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Duel Macron-Le Pen : quelles sont les propositions des candidats en matière de santé ?
Par Louis Dubar
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A Fréjus début janvier 2022, la candidate du Rassemblement National (RN) établit un diagnostic cinglant : « Les maux dont souffre notre système de santé ne remontent pas à la crise sanitaire. L’épuisement des personnels ne date pas du Covid, les déserts médicaux non plus et la saturation des services d’urgence est bien antérieure à l’arrivée du virus. » Fustigeant la politique menée par le président sortant qui aurait aggravé la situation depuis le début du quinquennat, Marine Le Pen veut « mettre fin aux dérives bureaucratiques » qui régneraient dans les hôpitaux et entend lancer « un plan de soutien d’urgence de 20 milliards d’euros. » En cas d’élection à la présidence de la République, la candidate d’extrême droite entend lutter contre le « tourisme médical aux frais du contribuable » qui serait à l’œuvre dans l’Hexagone en privilégiant le principe de « préférence nationale, » un phénomène encouragé selon elle par l’Aide médicale d’Etat (AME), un dispositif « dévoyé » permettant aux étrangers en situation irrégulière de bénéficier d’un accès aux soins. D’après la Fédération nationale de la Mutualité Française, l’AME ne représentait pourtant que 0,4 % des dépenses de santé en 2020.
Après le secteur éducatif, la santé est érigée par le président sortant comme un « chantier essentiel » d’un éventuel futur quinquennat. L’actuel locataire du palais de l’Elysée reconnaît qu’il faut « regarder la réalité en face. » Malgré le Ségur lancé en 2020, le système de santé est touché par « une crise de sens qui touche beaucoup de professionnels. » Emmanuel Macron entend également intensifier la lutte contre les déserts médicaux. « 10 % de la population n’a pas de médecin traitant. Cette situation crée selon lui « de l’injustice territoriale avec des populations très précarisées. » Pour répondre à ces défaillances, le président mise comme pour l’école sur des concertations à l’échelle locale réunissant « l’ensemble des parties prenantes. » Patients, professionnels et élus seraient conviés à ces réunions pour « construire des solutions locales. » Parallèlement à cette action, le président fixerait « des objectifs nationaux » et débloquerait « plusieurs leviers » pour répondre « à l’ensemble des besoins de santé publique. »
Hôpital public
Les propositions du président sortant concernant l’hôpital s’inscrivent à partir « des réformes qui ont été commencées » pendant le quinquennat notamment le Ségur, plan lancé au lendemain de la première vague Covid doté de 19 milliards d’euros d’investissements. Interpellé par des soignants lors de son déplacement en Alsace le 12 avril sur le manque de moyens humains et financiers à l’hôpital, le président candidat défend son bilan : « Nous avons fait le plus grand plan d’investissements de l’histoire de l’hôpital, tous les soignants ont été augmentés entre 183 et 400 euros par mois. » Celui qui s’engageait à « refonder l’hôpital public » au cœur de la pandémie, promet de poursuivre « le sauvetage de l’hôpital » en renforçant les efforts en matière de simplification administrative, d’investissements et de revalorisation des salaires. Face au travail administratif des soignants, le président s’engage à réduire cette charge et à placer le personnel médical au cœur de la gouvernance des établissements de santé sans détailler avec précision cette mesure.
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Pour Marine Le Pen, l’hôpital public est au bord du gouffre. Elle entend « rendre » aux Français le système de soins « qui a fait leur fierté pendant des décennies. » La candidate d’extrême droite s’engage à consacrer une enveloppe de deux milliards d’euros sur cinq ans pour la revalorisation des salaires du personnel hospitalier et améliorer l’attractivité des métiers du médical. Pour « contrer » la « dérive bureaucratique » en place, les agences régionales de santé (ARS) créées sous la présidence de Nicolas Sarkozy seraient supprimées. La tutelle des hôpitaux serait placée sous l’autorité des préfets de région et des directions régionales des affaires sanitaires et sociales (DRASS). Toujours dans cette logique de ‘débureaucratisation’des hôpitaux, la candidate entend réformer le système de gouvernance et prévoit une direction bicéphale avec un administrateur « compétent sur les questions administratives et financières » et un médecin en charge de « la politique des soins. » En cas d’élection de Marine Le Pen à la présidence de la République, le mode de financement de l’hôpital serait revu avec une suppression de la tarification à l’activité (T2A), « remplacée par une dotation globale pour chaque établissement. » La candidate entend également instaurer un moratoire sur les fermetures des lits. Elle entend renforcer les effectifs en ouvrant 10 000 places supplémentaires dans les Instituts de Formation en Soins hospitaliers.
