« Les subventions en direction des associations ne baisseront pas d’un seul euro », a certifié Marlène Schiappa aux sénateurs de la Délégation aux droits des femmes. Depuis quelques jours, la rumeur enflait : le budget du secrétariat d’État chargé de l’Égalité entre les hommes et les femmes pourrait être amputé de près de 7 millions d’euros. Une somme énorme compte tenu du petit budget dont il dispose, à savoir environ 30 millions d’euros. Un ministère « historiquement sous doté », déplore Chantal Jouanno, présidente de la Délégation aux droits des femmes.
Pour autant, l’ancienne ministre « cautionne les politiques de réduction de dépenses budgétaires », à condition que les subventions allouées aux associations féministes, « premiers acteurs sur le terrain », soient épargnées. « On ne pourrait pas mener une politique en faveur des femmes sans les associations. Ce serait se tirer une balle dans le pied que de réduire leur budget, c’est politiquement impossible. »
« Des dépenses structurelles »
C’est pourquoi Chantal Jouanno croit la secrétaire d’État lorsque celle-ci affirme que la réduction de son budget sera cantonnée à une baisse des « dépenses structurelles ». Qui plus est quand le Président a élevé « la question de l’égalité entre les hommes et les femmes comme grande cause nationale », renchérit-elle.
Certains sénateurs sont toutefois restés perplexes. « Comment fait-on si on a moins d’argent pour que les subventions soient les mêmes ? » s’interroge le sénateur LR Laurent Gournac. Hélène Conway-Mouret, sénatrice socialiste, estime également que, dans l’hypothèse où la réduction budgétaire avoisinerait les 25%, il ne serait « pas possible » que cela affecte uniquement les dépenses de fonctionnement du secrétariat d’État : « Il n’y a pas 7 millions de frais de fonctionnement sur son ministère ! »
« Tous les chiffres qui circulent sont faux »
Marlène Schiappa a tenu à rappeler que « tous les chiffres qui circulaient étaient faux ou étaient issus de notes internes et donc n’avaient pas été validés ». Elle martèle que son budget n’a pas encore été arrêté.
« Elle a tout intérêt à ne pas rester dans le flou et à clarifier les choses », estime Hélène Conway-Mouret. Ce à quoi la secrétaire d’État répond qu’elle « ruinerait sa propre diplomatie si elle faisait des annonces » alors que son budget est « en construction ». « Elle ne peut pas prendre d’engagements à ce stade, les négociations commencent. J’ai été ministre je sais comment ça se passe : au début, beaucoup d’informations fuitent », explique Chantal Jouanno.
« L’interministérialité est la grande cause nationale du quinquennat »
La ministre a toutefois anticipé les inquiétudes des membres de la Délégation aux droits des femmes et prévoit d’augmenter son budget grâce à l’interministérialité. Ainsi le dispositif pour les pénalités infligées aux entreprises qui ne respectent pas l’égalité hommes/femmes serait financé par le ministère chargé de l’Action et des comptes publics, les dispositifs pédagogiques sur les droits fondamentaux des femmes au travail par ceux du Travail et de la Santé, les interventions en milieu scolaire par le ministère de l’Éducation et les travaux sur les femmes agricultrices grâce au budget de l’Agriculture. Des exemples que Marlène Schiappa a pris le temps d’énumérer car « l’interministérialité est la grande cause nationale du quinquennat ».
« J’ai un petit doute sur l’interministérialité », confie Françoise Laborde, sénatrice RDSE. Si elle y croit sur le principe, elle a « un peu de mal à y croire car ces ministères-là devront aussi baisser leur budget ». « Elle parle beaucoup de com’ et de pédagogie mais qui dit com’ et pédagogie, dit quelques sous là aussi », a-t-elle ajouté.
Mais Marlène Schiappa n’est pas à court de solutions pour justifier que les subventions aux associations ne seront pas réduites : « C’est l’Élysée qui prendra en charge les questions liées au tour de France de l’égalité entre les femmes et les hommes. » Un tour de France qui a vocation à permettre de suivre la « ligne directrice du gouvernement », à savoir « adapter les politiques publiques aux réalités des régions et des départements » tel l’accès à l’IVG par exemple.
Dans l’ensemble, les sénateurs semblent avoir été rassurés par les propos de la secrétaire d’État et veulent avant tout lui « laisser sa chance ». Même Alain Gournac, qui estime que « si le budget descend, ce serait une catastrophe pour le combat pour l’égalité hommes/femmes », souhaite lui laisse le temps de « démarrer ».
(sujet vidéo : Flora Sauvage)