qu’elle agisse avec la même fermeté dans les deux guerres qu’on a à nos portes ». A la surprise générale, la présidente de la Commission a annoncé vouloir suspendre une partie de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël, mais pour le social-démocrate, c’est l’ensemble de ce texte qui doit remis en cause.     Mais pour l’eurodéputé espagnol, l’urgence est de ne pas revenir sur les grands textes des précédentes mandatures de la Commission. Qu’il s’agisse du pacte migratoire ou des mesures écologiques, « il ne faut pas qu’Ursula von der Leyen démonte les propositions qu’elle a faites (…) on ne savait pas que la droite traditionnelle pro-européenne allait jouer avec l’extrême droite ».  « Ce n’est pas une Europe sociale, mais une Europe militariste »   Le groupe des Conservateurs et réformistes est nettement plus critique vis-à-vis du grand oral de la présidente de la commission. L’élu roumain Gheorghe Piperea souhaite la démission de la commissaire allemande. En juillet, il faisait déjà partie de ceux qui avait voté une motion de censure à l’encontre de cette dernière. Pour cet eurodéputé conservateur l’Union européenne nourrirait le conflit ukrainien en multipliant ses aides, notamment militaires. Ce député a par ailleurs dénoncé l’accord commercial conclu « sur un terrain de golf en Ecosse » entre Ursula von der Leyen et Donald Trump, le qualifiant « d’échec ».    Retrouver l’intégralité de l’émission en intégralité ici  

Le

Avis d’arret de travail Illustration
9min

Politique

Report de congés pour cause d’arrêt maladie : la délégation aux entreprises du Sénat saisit Sébastien Lecornu face à une décision « terrible » pour les PME

« Je saisis par courrier le premier ministre pour qu’une action au sommet de l’Etat soit engagée dans les plus brefs délais auprès des instances européennes », annonce à publicsenat.fr le président de la délégation aux entreprises du Sénat, le sénateur LR Olivier Rietmann, alors qu’un salarié malade pendant ses vacances pourra reporter ses congés, selon une décision de la Cour de cassation.

Le