Accès aux soins et prévention
Le candidat LREM entend renforcer la coordination entre la médecine de ville et l’hôpital, un moyen selon lui de désengorger les urgences hospitalières saturées. Il propose un dispositif : « Hôpital hors les murs, des médecins exerçant en ville mais salariés de l’hôpital. » D’autres pistes sont évoquées dans le programme d’Emmanuel Macron comme la création d’un numéro unique permettant d’accéder à un rendez-vous médical d’urgence sous 48 heures. Marine Le Pen rejoint cette volonté de désaturer les services des urgences en augmentant les effectifs et en créant des partenariats entre hôpitaux et les médecins de ville pour une meilleure prise en charge des patients.
Les deux finalistes à l’élection présidentielle s’accordent également sur la nécessité de donner plus de place à la prévention. La candidate lepéniste entend généraliser de manière systématique « les visites médicales » dans les établissements scolaires. Emmanuel Macron préconise un plan « ambitieux autour de la santé des femmes », la détection des écarts de développement pour les enfants notamment des dix « dys » (dyslexie, dysorthographie, dysgraphie…), une politique de prévention de l’obésité et des bilans complets gratuits aux âges clés de 25, 45 et 60 ans. En cas de réélection, il entend renforcer « l’accompagnement personnalisé et connecté » des personnes atteintes de maladies chroniques.
Déserts médicaux
D’après la Fédération nationale de la Mutualité Française, 7,4 millions de personnes vivent dans une commune où l’accès à un médecin généraliste est limité. Cette tendance n’est pas près de s’inverser, la densité médicale par département a fortement diminué dans ces territoires depuis le début du millénaire.
Face à cette problématique de raréfaction des médecins, le président sortant veut renforcer les effectifs dans les départements les moins dotés en y organisant la quatrième année d’internat des étudiants en médecine générale, une initiative incitative basée sur le volontariat. Pour alléger le travail des médecins présents, le candidat s’engage à « déployer des permanences ponctuelles. » Il inscrit également ses mesures dans un souci de simplification notamment pour les personnes suivant un traitement, la possibilité de nommer « un pharmacien ou infirmier référent sur un territoire de santé » pour « un renouvellement d’ordonnance ou des choses simples à faire » et le développement de la télémédecine, mesure également soutenue par Marine Le Pen.
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La candidate du RN entend « réduire le nombre de déserts médicaux grâce à des incitations financières fortes » Elle entend « 'démétropoliser' » le territoire pour établir un rééquilibrage entre les territoires ruraux et les centres urbains, revoir l’aménagement du territoire pour « résoudre la fracture sanitaire. » Interrogée sur France Info sur ce « rééquilibrage », la candidate déclare : « Vous n’amènerez pas un médecin dans la campagne s’il n’y a pas d’école, s’il n’y a pas un hôpital […]. C’est l’intégralité de l’aménagement de notre pays qu’il faut revoir. » La candidate préconise également une augmentation du nombre de places dans les facultés de médecine et de réduire de « manière drastique » le recours aux médecins étrangers.
Grand âge et dépendance
La publication du livre enquête « Les Fossoyeurs » de Victor Castanet en janvier a placé la gestion des Ehpad et la question de la dépendance au cœur de la campagne électorale. Emmanuel Macron veut recruter 50 000 infirmiers et aides-soignants supplémentaires d’ici 2027. Il souhaite également une nouvelle gouvernance des Ehpad et renforcer la concertation entre les directeurs, les résidents et les familles.
Lors de ses prises de parole Marine Le Pen rejoint ce constat d’un manque de moyens humains dans le secteur de la dépendance. En cas d’élection, elle s’engage à « accroître la présence du personnel médical […], chaque établissement doit être doté d’un médecin coordinateur et d’un infirmier présent 24 heures sur 24. » Elle prévoit la multiplication des maisons de retraite et des centres de santé grâce à l’application d’un « plan massif » lancé par l’Etat avec le soutien des collectivités locales.