Former French president Nicolas Sarkozy, React to Verdict in Paris
Nicolas Sarkozy condamné dans l'affaires des financements libyen //PECQUENARDCYRIL_1.0107/Credit:Cyril Pecquenard/SIPA/2509251515

Dossier libyen : Nicolas Sarkozy sera incarcéré le 21 octobre à la prison de la Santé

L’ancien président de la République, Nicolas Sarkozy, s’est présenté ce lundi au Parquet national financier pour préparer l’exécution de sa condamnation à cinq ans de prison ferme, assortie de l’exécution provisoire, dans le cadre de sa condamnation du financement libyen. Il sera incarcéré le 21 octobre à la prison de la Santé.
Emma Bador-Fritche

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Pour la première fois dans l’histoire de la Ve République, un ancien président français s’apprête à connaître la prison. Ce lundi 13 octobre, Nicolas Sarkozy a quitté le Parquet national financier (PNF) sans un mot. Convoqué pour préparer son incarcération à la suite de sa condamnation à cinq ans de prison ferme, dont exécution provisoire, dans le cadre du procès du financement libyen, l’ancien chef de l’État connaît désormais la date et les modalités de son écrou. Ses avocats ont toutefois choisi de ne pas rendre ces informations publiques, afin d’éviter toute surmédiatisation. Mais selon une information BFM, confirmée par l’AFP, il sera incarcéré à partir du 21 octobre à la prison de la Santé, à Paris. Tout s’est joué en quarante minutes. Nicolas Sarkozy est arrivé au PNF à 13 h 45 et en est ressorti à 14 h 25, sans déclaration. L’entretien, purement administratif, visait à vérifier son état de santé et à lui notifier les modalités de sa détention. Reconnu coupable le 25 septembre d’association de malfaiteurs dans l’affaire du financement libyen présumé de sa campagne présidentielle de 2007, Nicolas Sarkozy devra désormais être incarcéré, malgré l’appel interjeté par sa défense. Le tribunal a en effet prononcé un mandat de dépôt à effet différé avec exécution provisoire, justifié par « l’exceptionnelle gravité des faits ». Une décision qui fait de lui un cas unique en Europe, aucun autre ancien chef d’État de l’Union européenne n’ayant jamais été emprisonné après la fin de son mandat. À la différence de ses co-condamnés, Alexandre Djouhri, l’intermédiaire, et Wahib Nacer, le banquier, tous deux immédiatement écroués, Nicolas Sarkozy a obtenu un délai afin d’organiser sa vie personnelle et professionnelle avant son entrée en détention.

Comment sera détenu Nicolas Sarkozy ?

En tant qu’ancien président de la République, Nicolas Sarkozy pourrait être placé dans le quartier dit des « vulnérables ». Il devrait bénéficier d’une cellule individuelle de 10 mètres carrés de trois parloirs hebdomadaires, de promenades quotidiennes, et d’un accès téléphonique restreint à des numéros validés par la justice. En région parisienne, seules deux maisons d’arrêt disposent d’un « quartier vulnérable » : la Santé à Paris et Fleury-Mérogis, en Essonne.

Une condamnation historique après dix ans d’instruction

Le 25 septembre dernier, à l’issue de dix années d’enquête, le tribunal a reconnu Nicolas Sarkozy coupable « d’association de malfaiteurs ». La justice estime qu’il a laissé ses plus proches collaborateurs, notamment Claude Guéant et Brice Hortefeux, solliciter la Libye de Mouammar Kadhafi en vue d’obtenir un financement illégal pour sa campagne présidentielle victorieuse de 2007. Le tribunal a toutefois jugé ne pas disposer de preuves attestant que les fonds libyens ont effectivement alimenté la campagne. Nicolas Sarkozy, lui, nie toute implication et dénonce un « complot » politique. À la sortie du tribunal, il a fustigé « un jugement d’une extrême gravité pour l’État de droit », réaffirmant son innocence et annonçant son intention de faire appel. « Je dormirai en prison la tête haute », a-t-il martelé.

Les recours possibles et les conditions de détention

Dès son entrée en prison, le 21 octobre, la défense pourra déposer une demande de mise en liberté devant la cour d’appel, qui disposera de deux mois pour statuer. En cas de rejet, de nouvelles demandes pourront être formulées ultérieurement.

L’âge de Nicolas Sarkozy (70 ans) ne lui permettra pas d’éviter la détention, les aménagements de peine ne concernant que les condamnations définitives. Toutefois, son profil, faible risque de récidive et de fuite, pourrait lui ouvrir la voie à une libération anticipée avant la fin de l’année.

Un « verre d’adieu » avant la prison

Avant son incarcération, Nicolas Sarkozy a réuni, mercredi soir, une centaine d’anciens collaborateurs pour un dernier verre d’adieu dans un pavillon du bois de Boulogne, selon les informations du Figaro. « L’affaire Dreyfus a commencé avec un faux ! », aurait-il lancé, avant d’ajouter : « Le Comte de Monte-Cristo commence par un faux ! À chaque fois, la vérité finit toujours par triompher, ce n’est qu’une question de temps. » Des propos prononcés dans une atmosphère empreinte de défi, à l’image de l’ancien président.

Si la droite et l’extrême droite ont dénoncé cette incarcération avant jugement définitif, Marine Le Pen évoquant sur X « un grand danger dans la généralisation de l’exécution provisoire par certaines juridictions », une majorité de Français (61 %) la jugent au contraire « juste », contre 38 % qui la trouvent « injuste », selon un sondage Elabe pour BFMTV.

Les suites judiciaires et les autres prévenus

Les sept prévenus condamnés dans ce dossier, ainsi que le Parquet national financier, ont tous fait appel. Le ministère public conteste également certaines relaxes, dont celle d’Éric Woerth, trésorier de la campagne de 2007. Un nouveau procès devra donc se tenir dans les prochains mois devant la cour d’appel de Paris. En première instance, les juges avaient reconnu que des flux financiers étaient bien partis de Libye, sans que la preuve de leur arrivée dans les caisses de campagne ne soit apportée. En droit, cependant, la préparation d’un financement illégal suffit à caractériser l’association de malfaiteurs, même sans exécution concrète. Si les trois condamnés soumis à mandat de dépôt restent incarcérés, la justice dispose de six mois pour organiser le nouveau procès, un délai renouvelable deux fois. Passé dix-huit mois, s’il n’a pas eu lieu, ils doivent être libérés.

Un président sous le poids des affaires

Cette incarcération intervient alors que Nicolas Sarkozy reste englué dans d’autres procédures politico-judiciaires. Le 8 octobre, la Cour de cassation a examiné son pourvoi dans l’affaire Bygmalion, relative à la campagne présidentielle de 2012. La cour d’appel de Paris l’avait condamné en février 2024 à un an d’emprisonnement, dont six mois ferme, pour financement illégal de campagne électorale. Ce dossier portait sur un système de fausses factures mis en place avec la société Bygmalion, visant à dissimuler le dépassement du plafond légal des dépenses de campagne. La Cour de cassation se prononcera sur l’affaire le 26 novembre.

Déjà condamné définitivement dans l’affaire des écoutes, dites aussi Bismuth, le sixième président de la Ve République vit désormais ce qu’il décrit lui-même comme un « combat judiciaire ».

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